Editorial: D�mocratie et moutons

La d�mocratie parlementaire a de ces secrets pourtant de plus en plus apparents que l�observateur occasionnel semble vouloir ignorer. S�il est vrai que les paroles de Winston Churchill, faisant de la d�mocratie le moins mauvais de tous les syst�mes de gestion politique, ont toujours toute leur valeur, on est n�anmoins oblig� de constater qu�au fil des ann�es et des d�cennies, le syst�me s�est accommod� de la disparition constante de ses valeurs essentiellement d�mocratiques pour attribuer finalement au syst�me parlementaire et au pouvoir l�gislatif donc un r�le d�ex�cutant automatique, diminu� et de plus en plus tristounet. Les majorit�s parlementaires sont l� pour soutenir la politique de leur gouvernement et la discipline de vote au Parlement ne permet finalement plus aux d�put�s d�exprimer honn�tement leur opinion, mais ne leur laisse plus que le choix de s�embrigader simplement derri�re les directives du parti et donc du gouvernement et d�ent�riner ce que l�ex�cutif leur soumet. Qu�il est loin le temps des pieuses pens�es et du contr�le de l�ex�cutif par le l�gislatif !

Et c�est ainsi qu�on en arrive � l�instauration de commissions parlementaires (lire en page 5) d�enqu�te, sp�ciales ou de contr�le budg�taire, qui ne sont plus � m�me d�assumer leurs d�couvertes. Ces commissions font leur travail, du bon travail parfois, mais au moment de r�diger leu rapport final, elles se font rappeler ou se rappellent elles m�me � l�ordre et couvrent finalement tout ce qu�elles viennent de d�couvrir et qu�elles devraient donc d�noncer. C�est la d�mocratie d�form�e, c�est la perversit� des rouages d�mocratiques d�tourn�s de leur objectif qui se font jour.

Les cas �voqu�s ici et en page 5 sont arriv�s en tr�s peu de temps trois fois sur trois au Luxembourg. Autant dans les affaires de d�tournements de fonds de leur objectif au minist�re de la Sant� publique que d�attribution frauduleuse de licences de transports internationales au minist�re des Transports que de magouilles, de n�potismes et d�autres d�rapages au minist�re des Travaux Publics, les d�put�s concern�s ont � chaque fois jou� la discipline de leur parti politique respectif, provoquant m�me la situation cocasse de voir certain parti de l�opposition, compromis dans le scandale du minist�re de la sant� ou du plateau du Kirchberg, hurler avec les loups majoritaires pour nous dire qu�il n�y a pas objet �� crier au scandale.

Il est triste de voir ainsi la d�mocratie r�duite � sa plus simple expression, c�est � dire la consultation �lectorale tous les cinq ans pour envoyer des moutons au Parlement qui d�cid�ment n�ont pas ou n�ont plus droit � une opinion personnelle d�viant de celle de leur parti, si petite soit-elle. Nous nous moquons parfois des Parlements de certains pays moins d�mocratiques qui constituent de v�ritables salles d�applaudissement pour faire la claque au gouvernement� Nous n�en sommes plus tr�s loin.

Jean Nicolas


�2003 L'investigateur - tous droits r�serv�s