Parce que nous avons suivi cette affaire jour apr�s jour, nous ne pouvions pas passer sous silence le volumineux et passionnant dossier que le quotidien Le Monde propose � ses lecteurs et nous aux n�tres. Le Monde avait �t� mis en accusation pour son traitement de ce dossier. Ces attaques ont �t� reprises par Daniel Schneidermann et lui ont valu sa place. Volont� de faire oublier ces � papiers � jug�s � peu glorieux � par le journal lui-m�me ? Toujours est-il que le quotidien du soir donne la parole � tous ceux qui avaient �t� accus�s par les anciennes prostitu�es d�avoir �t� leurs bourreaux.
Affaire Al�gre : le temps des r�glements de comptes
Apr�s six mois d'instruction, "aucun �l�ment mat�riel" n'a pu �tayer les accusations des anciennes prostitu�es sur l'existence d'un r�seau criminel � Toulouse. Les personnalit�s mises en cause, qu'elles croient ou non � l'existence d'un complot visant M. Baudis, entendent aller jusqu'au bout.
Six mois d'une instruction judiciaire parsem�e d'emb�ches, de chausse-trapes, de vrais-faux aveux, de revirements, de r�glements de comptes et, au final, il reste la vraie question : y a-t-il eu manipulation, distorsion volontaire des faits, dans le cadre des dossiers de l'affaire Al�gre ? Et si oui, pourquoi ?
Le 15 avril, le juge Thierry Perriquet �tait saisi d'une information judiciaire ouverte contre " Patrice Al�gre et tous autres", pour des faits de " viols et prox�n�tisme aggrav�".
Les t�moins �taient au nombre de deux : "Patricia" et "Fanny", deux ex-prostitu�es toulousaines. Elles ont affirm� sur proc�s-verbal que des personnalit�s faisaient partie, � Toulouse, au tout d�but des ann�es 1990, d'un vaste r�seau organisant des soir�es sadomasochistes, comportant des viols. Dominique Baudis, l'ancien maire de Toulouse, est ainsi accus� d'avoir viol� "Patricia", un soir de novembre 1990. Marc Bourragu�, ex-substitut toulousain, aurait, selon "Fanny", abus� sexuellement de cette derni�re � de multiples reprises, y compris au palais de justice.
Au bout du compte, que reste-t-il ? M. Baudis a pu apporter des �l�ments qui l'ont mis hors de cause. Seul M. Bourragu� doit encore faire face aux accusations impr�cises, souvent fausses, de "Fanny". Le juge Thierry Perriquet a multipli� les auditions, les gendarmes ont enqu�t� dans toutes les directions, examinant les comptes bancaires, interrogeant les proches, les amants de passage, les clients, les prox�n�tes, ils n'ont trouv� aucun �l�ment probant accr�ditant les affirmations, sur ces points pr�cis, des ex-prostitu�es. " Aucun �l�ment mat�riel, en l'�tat, n'a r�sist� � un examen approfondi, estime Michel Br�ard, procureur de la R�publique de Toulouse. Tout le probl�me est l�."
N�ANT PROC�DURAL
Face � ce n�ant proc�dural, les personnalit�s mises en cause veulent d�sormais savoir ce qui leur a valu ce tourbillon judiciaire. Elles assurent qu'elles iront jusqu'au bout. "J'ai �t� victime d'une machination, a d�clar� au Monde Dominique Baudis. Il y a des gens qui devront assumer la cons�quence de leurs actes devant la justice. Cette affaire n'est pas termin�e, elle ne le sera que lorsque ces gens auront �t� retrouv�s et punis." Si "Fanny" n'est pas mise en cause par le parquet pour ses d�clarations mensong�res - elle avait accus� de viol M. Baudis, le 29 juillet, avant de se r�tracter, le 17 septembre -, il portera plainte avec constitution de partie civile. M. Bourragu�, lui, voit deux domaines possibles d'investigations : "Deux int�r�ts ont pu �tre servis : une vengeance, ou alors un int�r�t politique vis-�-vis de M. Baudis." L'ex-substitut toulousain ne croit pas � l'existence d'un quelconque r�seau. "Je ne vois pas un r�seau organis� et concert� � Toulouse, o� se seraient concentr�s des magistrats et des policiers partouzeurs." Son conseil, Me Laurent de Caunes, r�sume son sentiment, � propos de ce dossier, en une formule : " l'inexistence du fait et l'artifice du droit." Il devait �crire au juge Perriquet pour lui demander d'�tendre le champ de l'information au faux t�moignage de "Fanny".
