Editorial: L�Europe stupide
Toulouse actuellement en France, l�affaire des disparus de l�Yonne depuis de longues ann�es d�j�, les affaires Dutroux et di Rupo depuis tr�s longtemps �galement d�j� en Belgique, r�seaux de p�dophilie, voire de cannibalisme d�couverts r�cemment en Allemagne dans plusieurs � L�nder �, cris et chuchotements au Luxembourg, notamment en mati�re du quartier europ�en. Avec toujours un point commun : l�implication de notables et d�hommes politiques. Des noms font la ronde : Jacques Lang, Jean-Pierre Soisson, Oskar Lafontaine, Elio Di Rupo, Jo� Thielen et d�autres dans des affaires sexuelles, Chirac, Pasqua, Mitterrand, Reynders, Santer et d�autres dans des affaires financi�res�

Notre soci�t� serait-elle devenue beaucoup plus d�prav�e au fil des derni�res d�cennies ? Ou est-ce plut�t la m�diatisation � outrance de ce genre d�affaires et le courage de quelques m�dias et journalistes qui permettent de lever le couvercle d�une marmite bouillonnante et aux odeurs naus�abondes qui s�en d�gagent? Les deux arguments entrent en ligne de compte. Car les m�dias, les nouveaux avant tout, les moyens de communication, les plus modernes en t�te, ont non seulement permis d�avoir une libert� d�expression et donc de d�nonciation presque illimit�e, mais ont �galement facilit� �norm�ment la constitution de r�seaux de pervers et de criminels en col blanc.

En d�autres termes : plus on d�nonce d�un c�t�, plus les affaires suspectes se d�veloppent. Avec toujours une longueur d�avance pour les ignobles vis � vis de ceux qui les traquent, qu�ils soient journalistes ou policiers et juges.

Une nouvelle r�jouissante : tous les fraudeurs et tous les pervers n�en sortent plus indemnes, le voile du silence est parfois perfor� et permet partout, Belgique except�e, d�en confronter certains avec leurs actes r�pr�hensibles et ignobles. Mais pas tous, loin de l� !

Prenons l�affaire dite de la Commission europ�enne. Un coup d��clat journalistique, �largi par une r�elle volont� des institutions europ�ennes comme l�OLAF ou le Parlement europ�en en 1999, a permis de chasser toute une Commission ind�licate sur base de fraudes et de d�tournements. Bien. Sauf que les fraudes en Europe, quelque trois ans plus tard, sont encore plus �lev�es qu�en 1998-1999. Prenons les faux pas manifestes du clan Chirac. Peu de responsables sont pass�s � la trappe et ceux qui y sont pass�s, sont revenus, ont tr�s peu pay� et de Cannes � Paris, en passant par Levallois, refont leur entr�e en politique. Comme si l��lecteur n�avait d�cid�ment rien compris et qu�il m�ritait finalement ceux qu�il a choisi de laisser ou de remettre en selle ! Prenons l�affaire du Kirchberg au Luxembourg : pour un pr�sident de Cour des Comptes d�chu, d�autres gros pontes politiques et fonctionnaires de premier rang sont toujours en place, malgr� les �normes soup�ons qui p�sent contre eux. Et pour un M�llemann qui se suicide, un Lafontaine amorce son retour !

Ces quelques exemples tir�s d�une liste de dizaines et de dizaines d�autres cas, prouvent que quand on a r�ussi � r�unir tout ce qu�il faut pour enfin faire �clater un scandale (n�oublions pas que le juge et le journaliste ont besoin de trouver toutes les preuves, ce qui prend du temps, avant de pouvoir agir), dix, vingt autres ont germ�, �clos et r�ussi sans que la presse souvent sous tutelle (tout comme parfois la justice d�ailleurs) n�ait pu esquisser le moindre geste.

Un combat qui serait donc vain ? Non, car il vaut toujours mieux accrocher quelques scalps isol�s � sa plume ou sa robe de magistrat plut�t que de laisser faire impun�ment, ce qui inciterait � encore plus de d�bauche. Un combat qui ne pourra jamais �tre gagn� ? Oui, certainement. On dit toujours qu�on ne peut rien faire contre l�eau, le feu, quand ces �l�ments de la nature d�rapent. La situation de la justice et des m�dias qui font encore leur m�tier, est un peu celle des pompiers qui luttent, sans jamais r�ussir � les vaincre, contre ces �l�ments.

D�primant ! Et pour vous d�primer encore un peu plus, je vous conseille de lire l�excellent livre de persiflage de Mickael Moore, � stupide white men �. Moore parle des Etats-Unis, mais son ouvrage s�adapterait �galement parfaitement � notre de moins en moins bonne vieille Europe.

Jean Nicolas


�2003 L'investigateur - tous droits r�serv�s