Les preuves du montage judiciaire de l'affaire des paillotes corses
Alors que la guerre d'Irak s'achemine vers une victoire totale et irr�cusable des forces alli�es anglo-saxonnes, le reste du monde continue d'exister. L'investigateur a longuement parcouru la question corse donnant de l'importance � ce qui lui semble �tre indispensable pour qu'un jour cette �le trouve la paix : l'instauration d'un �tat de droit incontestable.
Or jusqu'� maintenant deux facteurs l'ont emp�ch� : le premier a �t� l'attitude de l'�tat fran�ais et de ses serviteurs. Bien souvent, au service d'une improbable efficacit� politique, juges, policiers et membres du gouvernement ont tordu le coup � une l�galit� qu'ils pr�tendaient d�fendre. Le deuxi�me facteur est l'attitude elle-m�me des Corses, qui habitu�e � ce qui vient d'�tre d�crit, ont cherch� � toujours �tre du c�t� du plus fort � d�faut de trouver un c�t� juste. Les nationalistes n'ont fait qu'aligner leur attitude sur ce sentiment plus g�n�ral.
Or, il nous a paru � nous qui ne sommes que de modestes observateurs qu'un homme a cherch� � imposer une image juste de ce que devrait l'�tat. Nous l'avons ici d�fendu tout en soulignant son caract�re parfois tortueux. Mais nous l'avons d�fendu car il a �t� l'honneur de la France quand ses repr�sentants pactisaient avec des hommes qui utilisaient des m�thodes d'assassins. Nous attirons l'attention des lecteurs sur le fait que nous ne portons pas de jugement sur des id�es mais sur des m�thodes. Dans quelques soci�t�s que ce soit il sera toujours pr�judiciales d'�riger la violence, la cagoule et les discussions occultes en m�thodes de gouvernement. Nous avons la faiblesse d'y pr�f�rer le dialogue, la d�mocratie et la repr�sentation �lective.
Or le pr�fet Bonnet s'est trouv� l�ch� en rase campagne par un gouvernement incapable de gouverner et surtout incapable de tenir une direction politique. Parce qu'il a �t� abandonn� le pr�fet Bonnet a pay� pour l'incurie du gouvernement. On nous r�pondra qu'un pr�fet est un fusible et qu'il le savait. Nous refusons un tel cynisme. Le pr�fet Bonnet n'aurait jamais d� se trouver dans la situation o� il est aujourd'hui. Les protagonistes du drame des paillotes ont d'ailleurs tous �t� soutenus par leur hi�rarchie. Nous n'en voulons pour preuve que la r�cente promotion du colonel Maz�res nomm� chef d'�tat-major de la l�gion de gendarmerie d'Ile-de-France et celle des autres gendarmes.
Un jour peut-�tre, les journalistes, ces �tres papillonnants, se poseront la question de savoir si leur traitement de l'affaire des paillotes a �t� juste ou injuste. Apr�s avoir port� le pr�fet Bonnet au pinacle, ils l'ont tout simplement oubli�. Il est vrai que Bernard Bonnet a multipli� les erreurs psychologiques et l'une d'entre elles a �t� le choix de Jacques Verg�s comme avocat. L� o� il fallait un bon p�naliste, le pr�fet a �t� mal d�fendu par un histrion � la recherche de la rupture m�diatique. Mais cela n'excuse rien sur le fond.
Les preuves du montage judiciaire de l'affaire des paillotes corses incendi�es existent et elles sont incontestables
1-l'infraction doit exister
L'article 111-3 du Code p�nal dispose que: " Nul ne peut �tre puni pour un crime ou un d�lit dont les �l�ments constitutifs ne sont pas d�finis par la loi." Il s'agit des �l�ments mat�riels et intentionnels.
Ce principe est �galement affirm� par l'article 7 de la convention europ�enne des droits de l'homme qui dispose que: "Nul ne peut �tre condamn� pour une action ou une omission qui, au moment o� elle a �t� commise, ne constituait pas une infraction d'apr�s le droit national ou international."