Cette initiative rejoint le sentiment profond du magistrat. Nomm� en 2001 � Toulouse, le juge Thierry Perriquet aimerait boucler son dossier avant la fin de l'ann�e. Il tente d�sormais de placer les ex-prostitu�es face � leurs contradictions. Si l'on tient pour acquis qu'elles ont menti, ont-elles agi avec concertation ? "Je ne la comprends plus, elle change d'avis comme de chemise ; (...) elle est compl�tement manipul�e", a expliqu� ainsi "Patricia" au juge Perriquet, le 9 octobre, au sujet de "Fanny". Cette derni�re s'en �tait s�rieusement prise � "Patricia", lors d'une confrontation organis�e le 17 septembre par le juge Perriquet : " Elle m'a pouss�e � raconter des trucs sur M. Baudis, mais je ne sais pas pourquoi. Je n'ai connu cette derni�re qu'aux mois de mars-avril derniers, lorsque Michel Roussel m'a mise en contact avec elle." D�claration contredite par "Patricia", le 9 octobre : " Je maintiens pour ma part l'avoir connue en 1990-1992, sur le trottoir."
Difficile, pour le magistrat, de d�m�ler le vrai du faux. La question est centrale, dans le cadre d'une �ventuelle manipulation. Se greffe en outre sur cette affaire, d�j� emp�tr�e dans les vengeances politiques et personnelles, un contexte judiciaire tr�s d�licat. Les divergences de vues sont nombreuses entre le juge Serge Lemoine, charg� d'enqu�ter sur les meurtres imput�s � Patrice Al�gre, et son coll�gue Thierry Perriquet. Michel Roussel, l'adjudant de gendarmerie qui a retrouv� les ex-prostitu�es, partageait une ancienne complicit� avec le juge Lemoine. Ses m�thodes ont pourtant �t� mises en cause par M. Perriquet, qui l'a entendu le 9 octobre. "Je ne pense pas que l'on puisse mettre en cause les enqu�teurs, tout cela se d�roule dans des conditions extr�mement difficiles, mais transparentes", rel�ve le procureur, M. Br�ard. M. Perriquet se retrouve esseul�, malgr� le renfort d'un deuxi�me magistrat dans le volet "prox�n�tisme", Nicole Bergougnan.
Le 14 mai, l'adjudant Michel Majest� �tait charg� de r�diger un proc�s-verbal d'analyse et de constatations. Examinant pr�cis�ment 14 auditions de "Patricia" et 12 interrogatoires de "Fanny", il concluait : "Il convient d'apporter d�s � pr�sent toute la r�serve et la prudence n�cessaires avant la prise en compte de leurs r�v�lations pass�es ou futures. (...) Le d�veloppement actuel et l'acc�l�ration r�cente des r�v�lations apport�es par ces personnes semblent guid�s par une fuite en avant incontr�l�e." Destinataire de ce proc�s-verbal pr�monitoire, Mme Bergougnan a pourtant mis en cause, selon un proc�s-verbal de synth�se partielle du 5 juillet, "l'objectivit� de son r�dacteur". Dans ce climat, sans que rien n'apparaisse encore de la v�rit� profonde du dossier, alors que des policiers sont toujours mis en cause, que des crimes ont �t� qualifi�s de suicides, que M. Roussel a pris sa retraite anticip�e, l'ex-procureur g�n�ral de Toulouse, Jean Volff, �cart� de son poste parce que son nom �tait cit� dans le dossier, donne son sentiment : "L'institution est touch�e par ce type de man�uvre. Qu'il y ait manipulation ou pas, la fragilit� de la justice a �t� prouv�e."
G�rard Davet
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Les principaux personnages de l'affaire
Patrice Al�gre. Il a �t� condamn� le 21 f�vrier 2002 � la r�clusion criminelle � perp�tuit� pour cinq meurtres et six viols.
"Fanny". Ex-prostitu�e toulousaine, elle a �voqu� des viols au palais de justice, et mis en cause Dominique Baudis, des magistrats et des policiers. Elle s'est plusieurs fois r�tract�e.
"Patricia". Ex-prostitu�e toulousaine, elle accuse Dominique Baudis de viol, et d�nonce la corruption suppos�e de policiers toulousains.
Michel Roussel. Adjudant de gendarmerie, il a retrouv� les anciennes prostitu�es, qui se sont confi�es � lui. Il est � la retraite depuis le 13 octobre.
Michel Br�ard. Procureur de la R�publique de Toulouse. Il a ouvert le 15 avril l'information judiciaire pour "viols et prox�n�tisme aggrav�".
Serge Lemoine, Nicole Bergougnan et Thierry Perriquet. Juges d'instruction, charg�s des dossiers Al�gre.
Marc Bourragu�. Ex-substitut du procureur de Toulouse, aujourd'hui vice-procureur de Montauban. Il est accus� de viol par "Fanny".
Jean Volff. Ex-procureur g�n�ral de Toulouse, d�sormais avocat g�n�ral � la Cour de cassation. Il a �t� accus� de viol par "Fanny", avant qu'elle ne se r�tracte, le 29 juillet.
Dominique Baudis. Ancien maire et d�put� (UDF) de Toulouse, actuel pr�sident du Conseil sup�rieur de l'audiovisuel. Accus� de viol par "Patricia", il a produit des �l�ments mat�riels le disculpant. Le 17 septembre, "Fanny" l'a innocent�.
Philippe Douste-Blazy. Maire et d�put� (UMP) de Toulouse, cit� dans le dossier par "Patricia".
