Corse: la campagne officielle du r�f�rendum s'ouvre dans la morosit�
Jun 24, 2003
Auteur: L'investigateur

La campagne officielle du r�f�rendum du 6 juillet s'est ouverte lundi en Corse dans un climat de morosit� marqu� par les divisions au sein de la classe politique insulaire et les derniers soubresauts du conflit social. Tandis que les plages sont noires de monde, les �lus s�interrogent sur la fa�on de mener la campagne. La plupart des groupes ont fait appel � des sp�cialistes de la communication pour tenter de faire passer un message souvent r�duit � quelques minutes, temps d�volu par le Conseil sup�rieur de l'audiovisuel (CSA).

� Ajaccio, �cras�e par la chaleur, aucune affiche n'avait encore �t� coll�e sur les panneaux d'affichage �lectoral en ce lundi 23 juin. � Bastia, la seule propagande tangible �tait cette longue banderole proclamant "Bastia dit non � la suppression des d�partements" accroch�e au dernier �tage de l'h�tel de ville, g�r� par �mile Zuccarelli (PRG), farouche opposant � la r�forme. Elle �tait cens�e saluer la venue du Premier Ministre et du ministre de l�int�rieur. Elle a �t� retir�e lundi matin sur ordre du CSA.

Le v�ritable enjeu de la campagne est de convaincre les ind�cis et ils sont nombreux. Jean-Pierre Raffarin a pu le mesurer au faible nombre de supporters venus l��couter � l�a�roport de Bastia. Deux cents, c�est d�risoire pour la Haute-Corse. L�explication tient � la division de la droite qui a voulu � punir � Paul Natali, le dirigeant officiel de l�UMP qui accompagnait les deux ministres. En d�montrant qu�il n��tait gu�re capable de mobiliser plus que sa famille et ses quelques amis, ses adversaires de droite croyaient le ridiculiser. Ils ont en fait jouer un bien mauvais tour au r�f�rendum. Mais on ne change pas d�un coup de baguette magique, les rois de Cloche-Merle et leurs crises de campanilisme aigu.
Sept �lecteurs sur dix (69%) se disent ainsi int�ress�s par le d�bat, selon un sondage IPSOS publi� samedi par le Figaro.

Comme pour les pr�c�dents statuts de l'�le, les divisions traversent l�habituel clivage gauche-droite. Deux des trois d�put�s de gauche soutiennent le "oui", tout comme les t�nors de la droite. Mais des �lus divers droite et UDF attaquent une r�forme qui "fait le jeu des nationalistes", un argument partag� � gauche par les communistes et les �lus rassembl�s derri�re M. Zuccarelli et le s�nateur Nicolas Alfonsi.

Au bout du compte se dessine une Corse tradionnellement habitu�e aux bretelles et � la ceinture, invoquant sans cesse l��tat pour mieux en profiter. De l�autre, les partisans du oui ont compris que la conjoncture changeait au niveau mondial et que, peut-�tre, il fallait se pr�parer � des lendemains plus difficiles. L�incertitude vient de ce que la Corse est habit�e par une population vieillissante et craintive. Les partisans du � non � jouent sur la peur du nationalisme comme autrefois on jouait sur la peur du communisme. � les entendre, le � oui � au r�f�rendum serait la porte ouverte � l�ind�pendance. Mais dans un m�me temps, ils expliquent que le projet n�est qu�une � r�formette � sans importance qui ne valait m�me pas qu�on en discute.

