Pour m�moire�
May 14, 2003
Auteur: L'investigateur

Le texte d�A Tramula feint de croire que l�assassinat du pr�fet Erignac pourrait �tre le sympt�me du mal corse et qu�il devrait �tre analys� comme tel. Pour m�moire nous publions ci-dessous la r�action de Fran�ois Santoni qui se trouvait alors en prison mais, si on en croit le Ribombu, restait le ma�tre incontest� de la Cuncolta naziunalista et du FLNC Canal historique. Cette opinion tr�s tranch�e rejoignait celle de Charles Pieri autre secr�taire g�n�ral d�A Cuncolta qui parlait de � d�rive brigadiste �. Marie-H�l�ne Mattei, fine mouche, d�clare : � Cet assassinat ne nous ressemble pas. Il n�est pas culturel. � Comme si tirer une balle dans la nuque d�un individu avait dans certains cas un caract�re � culturel � et dans d�autres non. Reste que la lamentable tentative d�A Tramula, aujourd�hui en voie d��tre vers�e aux oubliettes, ressemble �trangement � ce qu��crivait le groupe sans nom, dans l�un de ses communiqu�s : � Sans notre action, jamais l��tat n�aurait �t� d�stabilis� au point de devoir se mettre � nu et donner raison point par point � trente ans de lutte nationaliste. � C�est exactement ce que dit l�appel et malheureusement ce que sugg�re Jean-Fran�ois Bernardini dans sa lettre � Madame Erignac. Voici donc l�analyse de feu Fran�ois Santoni, � l��poque en pleine gloire.

� Analyse de l'assassinat d'un pr�fet

Les signes d'une manipulation

La situation cr��e par assassinat du Pr�fet Erignac est r�v�latrice d'une manipulation de l'opinion insulaire et fran�aise.

En effet, les auteurs de cet assassinat ne pouvaient ignorer les donn�es essentielles de cet acte, � savoir qu'il devait toucher un homme qui n'�tait pas un homme politique, mais qui faisait partie d'un corps.

Le corps pr�fectoral est l'ossature de la r�publique fran�aise, sur l'ensemble du territoire, et quelle que soit la sensibilit� ou les opinions de ceux qui le composent, il est en quelque sorte un contre-pouvoir au pouvoir politique d�tenu par les ministres de tutelle, qui eux, sont issus des appareils politiques qui se succ�dent � la t�te de l'�tat.

Le corps pr�fectoral incarne la permanence de l'�tat.

L'assassinat d'un pr�fet n'a donc pour r�sultat, largement pr�visible, que la radicalisation de la r�publique, sa crispation sur des principes typiquement fran�ais, et souvent obsol�tes au regard de l'imp�rative adaptation des structures administratives de la France aux r�gles europ�ennes.

La R�publique donc, s'est sentie agress�e, menac�e dans ses fondements essentiels, et c'est elle qui s'est empar�e du �dossier corse� et qui se refuse d�sormais � tout r�glement politique.

C'est la r�publique qui a de fait, pris le pas sur la capacit� d�cisionnelle des gouvernants, quelles que soient leurs orientations politiques.

Cet acte r�v�le une manipulation qui ressemble �trangement � ce qui avait �t� tent� � l'occasion de la mise en place du statut Joxe.

Ce statut, vot� en 1991, n'�tait pas en soi compl�tement n�gatif, puisqu'il comportait, pour la premi�re fois, une approche politique du probl�me corse.

Mais il a �t� rapidement d�voy� de son objectif, puisque r�duit � un simple marchandage avec quelques dirigeants nationalistes pr�tendument repr�sentatifs et l'actuel pr�sident de l'Assembl�e Territoriale, Jos� Rossi qui bien qu'appartenant � l'U.DF., sera le rapporteur de la Loi Joxe � l'Assembl�e Nationale, et son plus ardent d�fenseur.

Ce qui aurait du �tre le fruit d'une large n�gociation devenait, au terme de tractations occultes, un simple outil politicien, destin�, en r�duisant le corps �lectoral corse, � balayer les vieux caciques du clan � donner �. la Corse une nouvelle �quipe dirigeante, rajeunie, ayant en apparence un discours novateur, pompeusement qualifi� de �progressiste�.

?our atteindre cet objectif, il �tait imp�ratif que les nationalistes abandonnent leurs revendications essentielles, en �change de quelques miettes du pouvoir r�gional, au b�n�fice exclusif des �n�gociateurs�.

Ce volet des tractations avec le cabinet Joxe a �t� l'�l�ment le plus d�terminant ayant provoqu� la scission intervenue au sein du Mouvement National peu avant le vote de la Loi Joxe, et il a consacr� l'erreur du ministre de l'int�rieur qui avait cru que quelques personnes suffisaient � garantir l'adh�sion de tout un mouvement, tenu � l'�cart de toutes les discussions.

Pourtant il n'�tait pas difficile d'envisager l'�chec d'une telle d�marche, dans un pays rompu � toutes les intrigues politiques, et dont les citoyens ne se d�terminent pas uniquement en fonction des consignes pr�n�es par les leaders politiques. Le R.P.R. en a fait la cruelle exp�rience lors des derni�res territoriales.

Le triomphe de Corsica Nazione en 1992, et le retrait forc� de Jos� Rossi dont le score ne lui permettait plus de briguer un quelconque poste � responsabilit� au sein de la nouvelle assembl�e, mit un terme provisoire � la strat�gie savamment �labor�e dans les couloirs du Minist�re de l'Int�rieur.

Aujourd'hui, on assiste � une r�surgence de cette m�me volont� de r�duire � la fois la lasse politique d�tenant le pouvoir en corse, et le Mouvement National.
L'assassinat du Pr�fet Erignac a permis, par la mise en �uvre de moyens policiers et administratifs exorbitants, la mise au ban d'un nombre grandissant d'hommes politiques qui, s'ils ne sont pas exempts de reproches, deviennent les boucs �missaires d'une situation dont ils ne sauraient �tre tenus pour seuls responsables.

Et l'on assiste � la r�surrection d'un discours �tonnamment moraliste des ren�gats du nationalisme, � des rapprochements curieux entre nationalistes dits 'd�mocratiques� et progressistes de tous bords, dans une n�buleuse qui tentera, � plus ou moins long terme de se poser comme la seule alternative au chaos et aux drames. A ce moment l� le Peuple corse comprendra et sera en mesure de r�pondre � la question qui depuis le 6 F�vrier 1998 est dans tous les esprits �A qui profite le crime ?�

Ceux qui ont assassin� le pr�fet Erignac ont parfaitement int�gr� les cons�quences qu'emporterait cet acte, et notamment la r�action de la R�publique fran�aise, et de son �tat centralisateur, sur fond de m�connaissance quasi-totale des m�canismes de la soci�t� corse.

Ils ont peut-�tre oubli� que toutes les strat�gies obscures, fond�es sur le machiav�lisme politique ont �chou� en Corse et que nous sommes l� pour veiller attentivement � ce que notre combat et les sacrifices de nos militants ne soient pas d�tourn�s aux seules fins de satisfaire les app�tits d'une nouvelle classe politique press�e de remplacer dans les fauteuils confortables de l'Assembl�e leurs actuels occupants, et ce, au d�triment d'un v�ritable r�glement politique de la question corse.

Fran�ois Santoni (U Ribombu N� 384)

�2003 L'investigateur - tous droits r�serv�s