Jean-Michel Baylet. Ancien d�put� (PRG) et directeur de publication de La D�p�che du Midi, le journal qui, le 1er avril, a r�v�l� la nouvelle affaire Al�gre.
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Le "sentiment d'abandon" de Patrice Al�gre
Patrice Al�gre a adress� un courrier, le 23 septembre, au procureur g�n�ral de Toulouse, Michel Barrau, et � la juge d'instruction, Nicole Bergougnan, cod�sign�e dans le volet "viols et prox�n�tisme aggrav�". Il demandait � �tre entendu par un magistrat : "Dois-je consid�rer que je n'existe pas ? (...)Les juges d'instruction, dans un m�pris � mon �gard, qui me fait croire qu'un homme condamn� est un homme mort, ne cherchent m�me pas � m'entendre ! De quoi avez-vous peur ? Est-ce que je risquerai de changer vos plans ? Y a-t-il deux justices, une pour les notables, une autre pour les morts vivants ? Ce que j'ai fait, je le paye ! Comment des juges peuvent-ils accepter de se pr�ter � l'exclusion judiciaire ? Je n'esp�re plus que vous aurez le cran de me donner acc�s � mon dossier ! Je vous prie de croire � mon sentiment d'abandon." Le 6 octobre, Patrice Al�gre �tait entendu par la juge Nicole Bergougnan, en qualit� de t�moin assist�. Une audition dans laquelle il niait conna�tre les ex-prostitu�es "Fanny" et "Patricia" et les policiers mis en cause dans le dossier.
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Entretien avec Marc Bourragu�, ancien substitut du procureur de Toulouse
Aujourd'hui vice-procureur de Montauban, vous mettez en cause vos coll�gues de Toulouse...
Je mets en cause les autorit�s toulousaines, juges ou parquet. Il fallait d'abord v�rifier les assertions des prostitu�es ; on ne prend pas pour argent comptant de telles d�clarations.
Et on n'ouvre pas d'information judiciaire sous la pression m�diatique. "Fanny", c'est une menteuse pathologique. Ces filles sont manipul�es, on leur a dict� l'histoire. Elles ont touch� de l'argent, ou on les menace.
Que reprochez-vous pr�cis�ment aux magistrats toulousains ?
En s'exprimant un minimum, on n'aurait pas laiss� la presse s'emballer. Le r�le du procureur de la R�publique, c'est d'abord de calmer le jeu. Maintenant, j'attends que Michel Br�ard, procureur de la R�publique de Toulouse, prenne ses responsabilit�s, en d�livrant un r�quisitoire suppl�tif pour faux t�moignage, � l'encontre de "Fanny". Soit on fait du judiciaire, soit on fait de l'assistance sociale. J'ai relev� �galement des fautes dans l'instruction men�e par le juge Serge Lemoine. On n'accepte pas la constitution de partie civile d'une femme, "Patricia", qui dit avoir particip� � un meurtre, celui de la prostitu�e Line Galbardi ! En proc�dant comme cela, on participe � la cr�ation de l'affaire Al�gre. Il faut ramener MM. Lemoine et Br�ard � la d�ontologie. Il faut mettre en cause ces prostitu�es. Et si M. le procureur ne le veut pas, alors nous porterons plainte contre elles.
Estimez-vous que ces prostitu�es ont �t� prot�g�es ?
On a effectivement tout fait pour prot�ger ces jeunes femmes. On leur a donn� un gendarme pour elles toutes seules. De mon c�t�, j'ai largement prouv� que j'�tais �tranger aux dires de "Fanny". Le probl�me, c'est que si "Fanny" avoue qu'elle a menti, alors elle n'existe plus. Et pour savoir d'o� proviennent r�ellement ces d�clarations, il faut les mettre en cause. Cela doit donc passer par une action positive du parquet de Toulouse. Je sais que, lors de mon affectation � Toulouse, j'ai trait� des dossiers touchant un groupe de presse et un microcosme auxquels j'ai pu faire mal. Je m'�tais �galement attaqu� aux int�r�ts franc-ma�onniques. Enfin, je veux aussi en savoir plus sur les organes qui g�raient l'action du gendarme Roussel. Qui le supervisait, lui a-t-on demand� de ne rien v�rifier ? C'est pour cela que je demande � lui �tre confront�.
Que reste-t-il aujourd'hui de l'affaire Al�gre ?
Patrice Al�gre n'est pas la poubelle criminelle de la r�gion toulousaine. Il faut que la justice finisse par y trouver son compte. L'enqu�te doit �tre approfondie. Nous devons savoir qui a mont� cela, ce sera utile pour tout le monde. Franchement, la personne qui a invent� le surnom de "Marcus", c'est sensationnel. Et dans l'affaire Line Galbardi, je l'affirme, le substitut fant�me - qui serait venu sur les lieux du crime -, ce n'est pas moi. D�sormais, je vais �tre offensif. J'ai affaire � une femme qui ment de mani�re d�finitive.