Un d�bat vif a d'ailleurs oppos� lundi midi, sur France Bleu RCFM, Nicolas Alfonsi, s�nateur de Corse-du-Sud du Rassemblement d�mocratique et social europ�en (RDSE), regroupant des �lus de l'UMP et du PRG, � Jean-Guy Talamoni, chef de file de Corsica Nazione et partisan du "oui". "Nicolas Sarkozy c�de aux nationalistes (...) Il trompe les �lecteurs en affirmant que la question institutionnelle va �tre r�gl�e pour vingt ans. La seule fa�on de dire � on en a assez de ces r�formes permanentes � est de voter non", a d�clar� M. Alfonsi. "Il n'est pas question ici d'ind�pendance (...) Cette r�forme n'est pas tr�s audacieuse et est loin de ce que demandent les nationalistes", a r�pondu M. Talamoni. "Mais elle est toujours bonne � prendre en supprimant les conseils g�n�raux et en affaiblissant le syst�me claniste", a-t-il ajout�.

"Le drame, c'est que la Corse va perdre, que le 'oui' ou le 'non' l'emporte", a estim� Nicolas Alfonsi. "On nous impose un scrutin proportionnel pour la future collectivit� territoriale (...) En fait, l'�lection aboutira, par un effet m�canique, � l'augmentation du poids des nationalistes", a-t-il r�p�t� pour la ni�me fois. "C'est un cadeau fait aux nationalistes" sans expliquer que l�augmentation math�matique des nationalistes sera �videmment compens�e par l�augmentation tout aussi math�matiques de toutes les forces politiques pr�sentes sur l��chiquier corse.


Au-del� de la question institutionnelle, la principale inconnue du scrutin porte sur l'impact du conflit de la r�forme des retraites, tr�s suivi dans l'�le, et qui pourrait, comme il l'a montr� en perturbant fortement la visite samedi de Jean-Pierre Raffarin et Nicolas Sarkozy, encourager le vote protestataire le 6 juillet.

Le gouvernement a affich� sa confiance dans l'issue du r�f�rendum sur la r�forme du statut de la Corse, dont la campagne officielle s'est ouverte lundi.

"J'ai confiance dans la volont� des Corses de s'en sortir", a d�clar� le ministre de l'Int�rieur Nicolas Sarkozy, deux jours apr�s un d�placement houleux sur l'�le en compagnie du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. La victoire du "oui" serait "la premi�re bonne nouvelle depuis 28 ans sur l'�le", a-t-il estim�.
"Aujourd'hui, quand vous demandez pourquoi �a ne marche pas en Corse, c'est toujours la faute de l'autre", a expliqu� fort justement le ministre de l'Int�rieur sur France Inter.

"Avec la collectivit� unique que nous proposons, il y aura un lieu de coh�rence et un lieu de pouvoir. Enfin les Corses sauront � cause de qui �a marche ou � cause de qui �a ne marche pas."

"La le�on du 21 avril, c'est un mot, 'action', mais pas sur les choses faciles. Elles ont d�j� �t� faites par nos pr�d�cesseurs", a-t-il poursuivi.

"Si on n'aime pas les ennuis et si on pr�f�re s'occuper des questions faciles, alors un conseil: surtout ne pas �tre ministre et surtout pas ministre de l'Int�rieur", a-t-il ironis�.

La troisi�me visite de Jean-Pierre Raffarin en Corse a �t� marqu�e samedi par de violentes �chauffour�es � l'a�roport de Bastia, qui ont contraint le Premier ministre � annuler une r�union publique.
Pour Nicolas Sarkozy, ces violences sont le fait d'une "infime minorit�, une centaine de personnes ayant perdu leurs sens". "Ils se sont comport�s avec une violence inou�e (...) Ils prennent la Corse en otage, cela doit cesser", a-t-il dit insistant sur le fait que ces violences inciteraient vraisemblablement la droite corse � voter le projet.

