Yvan Colonna, en fuite depuis quatre ans
May 24, 2003
Auteur: L'investigateur

Yvan Colonna, l'assassin pr�sum� du pr�fet de Corse Claude Erignac, est en fuite depuis le 23 mai 1998 - soit quatre ans depuis hier. C�est l� un �chec majeur pour la justice et le gouvernement. Les magistrats antiterroristes et tous les services de police et de renseignement ne sont pas parvenus � localiser ce berger, fils d'un ancien d�put� socialiste, soup�onn� d'avoir abattu de trois balles Claude Erignac le 6 f�vrier 1998 � Ajaccio.

Il y a tout lieu de croire que la cour d'assises sp�ciale de Paris jugera � partir du 2 juin, huit hommes accus�s de l'avoir aid� ou d'avoir particip� � la pr�paration de l'attentat et cela en son absence. La cour sera dans une "situation juridique tr�s d�licate", a d�clar� un haut magistrat. "Juger un crime sans son auteur principal pr�sum� est d�j� tr�s rare. Mais en plus, dans ce proc�s, il sera tr�s difficile d'�voquer � l'audience le r�le d'Yvan Colonna, qui d�termine pourtant celui des autres", a-t-il expliqu�.

La proc�dure relative � Yvan Colonna a �t� disjointe en 2002 du reste du dossier par les juges d'instruction antiterroristes Jean-Louis Brugui�re, Gilbert Thiel et Laurence Le Vert, qui poursuivent l'enqu�te.

Nicolas Sarkozy peut se voir reprocher l�assurance dont il a fait preuve lors de son accession au poste de ministre de l�int�rieur.

En mai 2002, il avait vertement critiqu� ses pr�d�cesseurs socialistes et pris l'affaire en main. Il avait indiqu� � Madame Erignac qu�il renfor�ait les moyens mis en �uvre et que les principaux chefs de la police lui rendaient compte directement lors de r�unions r�guli�res. "Ce dispositif restera en place jusqu'� ce que M. Colonna soit arr�t�. C'est � ce moment-l� que nous pourrons comprendre enfin pourquoi il aura fallu tant de temps pour arr�ter un criminel d'�tat", d�clarait le ministre le 5 f�vrier dernier.

Les recherches sur Yvan Colonna ont men� les policiers en Sardaigne toujours sans succ�s. Les technologies les plus modernes auraient �t� utilis�es et de nombreuses personnes ont �t� surveill�es ou plac�es sur �coutes t�l�phoniques. La DST a �t� mise sur le coup. D�tail amusant, un policier se serait m�me d�guis� en Mickey dans l'espoir de surprendre le fuyard lorsque le fils d'Yvan Colonna visitait Eurodisney, selon un livre des journalistes Christophe Dubois et Christophe Deloire publi� en f�vrier.

Au fil des ans il est apparu que la fuite d�Yvan Colonna a �t� favoris�e par la guerre des polices et non pas, comme le commissaire Marion ou le pr�fet Bonnet l�avaient pr�tendu par une complicit� au niveau gouvernemental.

Yvan Colonna s��tait signal� pour la derni�re fois en janvier 2001 dans une lettre au Ribombu, un p�riodique nationaliste, o� il clamait son innocence et excluait toute reddition. Il expliquait que de l'endroit o� il �crivait, il n'avait "pas beaucoup de nouvelles de Corse".

Signe de la nervosit� des structures anti-terroristes un journaliste et un policier ont �t� entendus cette semaine par les enqu�teurs sur l'assassinat du pr�fet de Corse Claude Erignac, dans le cadre des recherches d'Yvan Colonna, l'assassin pr�sum� en fuite depuis quatre ans. Apr�s quarante-huit heures de garde � vue, les deux hommes ont �t� remis en libert� mercredi 21 mai dans la soir�e.

C'est � la demande des juges antiterroristes que Jean-Paul Guillaume, journaliste ind�pendant, et Hubert Marty-Vrayance, commissaire de police sans affectation, ont �t� convoqu�s lundi par la Division nationale antiterroriste (Dnat, de la direction centrale de la police judiciaire) pour le premier et l'Inspection g�n�rale de la Police nationale (IGPN, la police des polices) pour le second.

Le journaliste, qui s'appr�terait � publier un livre de "contre-enqu�te" sur l'assassinat du pr�fet Erignac, a �t� interrog� parce qu'il laissait entendre que, gr�ce � ses sources, il pensait �tre en mesure d'entrer en contact avec Yvan Colonna. Quant au commissaire, les policiers de l'IGPN lui reprochent d'avoir fourni au journaliste l'�tat des recherches judiciaires sur la traque d'Yvan Colonna.
Les recherches concernant Yvan Colonna continuent donc mais dans une confusion sans limite. Parfois une rumeur �merge : il serait pass� par Paris, par Rome. Il vivrait cach� en Corse. Il serait prot�g� par le grand banditisme. Selon nos informations : rien jusqu�� aujourd�hui ne permet d��tayer telle ou telle supposition.

Il est � peu pr�s certain qu�il n�est pas en Corse o� il serait immanquablement rep�r�. Sa protection par le grand banditisme pr�te � sourire lorsqu�on sait que Menconi et Perletto ont �t� donn�s justement par ce milieu-l�. On voit mal ce que le grand banditisme gagnerait � prot�ger ce fuyard politique sinon de gros ennuis. De plus sa seule passerelle avec le grand banditisme serait le secteur bastiais du FLNC avec qui il n�avait quasiment aucun contact. Ce secteur se serait d�ailleurs plut�t signal� par des renseignements fournis � la police plut�t que pour sa r�tention d�informations. Enfin, son exfiltration apr�s sa fuite, se serait faite par l�extr�me sud et non par le nord de l��le. Bref, beaucoup de confusion et une grande �nigme�

Son attitude d�pendra vraisemblablement de celle de ses premiers accusateurs qui depuis se sont r�tract�s. S�ils maintiennent leurs r�tractations, le � coup � sera juridiquement jouable. Alors une condamnation par la cour sp�ciale pourrait appara�tre comme inique quelle que soit la conviction des juges. Si les mis en examen chargent Yvan Colonna, alors il devra se faire � une vie de cavale.

�2003 L'investigateur - tous droits r�serv�s