(Propos recueillis par G�rard Davet)
"Toutes les r�gles judiciaires ont �t� bafou�es", d�plore l'ex-procureur g�n�ral Jean Volff
Accus� de viol puis innocent� par "Fanny", le magistrat a d� quitter son poste
� 65 ans, il r�vait d'autre chose. Autre chose que cette soupente du palais de justice de Paris, baptis�e salle Tronchet, par o� transite le courrier. Jean Volff, install� le 30 juin comme avocat g�n�ral pr�s la Cour de cassation, n'a toujours pas de bureau.
Accus� de viol par "Fanny", puis innocent� par cette m�me prostitu�e, M. Volff a pourtant d� quitter pr�cipitamment son poste de procureur g�n�ral � la cour d'appel de Toulouse. Il en a gard� une certaine amertume.
"Il y a eu un premier emballement, celui de la cellule Homicides 31, a-t-il expliqu� au Monde. Ils avaient bien travaill� jusque-l�. Mais les gendarmes ont perdu leur sang-froid, manqu� d'esprit critique et de recul. Il aurait fallu se donner le temps de la v�rification. En ouvrant une information judiciaire, l'affaire est devenue incontr�lable." Le 15 avril, une information judiciaire pour " viols et prox�n�tisme aggrav�" �tait ouverte par le procureur de la R�publique de Toulouse, Michel Br�ard. " Si nous ne l'avions pas fait, nous aurions �t� accus�s d'�touffer l'affaire, se souvient M. Volff. Le procureur a pris ses responsabilit�s, je ne m'y suis pas oppos�. Mais c'�tait une erreur sur le plan judiciaire."
Comment g�rer une telle affaire, quand son propre nom est cit� dans le dossier ? Un d�licat num�ro d'�quilibriste, accentu�, selon Jean Volff, par la pression m�diatique. " La D�p�che du Midi avait des comptes � r�gler avec la justice, dit-il. Son attitude a �t� scandaleuse. Au mois de mars, la cour d'appel avait aggrav� les peines prononc�es, dans une affaire d'abus de biens sociaux, contre la famille Baylet. Or M. Bourragu� avait fait appel de l'ordonnance de non-lieu prononc�e par le juge, et M. Ignacio, substitut g�n�ral, avait requis le renvoi en correctionnelle. Et leurs noms ont ensuite �t� cit�s dans l'affaire Al�gre. Quand je vois la fa�on dont ce journal a jet� mon nom en p�ture, en premi�re page..."
D�s que l'implication de M. Volff dans l'affaire Al�gre a �t� rendue publique, la position du procureur g�n�ral est devenue intenable. " Cela m'a mis dans une situation impossible, se rappelle-t-il. Ma relation avec le procureur, M. Br�ard, �tait moins claire. Il ne m'a pas toujours rendu compte, en temps souhaitable, de ce qui se passait." M. Volff pr�vient la chancellerie du maelstr�m m�diatique qui se pr�pare. Il t�l�phone � Jean-Claude Marin, directeur des affaires criminelles et des gr�ces. " Je l'ai pr�venu que je lui envoyais un rapport, o� ne figureraient pas les noms des mis en cause, assure M. Volff. Les fuites, elles ont souvent lieu � la chancellerie. Mais je lui ai donn� ces noms oralement."
"ALLUMER UN CONTRE-FEU"
Le minist�re de la justice reproche pourtant � M. Volff de ne pas avoir pr�venu sa hi�rarchie des derniers d�veloppements de l'affaire. " On m'a convoqu� � Paris, en me sugg�rant de partir. On m'a nomm� un successeur, alors que j'�tais encore en poste. C'�tait vexatoire, et j'aurais pu attaquer cette d�cision au Conseil d'�tat. J'aurais d� �tre d�fendu par M. Perben, je ne l'ai pas �t�. Quand il m'a l�ch�, cela a �t� dur. Mais il valait mieux que je parte, qu'il n'y ait pas de soup�ons sur la justice. J'ai r�clam� un poste � la Cour de cassation."
Aujourd'hui, sans avoir �t� convoqu� par la justice, m�me en tant que simple t�moin, Jean Volff suit de tr�s pr�s l'�volution de l'enqu�te. Le d�part � la retraite de l'adjudant Michel Roussel ne l'a gu�re �tonn� : " Il s'est plant�, il s'�tait emball�, en manquant de recul." Il en veut � certains journalistes qui, dit-il, " ont manqu� de d�ontologie". " Il suffisait de lire l'annuaire de la magistrature pour se rendre compte que je n'�tais pas � Toulouse lors des faits qui m'�taient reproch�s. Toutes les r�gles judiciaires ont �t� bafou�es."
Que subsistera-t-il, d'apr�s lui, de cette affaire incroyable ? "La justice n'en sort pas grandie, les magistrats salis ne s'en remettront pas. Il y a eu des d�bordements chez les avocats, dont certains ont eu un comportement pas tr�s d�ontologique." Sur le fond de l'affaire, Jean Volff ne comprend toujours pas ce qui a pu pousser les ex-prostitu�es � donner tous ces noms : "Il n'est pas exclu qu'il puisse y avoir des policiers ripoux, ou un substitut ripou. Mais pr�tendre l'existence d'un r�seau, c'est incoh�rent."