Des prises de positions relatives au projet sur la Corse


No�l Mam�re : abstention

Le d�put� Vert No�l Mam�re a estim� que le gouvernement avait fait le choix de "la caricature" en organisant le r�f�rendum du 6 juillet.
Ces propositions "n'accordent pas l'autonomie que l'on pouvait esp�rer pour la Corse", a-t-il dit.
"Je ne pense pas que ce soit la bonne m�thode que de faire campagne pour le 'oui' dans la mesure o� le gouvernement veut faire croire qu'il a chauss� les bottes de M. Jospin sur les accords de Matignon alors que ce n'est pas du tout le m�me �tat d'esprit", a poursuivi No�l Mam�re.
"Si j'�tais Corse et si j'�tais appel� � voter, je m'abstiendrais", a-t-il conclu. Fort heureusement No�l Mam�re est b�glois et le reste. Il opte donc pour la m�me position que le Front national. Le chef contest� des Verts est d�ailleurs en contradiction avec ses faibles troupes insulaires (une dizaine de personnes inf�od�es � Indipendenza) qui elles, pr�nent le vote positif. Mais peut-�tre est-ce une nouvelle mani�re de se saisir du probl�me corse de fa�on � r�gler ses conflits internes et Dieu sait s�ils sont nombreux au sein des Verts.

Jean Glavany : "oui"

L'ancien ministre socialiste de l'Agriculture et auteur d�un rapport fameux sur la Corse, Jean Glavany a d�clar� lundi que s'il devait voter lors du r�f�rendum sur le statut de la Corse, il voterait "oui", m�me si, selon lui, "le probl�me n'est pas statutaire". Comprenne qui pourra.
"Si on me demande mon avis, je voterais � oui �par souci de coh�rence, pour �tre simple et lisible", a d�clar� le d�put� socialiste sur France Inter, tout en ajoutant qu'il comprenait l'inqui�tude de certains Corses. Heureusement qu�il est port� par un souci de lisibilit�, lui au moins.
Car, d�plorant une politique "illisible" du gouvernement sur le dossier corse, il a soulign� que "le probl�me corse ne s'arr�te pas � ce r�f�rendum et � cette question institutionnelle". Remarque essentielle dont le caract�re d�tonant n�aura pas �chapp� aux lecteurs.
"Le probl�me n'est pas statutaire et donc il faut que le gouvernement tout entier s'engage dans un avenir �conomique social et culturel pour la Corse", a-t-il ajout�. "Sinon ce r�f�rendum ne r�glera rien du tout". Merci, Jean. Ton intervention est aussi utile que l�a �t� ton rapport.

Le PS : oui dans la confusion

Le Parti socialiste a regrett� que le projet de modification du statut de la Corse soumis � r�f�rendum le 6 juillet, ait �t� "mal expliqu�", lundi au cours du point presse hebdomadaire du parti. Selon sa porte-parole Annick Lepetit, "si le PS maintient son appel � voter oui", il met aussi "en garde contre le processus tel qu'il est mis en place", critiquant notamment "la pr�cipitation" de Jean-Pierre Raffarin et Nicolas Sarkozy.
"Nous ne changeons pas de ligne sur le fond", nous a-t-elle rassur�s, "mais nous regrettons l'absence de d�bat alors que l'incompr�hension croit dans un climat social tr�s tendu". "Le gouvernement ne l'a pas compris ou ne veut pas le comprendre", a-t-elle ajout� rendant son message plus obscur encore.
Enfin, A. Lepetit a rappel� que "le PS a plusieurs fois demand� un report" du r�f�rendum et regrett� de ne pas avoir �t� entendu.
Enfin une phrase compr�hensible.


Philippe de Villiers : non

Le pr�sident du Mouvement pour la France (le MPF pour les intimes dont on est ravi de savoir qu�il existe encore) Philippe de Villiers appelle les �lecteurs corses � voter "non" le 6 juillet � la consultation sur la modification du statut de la Corse.
"Non � un projet qui donne aux minorit�s terroristes, par une loi �lectorale particuli�re, les moyens d'imposer leurs aspirations s�paratistes. Il faut dire non aux terroristes corses qui appellent � voter oui".
Philippe de Villiers est toujours aussi positif : non au oui et oui au non. Et vive l�avenir riant � la vicomtoise.

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