Quel dr�le de pays o� un Premier ministre peut s�affaler sur sa chaise, prendre son air le plus d�sabus� et dire aux journalistes r�unis sagement devant lui qu�il n�avait effectivement, depuis quelques semaines, plus envie de leur parler. Sans que ces scribouillards pervertis par leurs groupes de presse align�s, ne bronchent. Au contraire : ils ont eu un rire complice, le rire des courtisans�
Et voil� cern� par une seule image tout le probl�me de Jean-Claude Juncker. Cet homme n�est pas un mauvais homme et il est intelligent. Mais quand il rote, ce sont les autres qui s�excusent. Quand il p�te, ce sont les d�vou�s membres de sa Cour qui se d�signent entre eux pour d�tourner du v�ritable auteur de la mauvaise odeur. Quand parfois, il dit une b�tise, tout le monde la trouve g�niale et applaudit. Quand il agresse, dans un �lan de mauvaise humeur, un autre ministre, un d�put�, un journaliste, on s��crase devant lui, on lui donne raison en plus, on s�excuse et on se couche.
Comment voulez-vous que cet homme, qui n��tait nullement imbu de lui m�me � ses d�buts en politique, ne perde pas un jour les rep�res ? Il est reconnu que chaque �tre humain, face � un souffre douleur qui n�a pas de r�action d�fensive, a tendance � augmenter la cadence de ses exc�s. Juncker n�est entour� que de courtisans, de beaux parleurs, parfois de l�ches et en tout cas d�opportunistes qui tous, lui font le baise-main et l�ont install� sur un tr�ne, un nuage, qui en a fait l�homme qu�il est aujourd�hui, toujours agac� par la pr�sence des autres, toujours hautain, toujours moralisateur sur un air fatigu�, las des questions qu�on lui pose et des pr�occupations de ce petit pays alors qu�il est pr�t � s�envoler vers d�autres cieux, europ�ens, voire mondiaux. Vers un destin international�
Et justement, c�est sur cette sc�ne europ�enne et mondiale que Juncker re�oit la fausse confirmation de son infaillibilit� d�j� constat�e et ent�rin�e par ses diff�rentes cours luxembourgeoises. D�cor�, distingu�, lou�, il en oublie son devoir de recul et gobe finalement tous ces compliments, ayant effectivement perdu, sur ce chapitre, le sens des r�alit�s.
Il ne descendra plus de sa tour d�ivoire. Pendant de longues ann�es, il a �t� un excellent pr�sident du gouvernement luxembourgeois. Mais depuis quelque deux ans, sa suffisance est devenue aga�ante, ses certitudes parfois tr�s primitives sont devenues dangereuses et ses erreurs sont devenues manifestes.
Mais le probl�me de Juncker (et du pays), c�est qu�il est et reste le meilleur ! Ni les socialistes, ni les lib�raux, n�ont mieux � pr�senter et � fortiori pas son propre parti de courtisans. Il est �vident qu�avec encore quelque 200 000 Luxembourgeois dont la grande majorit� ne s�int�resse gu�re � la politique, il est difficile de sortir tous les cinq ou dix ans un grand homme politique du chapeau. La p�riode Jacques Santer l�a d�montr� � suffisance ! La p�riode Juncker risque de se terminer bient�t. Et alors ? Pardi qu�on en arrivera � regretter le bon vieux Jean-Claude !
Jean NICOLAS
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