Il lui reste au moins une certitude : "Ces filles n'ont pas invent� tout cela de leur propre initiative. Quelqu'un a voulu allumer un contre-feu. � Toulouse, certains dossiers judiciaires ont �t� r�gl�s trop rapidement. Il y a eu dysfonctionnement de la justice et de la police. Quelques-uns ont pu se sentir menac�s par l'enqu�te men�e par le juge Lemoine..."Jean Volff n'a plus envie de prendre sa retraite. Il va prolonger sa carri�re de magistrat, d�sormais sp�cialis� dans les litiges li�s � la S�curit� sociale. Mais il refuse que l'on puisse s'en prendre � la justice toulousaine dans son ensemble : " Si certains meurtres ont �t� reclass�s en suicides, ce n'est jamais le m�me magistrat qui �tait de permanence. Ces dossiers n'ont pas �t� class�s par le parquet, ils ont fait l'objet d'une ordonnance de non-lieu. Qu'on ne me parle pas d'un r�seau de complaisance."
G. Da.
Des policiers sont toujours accus�s d'avoir touch� des enveloppes
Le juge Thierry Perriquet souhaitait que le rapport de l'inspection g�n�rale de la police nationale (IGPN) portant sur le travail des policiers toulousains au tout d�but des ann�es 1990 soit sur son bureau � la fin du mois d'octobre. Il ne l'a pas encore re�u mais, de sources polici�res, cette enqu�te n'aurait pas permis de d�couvrir de fautes disciplinaires.
L'IGPN s'est en outre heurt�e � un obstacle de taille : impossible d'entendre les policiers incrimin�s, susceptibles d'�tre convoqu�s par les magistrats. Elle ne pouvait pas davantage auditionner les ex-prostitu�es qui se sont constitu� parties civiles. Elle s'est donc content�e de s'int�resser � l'entourage des policiers, en particulier ceux de la brigade des m�urs.
Jamais convoqu�s par les magistrats, ces fonctionnaires sont la cible d'accusations �manant des anciennes prostitu�es. "Fanny", le 29 juillet, devant la juge Nicole Bergougnan, a imput� � un policier toulousain, Z., le fait qu'elle ait d�sign� l'ancien procureur g�n�ral Jean Volff comme �tant son violeur, � l'H�tel de l'Op�ra. "J'ai subi des pressions de la part de M. Z. et d'autres policiers dont je ne connaissais pas les noms", expliquait-elle apr�s un �ni�me revirement.
Elle d�crivait ensuite une rencontre en mars 2003 pr�s de la piscine L�o-Lagrange : "Z. m'a dit qu'on me pr�senterait une liste de noms de magistrats et qu'il faudrait que je coche en remontant." Le 14 mars 2003, elle r�pondait aussi aux questions de l'adjudant Michel Roussel : "J'ai d�j� dit que de nombreux policiers, des m�urs ou pas, contraignaient les prostitu�es � des rapports sexuels gratuits (...). De toute fa�on, il nous fallait payer notre "imp�t" aux policiers (...). Pour moi, cela faisait 3 000 francs par mois."
Le juge Perriquet dispose d'autres t�moignages. Georgette T., 63 ans, prostitu�e � Toulouse de 1987 � 1999, a racont� le 16 juin, aux gendarmes, avoir vu " ses trois copines - Marie-No�lle, Maryse et Katia, toutes prostitu�es - remettre des enveloppes � des policiers des m�urs qui passaient une fois par mois". Patrick S., 38 ans, ex-prox�n�te toulousain, interrog� le 19 mai par les gendarmes, a rapport� qu'une "rumeur de ce type courait dans le quartier des putes � l'�poque (...). Z. �tait alors cit�." Autre ex-prostitu�e, Isabelle L. a d�taill� le 3 juillet, � la juge d'instruction Nicole Bergougnan, sa relation avec Z. "J'ai r�alis� que Z. en pin�ait pour moi (...). Il m'amenait dans des restaurants hors de Toulouse (...) pendant qu'il �tait en service (...). Il faut savoir que, � l'�poque, Z. �tait bien connu - et d'ailleurs d�test� - de toutes les anciennes filles prostitu�es."
Nadia C., 29 ans, a fait part aux gendarmes, le 7 f�vrier 2003, de son exp�rience. Contr�l�e en octobre 1991 par des policiers alors qu'elle se prostituait, elle en a parl� � son prox�n�te : "Quelques jours apr�s, il m'a donn� une enveloppe classique, ferm�e. Ce n'�tait pas de la drogue, mais des billets, je pense, en me disant : "Tiens, tu donneras �a aux flics quand ils repassent." J'ai interrog� "Patricia" pour savoir pourquoi il fallait faire �a, elle m'a r�pondu qu'ici, � Toulouse, il fallait payer sa place."
