L'affaire Elf encercle Jean-Charles Marchiani
Dec 29, 2003
Le parquet de Paris a �largi l'enqu�te sur des op�rations d'Elf sous la pr�sidence de Philippe Jaffr� (1993-1999) � des faits concernant des versements d'argent suspects impliquant notamment le d�put� europ�en et ancien pr�fet du Var, Jean-Charles Marchiani.

Le parquet a d�livr� un r�quisitoire suppl�tif pour "abus de biens sociaux, complicit� et recel" contre "X", ce qu'avait demand� en avril le juge d'instruction Renaud Van Ruymbeke.

La justice suisse a d�couvert une commission de cinq millions de dollars vers�e par Elf en 1997 sur le compte helv�tique d'une fondation bas�e au Liechtenstein. Des �l�ments d'une autre proc�dure montreraient que l'ayant-droit de cette fondation est Jean-Charles Marchiani.

Selon la justice suisse, ce dernier aurait conserv� environ 2,3 millions de dollars et revers� le reste de la somme � un ancien responsable politique du Congo-Brazzaville. Dans Le Monde, Jean-Charles Marchiani affirme pourtant n'avoir "jamais touch� un centime du groupe Elf".

Apr�s une premi�re affaire portant sur la p�riode 1989-1993, qui a abouti � la condamnation de trente personnes le 12 novembre, Renaud Van Ruymbeke conduit une nouvelle information judiciaire pour "abus de biens sociaux" visant des commissions occultes de plusieurs dizaines de millions de dollars vers�es en marge d'un contrat d'Elf au Nigeria en 1995.

Philippe Jaffr�, P-DG d'Elf de 1993 � 1999, a �t� entendu en octobre comme "t�moin assist�". Deux hommes d'affaires d'origine libanaise, Samir Traboulsi et Ely Calil, sont mis en examen pour "recel d'abus de biens sociaux".

Jean-Charles Marchiani est de son c�t� d�j� mis en examen dans plusieurs autres dossiers judiciaires, notamment celui sur des ventes d'armes pr�sum�es ill�gales � l'Angola.


L�article du Monde sur ce sujet

Jean-Charles Marchiani mis en cause dans la nouvelle affaire Elf pour une commission de 5 millions de dollars


Un r�quisitoire suppl�tif a �t� d�livr� au juge Van Ruymbeke, qui enqu�te sur des fonds vers�s au d�put� europ�en par le groupe p�trolier, sous la pr�sidence de Philippe Jaffr�.

Un nouveau front judiciaire menace Jean-Charles Marchiani, d�j� mis en cause dans plusieurs enqu�tes financi�res conduites par le juge parisien Philippe Courroye. Lundi 22 d�cembre, le procureur de Paris, Yves Bot, a d�livr� au juge Renaud Van Ruymbeke, qui enqu�te sur des commissions vers�es � partir de 1995 par Elf-Aquitaine � l'occasion de l'implantation du groupe au Nigeria, un r�quisitoire suppl�tif pour "abus de biens sociaux, complicit� et recel" afin d'�tendre sa saisine � des versements, semble-t-il destin�s � des dirigeants congolais, et qui auraient profit� pour partie � M. Marchiani.

M. Van Ruymbeke avait �t� alert� au printemps par le juge genevois Daniel Devaud de l'existence d'un virement suspect de 5 millions de dollars remontant au 15 septembre 1997, au moment o� M. Marchiani venait de quitter ses fonctions de pr�fet du Var, et alors que le Congo �tait en pleine guerre civile. Ces fonds avaient �t� vers�s par Elf via Rivunion, la filiale helv�tique du g�ant p�trolier vou�e au paiement des commissions, sur un compte ouvert au Cr�dit suisse de Zurich par la Sopar. Le juge Courroye a �tabli dans l'une de ses enqu�tes que M. Marchiani �tait l'ayant-droit �conomique de cette fondation bas�e au Liechtenstein (Le Monde du 21 septembre).

Selon le juge Devaud, Jean-Charles Marchiani aurait conserv� par-devers lui 2,3 millions de dollars, soit pr�s de la moiti� de cette somme. Il aurait transf�r� le solde sur le compte d'un agent d'affaires fran�ais qui, � son tour, aurait aliment� - � hauteur de 2,4 millions de dollars - un compte ouvert au nom du fils de Bernard Kol�las. Ancien maire de Brazzaville, M. Kol�las fut le dernier premier ministre du pr�sident Pascal Lissouba, chass� du pouvoir en octobre 1997 par Denis Sassou Nguesso.

Embarrassantes pour M. Marchiani, qui a gard� une partie des fonds vers�s par Elf, les d�couvertes du juge Devaud ne le sont pas moins pour Philippe Jaffr�, qui avait succ�d� en 1993 � Lo�k Le Floch-Prigent � la t�te de l'entreprise nationale, o� il est rest� en poste jusqu'en 1999. Elles pourraient relancer les interrogations sur l'�ventuelle implication du groupe p�trolier dans la guerre civile congolaise.

"MISSIONS CONFIDENTIELLES"


Sollicit� par Le Monde, mardi 23 d�cembre, M. Marchiani a assur� n'avoir "jamais touch� un centime du groupe Elf". Faisant une nouvelle fois allusion � des "missions confidentielles" qui lui auraient �t� confi�es par l'�tat fran�ais, le d�put� europ�en a ajout� qu'il avait toujours eu "pour interdiction d'utiliser - pour ces missions - des fonds �manant d'entreprises publiques et de soci�t�s fran�aises". "S'il me convoque, je l'expliquerai � M. Van Ruymbeke", a indiqu� M. Marchiani, qui a ajout� : "Encore faudra-t-il que le juge prouve que j'�tais l'ayant-droit de la Sopar".

La justice suisse a �tabli que le compte zurichois de la Sopar, ouvert en 1987, pr�sentait, le 28 novembre 2001, un avoir total de 2 077 806 francs suisses (environ 1,4 million d'euros). Press� par M. Courroye de justifier les rentr�es d'argent d�tect�es sur ce compte, lors d'un interrogatoire le 21 novembre 2002, M. Marchiani avait d�j� excip� de ses activit�s parall�les qui conduisirent � plusieurs reprises cet ancien agent des services secrets � intervenir en faveur d'otages fran�ais. Il avait ainsi assur� qu'il y avait eu beaucoup de mouvements sur ce compte lors de "la p�riode 1986-1988, date � laquelle il avait- �t� volontaire et b�n�vole pour monter � l'ext�rieur des fronti�res un dispositif visant, d'une part, � lutter contre le terrorisme islamiste, d'autre part, � obtenir la lib�ration de nos compatriotes d�tenus au Liban et, enfin, normaliser les relations avec l'Iran".

Parfois surnomm�e "Elf 2", l'enqu�te de M. Van Ruymbeke se nourrit de l'exploitation par le juge Devaud des archives de Rivunion, saisies par le magistrat suisse en septembre 2002. C'est ainsi qu'avait �t� mis au jour le versement par Elf, en 1995, de 10 millions de dollars � l'homme d'affaires libanais Samir Traboulsi et de 60 millions de dollars � l'industriel nig�rian Ely Calil - tous deux mis en examen depuis pour "recel d'abus de biens sociaux".

Interrog� � l'automne 2002 par M. Van Ruymbeke en qualit� de t�moin assist� (Le Monde du 29 octobre 2002), M. Jaffr� avait assum� "l'enti�re responsabilit�"de ces virements, destin�s pour partie � des responsables politiques nig�rians.
(Fabrice Lhomme)

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