Incendier une paillote ill�galement �difi�e sur une plage publique est-ce une infraction?
Dans leur arr�t du 15 janvier 2003, les juges de la Cour d'appel de Bastia ont r�pondu par l'affirmative. Ils ont affirm� que l'�l�ment mat�riel de l'infraction(le bien d'autrui) existait. � la surprise g�n�rale, les juges de Bastia ont d�sign� l'�tat en qualit� de propri�taire. Ils �crivent dans leur arr�t:" au moment des faits, la paillote Aria Marina et la paillote chez Francis �taient propri�t� de l'�tat, entit� juridique distincte de chacun des pr�venus; en cons�quence l'�l�ment constitutif du d�lit relatif � l'appartenance du bien d'autrui � un tiers est bien remplie".(page 29 de l'arr�t).
2-la preuve mat�rielle existe que les paillotes n'appartenaient pas � l'�tat et que l'arr�t de la Cour d'appel est contraire � la loi.
La confirmation que les paillotes ne sont pas des propri�t�s de l'�tat se trouve dans l'application de l'article R. 52 du code du domaine de l'�tat.
Cet article impose � l'�tat d'�tablir dans chaque d�partement le relev� des immeubles du domaine public et du domaine priv� appartenant � l'�tat.
Le relev� de ces propri�t�s de l'�tat a �t� �tabli pour la Corse du sud par les services fiscaux des domaines. Il ne mentionne pas l'existence des paillotes Chez Francis et Aria Marina ni au moment des faits, ni ult�rieurement.
La preuve mat�rielle existe que ces paillotes n'appartenaient pas � l'�tat.
3-Pourquoi ces paillotes ne pouvaient-elles pas figurer dans l'�tat des propri�t�s de l'�tat sur le domaine public?
En application de la loi.
L'article L 34-3 du code du domaine de l'�tat (art. 1er de la loi du 25 juillet 1994) dispose que: "� l'issue du titre d'occupation, les ouvrages, constructions et installations de caract�re immobilier existant sur la d�pendance domaniale occup�e doivent �tre d�molis, soit par le titulaire de l'autorisation, soit � ses frais, � moins que leur maintien en l'�tat n'ait �t� pr�vu express�ment par le titre d'occupation ou que l'autorit� comp�tente ne renonce en tout ou parti � leur d�molition. Les ouvrages, constructions et installations de caract�re immobilier dont le maintien � l'issue du titre d'occupation a �t� accept� deviennent de plein droit et gratuitement la propri�t� de l'�tat, francs et quittes de tous privil�ges et hypoth�ques."
Contrairement � ce qu'ont soutenu les juges de Bastia, l'�tat ne devient pas propri�taire malgr� lui de constructions �difi�es sur son domaine public par des tiers. Il doit accepter ces constructions. A fortiori lorsqu'elles n'ont b�n�fici� d'aucune autorisation.
Mieux l'�tat a toujours demand� la destruction de ces paillotes dans des termes non �quivoques.
Le 24 novembre 1998, le directeur r�gional de l'�quipement �crivait � Mr F�raud, exploitant sans titre de la paillote Chez Francis (absence d'autorisation en violation de l'article L. 28 du code du domaine de l'�tat): "Je vous confirme la mise en demeure de proc�der � la d�molition de votre construction sur le domaine public maritime(�) et � la remise en l'�tat initial des lieux sous un d�lai maximum d'un mois. A d�faut d'une d�molition par vos soins, une d�molition forc�e sera effectu�e par l'�tat."
Le 15 mars 1999, le secr�taire g�n�ral de la pr�fecture de la Corse du sud �crivait � MM. Morelli et Casalonga, exploitants sans titre de la paillote Aria Marina: "Par proc�s-verbal de contravention dress� au titre de la police de grande voirie le 12 mai 1998, il a �t� relev� � votre encontre que vous aviez proc�d� � des travaux sans autorisation sur le domaine public maritime, sur la commune d'Ajaccio, plage de Barbicaja, �tablissement Aria Marina. J'observe qu'� ce jour vous n'avez pas d�moli la construction r�alis�e de mani�re illicite."