900 FRANCS PAR SEMAINE
Le 22 mai 2003, � son tour, "Patricia" a expliqu� � la juge Bergougnan ce qu'elle d�signait comme un "syst�me" : "Comme on risquait d'avoir des amendes pour racolage, on devait donner 900 francs par semaine aux policiers. Je donnais l'argent � M. Z. �a se passait la nuit (...). C'est Z. lui-m�me qui m'a dit que, si je donnais 900 francs par semaine, je serais tranquille."
Les enqu�teurs ont retrouv� d'autres personnages du "trottoir" toulousain, qui, eux, nient toute remise d'argent � des policiers. L'un des policiers mis en cause, interrog� par Le Monde, a affirm� que les d�clarations des ex-prostitu�es ne reposent "que sur du vent". Le 8 novembre 2002, le policier Z. avait �t� entendu par les gendarmes, dans le cadre de l'affaire Line Galbardi, prostitu�e tu�e � Toulouse le 3 janvier 1992. Il avait fait part aux enqu�teurs de "d�nonciations calomnieuses dont il faisait r�guli�rement l'objet (...) de la part de prostitu�es en activit�". Z. a quitt� la brigade des m�urs en juin 1992 et a pris sa retraite le 15 septembre.
(G�rard Davet)
Les "confidences" des prostitu�es � l'adjudant Michel Roussel : une m�thode d'enqu�te � risques
Le directeur d'enqu�te de la gendarmerie a choisi la proximit� avec les t�moins. Cette strat�gie lui a permis d'obtenir des aveux de Patrice Al�gre, mais l'a fait tr�bucher avec "Fanny" et "Patricia".
De tous c�t�s, les coups pleuvent. " Je ne veux rien mettre sur le dos de Michel Roussel, mais il a mal travaill�", attaque Marc Bourragu�, ex-substitut toulousain. " Roussel ? Il s'est plant�", assure Jean Volff, ex-procureur g�n�ral de Toulouse.
Parti � la retraite, lundi 13 septembre, l'adjudant Michel Roussel, 42 ans, qui a consacr� six ann�es � �lucider les myst�res de Patrice Al�gre - et qui a obtenu les aveux du tueur en s�rie -, ne m�rite probablement pas une telle salve. Plus s�rement paie-t-il le choix d'une m�thode d'enqu�te � hauts risques : obtenir des confidences, en jouant sur la proximit� avec les t�moins.
Ce mail, saisi par les gendarmes sur l'ordinateur de "Patricia", illustre la relation qui s'�tait d�velopp�e avec Michel Roussel. L'ex-prostitu�e, mise en examen le 19 juin pour complicit� de "d�nonciation de crime imaginaire", puis incarc�r�e, �crivait le 1er mars au gendarme : "Salut, Michel. Impossible de t'avoir au t�l�phone. (...) Il faudrait que tu viennes me chercher � la gare � 10 h 45. Appelle-moi car tu n'es pas joignable. GROS BISOUS."
Pierre Mutz, directeur g�n�ral de la gendarmerie nationale, a pris la d�fense de l'adjudant Roussel et plus g�n�ralement de ses enqu�teurs : "Nous avons des instances disciplinaires auxquelles tout citoyen a acc�s, d�clare-t-il au Monde. Or personne ne l'a fait. Je n'ai pas l'impression que les gendarmes aient quoi que ce soit � se reprocher." Ce n'est pas le sentiment du juge d'instruction Thierry Perriquet, qui a convoqu� l'enqu�teur le 9 octobre. Longuement entendu, en qualit� de t�moin, le gendarme a d�taill� sa version des faits. En n'oubliant pas le r�le jou� par les hauts responsables judiciaires de Toulouse : " "Fanny" �tait dans une situation de pr�carit� et d'ins�curit� dont j'estimais que nous �tions responsables en partie, dit-il au magistrat. Je la consid�rais, comme "Patricia" et Nadia C., comme un t�moin � prot�ger. Le directeur d'enqu�te que j'�tais, appuy� par ma hi�rarchie et l'autorit� judiciaire avec lesquelles j'�tais en phase (nous avions parfois plusieurs contacts au cours d'une journ�e), a d�cid� de demander les moyens mat�riels pour s�curiser "Fanny". "
L'adjudant Roussel va donc d�passer le strict cadre de son enqu�te pour aider ses t�moins-cl�s, en particulier "Fanny". " C'est ainsi par exemple que j'ai �t� amen� � lui amener de l'alimentation que j'avais obtenue aupr�s d'une association qui m'avait �t� indiqu�e par M. Heinisch - substitut du procureur -. C'est avec le concours de la Croix-Rouge, contact�e par M. Br�ard - procureur de Toulouse -, que son d�m�nagement a �t� organis�." Le parquet de Toulouse confirme a confirm� cette information.
UN SENTIMENT D'AMITI�
Au juge Perriquet, qui lui demandait si un sentiment d'amiti� avait pu surgir, tout au long de ces auditions, il avait r�pondu : "Il n'y a jamais eu d'amiti� entre nous. Nous �tions dans le contexte d'une relation entre une personne qui avait un v�cu, et un enqu�teur qui recherchait des informations pour faire progresser des enqu�tes criminelles." Et le gendarme de pr�ciser : " Ce n'est donc pas dans le cadre de l'amiti� que j'ai agi envers elle, mais dans le cadre de mon activit� professionnelle. Je me suis aper�u cependant qu'elle �tait excessive dans ses demandes, et j'ai d� la recaler. (...) Lorsque je lui ai pos� ces limites, elle ne les a pas accept�es."
