L'ancien responsable de la Division nationale anti-terroriste (DNAT) Roger Marion, � qui l'enqu�te sur l'assassinat du pr�fet Erignac avait �t� confi�e, a expliqu� jeudi devant la cour d'assises sp�ciale qu'il n'avait "pas d'�l�ments" pour interpeller Yvan Colonna avant sa fuite.
"Le d�but de la manifestation de la v�rit�, c'est quand Didier Maranelli passe aux aveux. Avant nous n'avions pas d'�l�ments contre Colonna", a assur� � la barre Roger Marion, 56 ans, devenu pr�fet d�l�gu� � la s�curit� � Marseille. En outre, lors de ses premiers aveux, Maranelli d�signe les co-auteurs par "X1", "X2", ne donnant les noms que quelques heures plus tard en garde � vue dans la nuit du 22 au 23 mai.
Le 23 mai, les recherches pour interpeller Colonna restaient vaines. Roger Marion oublie volontairement les notes du pr�fet Bonnet. Dans la premi�re dat�e de novembre 1998, publi�e en exclusivit� par L�investigateur, l�ancien pr�fet donnait d�j� les noms de Castela, Andriuzzi et Ferrandi. Il soulignait : � La participation de ces trois personnes aux pr�paratifs de l�assassinat de Claude Erignac serait quasiment certaine. � La note est � oubli�e � par le procureur Dintilhac. La deuxi�me note remise le 11 d�cembre redonne le nom d�Alain Ferrandi, celui de Versini, celui de St�phane Colonna. Le pr�fet rappelle les arrestations du 18 novembre 1998. � cette date, Andriuzzi, Antolini, Castela et Antoniotti ont �t� mis en garde � vue. Antoniotti seul sera lib�r� ce qui lui vaudra la r�putation d�avoir �t� la taupe du pr�fet. Il le niera farouchement tout comme le pr�fet d�ailleurs.
Les deux notes sont transmises � Roger Marion, alors patron de la DNAT et � Bernard Squarcini, num�ro 2 des RG, le 9 janvier. Jean-Louis Brugui�re, juge anti-terroriste, rencontre le pr�fet Bonnet en pr�sence du directeur adjoint du ministre de l�int�rieur le 8 janvier 1999. Brugui�re tombe alors des nues. La seule r�sultante sera le placement d�Alain Ferrandi sous �coute t�l�phonique. Car aussi extraordinaire que cela puisse para�tre aucun membre du commando identifi� par le pr�fet Bonnet ne l�est encore. La division est alors � son comble au sein de la justice anti-terroriste. La juge Le Vert qui entretient d�excellents rapports avec Roger Marion n�est pas tenue au courant par le juge Brugui�re des renseignements amen�s par le pr�fet. De plus Brugui�re et Le Vert, plac�s tr�s � droite sur l��chiquier politique d�testent le juge Thiel au point de se prendre le bec devant le malheureux Mathieu Filidori, accus� de porter sur ses maigres �paules la piste agricole.
La v�ritable question est donc : pourquoi les juges anti-terroristes qui � l��poque lancent des commissions rogatoires dans tous les sens, n�ont jamais �prouv� le besoin d�entendre ceux qui sont d�sign�s dans les notes Bonnet. Deux hypoth�ses. La premi�re est �voqu�e dans le livre � L�enqu�te sabot�e �. Elle sugg�re des complicit�s au plus haut niveau. C�est une hypoth�se farfelue qui ne tient aucunement compte des inimiti�s au sein m�me de l��tat. La deuxi�me la plus vraisemblable est l�immense cafouillage caus� par les jalousies et les ambitions des uns et des autres. Marion ne veut pas croire que la piste lanc�e par son ennemi le pr�fet Bonnet soit la bonne. Il avait fait arr�ter St�phane Colonna, faussement d�sign� dans les notes Bonnet. Il aurait tout aussi bien pu arr�ter Yvan. Mais il ne le fait pas car jusqu�au bout il ne croit pas � cette piste. Les aveux de Maranelli sont � la fois une excellente surprise et la pire de toutew. Les arrestations ont �t� lanc�es � la va-vite parce que le pr�fet Bonnet alors incarc�r�, va �tre entendu par le juge. Il risque de d�voiler le contenu de ses notes. Plut�t que de prendre le risque de se faire accuser de n�avoir rien fait, mieux vaut pratiquer quelques arrestations. Et puis Maranelli parle. C�est inesp�r�.
Mais Roger Marion reste butt�. Et plut�t que d�accepter l�aide du SRPJ local et des RG, il pr�f�re attendre le lendemain matin et tenter l�arrestation d�Yvan Colonna avec des effectifs r�duits. Celui-ci a eu tout le temps de prendre ses dispositions. Non qu�il ait �t� pr�venu par des amis de son p�re. Mais tout simplement parce que ses propres amis ont �t� arr�t�s et qu�il est au courant. La veille il a parl� � la t�l�vision sans que le commissaire Marion soit plus �mu que �a. Au petit matin, le principal suspect a disparu.
Le policier a assur� que l'essentiel de l'enqu�te reposait alors sur le relev� d'utilisation de t�l�phones portables, instrument qu'Yvan Colonna ne poss�dait pas � l'�poque et qu'aucun �l�ment (pass�, relations avec les personnes interpell�es) ne permettait de remonter jusqu'� lui.
Aux �tats-Unis, l��tude de plusieurs millions d�appels par le FBI, apr�s le premier attentat contre le Trade Center avait demand� quelques jours. En France quelques dizaines de milliers d�appels ont exig� un an et demi. La technique fran�aise peut mieux faire. La v�rit� l� encore est que les policiers s�ent�taient dans la piste agricole alors que les v�ritables coupables s�agitaient sous leurs yeux.
Le mouvement nationaliste Indipendenza a myst�rieusement d�clar� que " le proc�s qui commence pr�sage d'une volont� �tatique d'en finir avec le probl�me corse".
Pour conclure martialement et un rien inutilement : � Ce n'est qu'un �pisode de plus dans l'affrontement s�culaire opposant le peuple corse � l'�tat fran�ais dans une logique de guerre coloniale"
Avec �a la cause corse vient d�accomplir un pas de g�ant.
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