D�s lors, je vous mets en demeure d'y proc�der, et de remettre en l'�tat les lieux. � d�faut, cette mesure sera effectu�e d'office � vos frais ."
Enfin, si par extraordinaire l'�tat avait voulu acqu�rir la propri�t� de ces biens immobiliers construits sur la plage par des tiers non autoris�s , il n'aurait pas pu le faire.
La plage, c'est le domaine public naturel. Le domaine public naturel est inconstructible.
L'article 2 ,titre VII, livre IV de l'ordonnance royale d'ao�t 1681 sur la Marine fait "d�fenses � toutes les personnes de b�tir sur les rivages de la mer, d'y planter aucun pieux, ni faire aucun ouvrage qui puissent porter pr�judice � la navigation, � peine de d�molition des ouvrages, de confiscation des mat�riaux et d'amende arbitraire".
Ces dispositions toujours en vigueur ont pour effet d'interdire toute construction, en vue de la conservation du domaine public naturel, le plus expos�. L'�tat n'aurait pas pu accepter de devenir propri�taire de ces paillotes.
4- Pourquoi une erreur aussi grossi�re?
Les juges de Bastia se sont donc lourdement tromp�s et leur arr�t est d'une exceptionnelle gravit� compte tenu de la lourdeur des peines inflig�es.
La seule question qui se pose est de savoir si les juges de Bastia ont volontairement ou non commis cette faute juridique lourde aux cons�quences aussi graves.
L'hypoth�se la moins grave est celle de l'erreur technique. Les juges ont pu confondre le droit applicable qui est le code du domaine de l'�tat avec les articles 551 et 553 du Code civil qui pr�voient eux que le propri�taire du sol est pr�sum� propri�taire de toutes les constructions m�me celles �rig�es par des tiers.
Tel n'est pas le cas de ces constructions �difi�es sur le domaine public maritime qui sont soumises au code du domaine de l'�tat o� seul le sol appartient � l'�tat, mais pas les constructions �difi�es par des tiers sans autorisation ni acceptation.
L'hypoth�se la plus grave est celle de la faute volontaire des magistrats pour habiller juridiquement � tout prix la condamnation du pr�fet et accessoirement des gendarmes. Le climat tendu et parfois haineux du proc�s ne permet pas d'�carter cette hypoth�se, d'autant moins que les juges de Bastia n'ignoraient pas que les tribunaux de France continentale ont toujours jug� qu'il ne peut pas y avoir sur le domaine public maritime de condamnation pour destruction volontaire de la chose d'autrui, en l'absence de propri�taire l�gal. Le seul propri�taire l�gal pouvant �tre l'�tat s'il accepte la construction et qu'elle n'est pas sur la plage qui est inconstructible. Ce n'�tait pas le cas.
C'est ce qu'avait clairement jug� la Cour d'appel de Bordeaux le 18 janvier 1995.
Quel int�r�t de prendre une d�cision que la Cour de Cassation ne pourra que casser en droit, et en tout cas la Cour europ�enne des droits de l'homme?
Gagner du temps et justifier l'action de la justice corse depuis quatre ans sur ce dossier.
� quelques mois du proc�s Erignac, l'opinion corse n'aurait pas compris une relaxe g�n�rale fond�e sur l'application de la loi.
Une condamnation aussi spectaculaire est cens�e satisfaire les nationalistes corses et permet d'envisager une amnistie ou une cassation mais pas avant de longs mois qui seront mis � profit pour trouver une solution politique..
De toute �vidence, dans cette affaire de paillotes corses, le droit a �t� l'interm�de des r�alit�s politiques.
Ne pas oublier le pr�fet Bonnet nous para�t �tre un devoir citoyen et un combat contre le cynisme de l'�tat.
|
|