L'ex-prostitu�e, se sentant d�laiss�e, a eu des mots tr�s durs � son �gard, le 17 septembre, dans le bureau du juge Thierry Perriquet. "Je croyais que ce dernier - Michel Roussel - �tait un grand ami. Il avait vu mes enfants � la maison, mais il m'a laiss� tomber comme une merde quand il a vu que l'affaire se compliquait."Ce revirement soudain, ces brusques sautes d'humeur, Michel Roussel ne s'y attendait pas forc�ment. Les multiples changements de versions des ex-prostitu�es ont peu � peu sap� sa position d'enqu�teur-cl�.
Deux groupes d'enqu�teurs ont finalement �t� cr��s � la gendarmerie pour travailler sur l'affaire Al�gre. Des jalousies se sont fait jour, et bient�t des sarcasmes sont venus quand Michel Roussel a �t� d�savou� par "Fanny". "La r�action de "Fanny" ne me surprend pas, a r�pondu au juge l'adjudant Roussel, mais elle me d��oit un peu. Cela �tant, je n'ai aucun regret par rapport � ce que j'ai fait. Je tiens � dire spontan�ment que je n'ai fait qu'appliquer des m�thodes qui m'ont �t� inculqu�es par la gendarmerie : identifier et rechercher des t�moins, trouver la meilleure fa�on de les aborder pour conna�tre leur v�cu, et ensuite acter la totalit� de leurs d�clarations." Quant � v�rifier les faits si pr�cis�ment d�crits par les t�moins, le gendarme estime que ce n'�tait pas l� son travail : "Je n'ai pas eu ensuite � assurer la v�rification de ces d�clarations que j'avais pourtant le devoir et l'obligation de recevoir."
Le juge Perriquet rappelle que, selon "Fanny", c'est Michel Roussel qui lui aurait " souffl�" le surnom de Dominique Baudis, � savoir " N�nette": " C'est inexact, a indiqu� le gendarme. En ce qui me concerne, la premi�re fois que j'ai entendu ce surnom, c'�tait dans la bouche de "Patricia". (...) Lorsque j'ai enregistr� sa d�position ce jour-l�, elle a prononc� ce surnom de mani�re spontan�e."
Autre point crucial : c'est bien M. Roussel, �galement, qui avait mis en relation, via son t�l�phone portable, "Fanny" et "Patricia": "J'ai fait cela car je voulais la rassurer. (...) J'ai bien eu le sentiment qu'elles se connaissaient."
(G�rard Davet)
Entre M. Baudis et M. Douste-Blazy, le "mauvais roman" a �t� d�vastateur
Ils se sont revus, vendredi 17 octobre, pour une remise de L�gion d'honneur, � Toulouse. Retrouvailles froides, forc�ment compass�es. Dominique Baudis et son successeur � la mairie de Toulouse, Philippe Douste-Blazy, ont longtemps sembl� former un couple politique indestructible.
C'est l'actuel pr�sident du Conseil sup�rieur de l'audiovisuel (CSA), M. Baudis, qui avait adoub�, en 1997, celui qui allait devenir le secr�taire g�n�ral de l'UMP. � l��poque, il avait d�cid� de quitter le Capitole. Il lui fallait un homme politique connaissant bien Toulouse, �lu dans le Sud-Ouest, avec une carrure nationale, et si possible fiable. Le nom de M. Douste-Blazy s'imposait. En 2001, l'ancien maire de Lourdes l'emportait � Toulouse, lors des �lections municipales, et M. Baudis pouvait tranquillement s'installer quai Andr�-Citro�n, au si�ge du CSA. Une op�ration politique plut�t bien men�e.
Mais l'affaire Al�gre est pass�e par l�. Et le lien entre les deux hommes, qui ne fut jamais une r�elle histoire d'amiti�, n'a pas surv�cu. " Notre relation ne peut plus �tre la m�me, d�clare au Monde M. Baudis. Mais par sens des responsabilit�s vis-�-vis de Toulouse, je ne vais pas provoquer de crise municipale." M. Douste-Blazy, lui, met cet �loignement subit sur le compte du choc encaiss� par M. Baudis : " Dominique est l'un de mes amis, dit-il, et je lui apporte toute mon amiti�. Nous avons �t� excessivement proches. Je pense que tout va se remettre en place avec le temps."
