La Corse � la veille de la paralysie ?
May 16, 2003
Auteur: L'investigateur

� Mieux qu�en 1989 �. Voil� l�impression de ceux qui ont v�cu la journ�e de gr�ve du 13 mai. De m�moire de syndicaliste on n'avait plus vu une telle mobilisation depuis 1995. Pr�s de 8000 manifestants � Bastia, tout autant � Ajaccio, les salari�s du public et du priv� ont massivement suivi le mot d'ordre de gr�ve de l'intersyndicale. A la suite des Assembl�es g�n�rales qui ont eu lieu mercredi matin, le mouvement de gr�ve concernant les retraites a �t� reconduit pour 24h dans de nombreux secteurs d'activit�s : H�pital, mairie, district, pr�fecture, tr�sor public, imp�ts. Dans l'enseignement la gr�ve a �t� prolong�e jusqu'� lundi 15, aussi bien en ce qui concerne les enseignants que le personnel ATOSS.

Cela signifie que le mouvement sur les retraites concentrent toutes les inqui�tudes et les ressentiments. On trouve p�le-m�le une v�ritable crainte relative aux retraites mais aussi la peur de la d�centralistation. De nombreux fonctionnaires corses et non-corses ne veulent pas passer sous la tutelle de la collectivit� territoriale. � Au moins tant qu�ils sont � Paris nos chefs ne peuvent pas grand chose contre nous �. Tel est le discours qu�on entend souvent en off. De fait, la d�centralisation obligerait l�administration � des r�sultats autres que ceux obtenus aujourd�hui. La Corse est aujourd�hui l�une des r�gions les plus � fonctionnaires � de France avec l�outre-mer. S�achemine-t-on vers un blocage de l��le ? En tous cas jeudi matin l�ambiance ressemblait �trangement � celle qui r�gnait en 1989 avant qu�une gr�ve g�n�rale de la Fonction publique ne paralyse l��le enti�re. � l��poque il s�agissait d�obtenir une prime d�insularit�. Or d�j� les chefs politiques avaient pris le parti des gr�vistes trouvant ainsi un moyen de signifier au gouvernement leur m�contentement. � l��poque, celui-ci pr�parait un autre projet sous la direction de Pierre Joxe. La gr�ve pourrait d�s aujourd�hui appara�tre comme un sac � malices dans lequel chacun fourrerait ses m�contentements.

Dans les rangs nationalistes on affiche une grande s�r�nit�. On rappelle que deux ans apr�s 1989, les organisations nationalistes obtenaient un score historique : 25% des voix lors du scrutin territorial.
Les propos tenus ici ou l� par les militants de cette famille politique sont peu am�nes pour les fonctionnaires. � Ce sont les Fran�ais qui m�nent la danse � ce qui est d�ailleurs faux mais qui indique que les nationalistes risquent tout comme en 1989 de se trouver en dehors du mouvement social.

Le patronat insulaire montre, quant � lui, une v�ritable inqui�tude. La saison touristique �tait bien partie mais pourrait �tre totalement remise en cause par un mouvement social. De plus la crise mondiale p�se sur l��conomie insulaire qui affiche des b�n�fices en baisse de 3% sur l�ann�e pr�c�dente.

Enfin, le ministre de l�int�rieur a beau s�en d�fendre : la proximit� du proc�s des assassins du pr�fet Erignac avec la date du r�f�rendum pourrait s�av�rer plus handicapante que pr�vue. La diff�rence entre le oui et le non sera minime. C�est au moins le sentiment de tous. La droite corsiste jouera le jeu. Mais elle sera la seule.

Du c�t� de la gauche, les communistes affichent une franche hostilit� et les socialistes se prononceront vraisemblablement pour un oui sans enthousiasme �quivalent � un appel � l�abstention. Si les assassins du pr�fet font une d�fense tr�s politique et tr�s offensive, beaucoup de nationalistes s�abstiendront pour montrer leur solidarit�. Auquel cas, le oui sera battu.

Un dirigeant nationaliste a d�ailleurs signfi� au gouvernement qu�eux avaient fait leur travail mais qu�ils n�iraient pas plus loin. Pour l�instant les nationalistes sont passionn�s par leurs cartes d�identit�. Un collectif de mouvements nationalistes corses a symboliquement distribu� mercredi 14 � Corte les premi�res "cartes d'identit� corses". D'un format d'une carte bancaire, elles ont �t� donn�es � une dizaine de militants apr�s avoir �t� fabriqu�es et imprim�es par ordinateur dans le lieu symbolique du "Palazzu Naziunale", si�ge du parlement lors de la br�ve ind�pendance de la Corse au XVIII�me si�cle. De couleur verte et bleue, les cartes sont frapp�es des armoiries de Pascal Paoli et portent un code-barre permettant le vote par Internet.

"C'est un jour symbolique et tr�s important pour la nation corse", a d�clar� Fran�ois Sargentini, l'un des responsables d' Indipendenza.

"Ces cartes d'identit� scellent le contrat qui d�finit notre appartenance au corps de la nation et qui nous permettra d'�laborer l'instrument majeur de notre autod�termination avec l'objectif d'�lire une assembl�e nationale corse" a-t-il ajout�.
La Corse n�a jamais �t� aussi divis�e. � En mai fait ce qui te pla�t � dit le proverbe. La Corse l�applique avec application.

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