Ce n'est pas si simple. Car si les griefs de M. Baudis � l'encontre de son successeur ont pu sembler d�mesur�s au tout d�but de l'affaire, l'homme semble aujourd'hui avoir fait le tri dans ses �motions. Et dans le livre qu'il pr�pare, pour les �ditions Bernard Fixot, quelques passages sont r�serv�s � M. Douste-Blazy. Le pr�sident du CSA n'a pas appr�ci� � c'est un euph�misme � que le maire de Toulouse, averti que le nom de M. Baudis �tait cit� dans l'affaire Al�gre, ne l'e�t pas pr�venu sur-le-champ. " Mais je lui ai tout dit, � Dominique Baudis, je lui ai tout expliqu�, assure M. Douste-Blazy. Je n'ai jamais cru qu'il soit m�l� de pr�s ou de loin � cette histoire. Quand j'ai su que son nom �tait cit�, j'ai appel� son directeur de cabinet, Camille Pascal, en lui disant simplement : "Les gens racontent n'importe quoi, c'est une horreur". Je n'ai jamais faut�, et j'ai la conscience tranquille."
M. Baudis n'est pas de cet avis. Il r�clame m�me � M. Douste-Blazy une attestation �crite dans laquelle le maire de Toulouse explique que le nom de M. Baudis circulait d�j�, dans les milieux bien inform�s de Toulouse, depuis la mi-avril. " Or, je n'ai appris les choses que le 16 mai, se souvient M. Baudis. Je reproche donc � Philippe Douste-Blazy de ne pas m'avoir pr�venu." C'est l'hebdomadaire Marianne qui publie le premier l'information, d�but mai. Dominique Baudis appelle imm�diatement M. Douste-Blazy : " Il a fait comme s'il ne savait pas que mon nom �tait cit�", assure l'ancien maire de Toulouse.
Le 13 mai, les deux hommes se parlent enfin de vive voix. " Ne t'en fais pas, lui glisse M. Douste-Blazy, c'est du mauvais roman." Mais M. Baudis est s�v�rement meurtri. Il pr�pare sa contre-attaque t�l�vis�e. " Nous �tions dans une situation d'urgence, se rappelle M. Douste-Blazy. Je connais, j'en ai fait pendant dix-neuf ans � l'h�pital. Dominique est courageux, rigoureux, il a une parole et pas deux. Lorsque nous avons discut� ensemble, la semaine de son intervention t�l�vis�e, il avait pr�vu de donner une interview au Monde. Je lui ai parl� du Journal de 20 heures." M. Baudis se d�cide, finalement, � intervenir aussi le 18 mai au soir, au Journal de 20 heures de TF1. Il re�oit nombre de soutiens. L'ancien pr�sident de la R�publique, Val�ry Giscard d'Estaing, l'appelle et lui fait part de son appui.
"ON EST ENSEMBLE, ON SE RETROUVE"
" Je savais que j'�tais innocent, confie M. Baudis. Mais je mesure d�sormais � quel point j'ai chemin� sur un fil de funambule, au-dessus d'un gouffre. � quel point le cercle noir qui cernait �tait mena�ant. Le fait de me battre m'a donn� l'�nergie de me tenir debout. Si l'on est soi-m�me mis � l'�preuve, on teste aussi les autres. J'incarne une institution, c'�tait de mon devoir de la d�fendre alors qu'elle �tait attaqu�e."
En ao�t, M. Baudis a enfin acc�s au dossier d'instruction. Il d�couvre que le nom de M. Douste-Blazy est �galement cit� par l'une des ex-prostitu�es. Il le voit � son domicile toulousain. " On est ensemble, on se retrouve", lui dit le maire de Toulouse. M. Baudis ne fait pas de cadeau. Il l�che, plus tard :"Il y a ceux qui se seront battus, d'autres qui se seront planqu�s." Le 17 septembre, M. Baudis est entendu par le juge Thierry Perriquet. Au terme de son audition, son avocat, Me Francis Szpiner, demande dix actes de proc�dure au magistrat. Parmi ceux-ci, figure l'audition de M. Douste-Blazy : "Les accusatrices de M. Baudis lui ayant imput� un certain nombre d'actes r�pr�hensibles en sa compagnie, son audition m'appara�t utile", �crit Me Szpiner. Le magistrat n'a pas donn� suite. D�j�, en forme de repr�sailles, un �ventuel retour de M. Baudis � la mairie de Toulouse est �voqu�. " Je ne peux r�pondre � cette question, j'ai un devoir de r�serve", �lude le pr�sident du CSA.
G. Da.
"La D�p�che du Midi" se d�fend d'�tre all�e trop loin
Dominique Baudis d�nonce le "r�le trouble" jou� par le quotidien r�gional, dirig� par son adversaire politique, Jean-Michel Baylet
Ils sont quelques-uns � n'avoir pas accept� le r�le jou� par La D�p�che du Midi, le seul quotidien toulousain, dans l'affaire Al�gre. C'est ce journal qui, d�s le 1er avril, r�v�lait les accusations de l'ex-prostitu�e "Patricia".
Ce journal encore qui, le 10 avril, sous la signature de Jean-Christophe Giesbert, le directeur de la r�daction, d�non�ait les "embarras de la justice toulousaine". " Pourquoi, malgr� la gravit� des d�clarations(...), la justice toulousaine tarde-t-elle � proc�der � une instruction circonstanci�e de cette affaire ?" demandait M. Giesbert. Cinq jours plus tard, le parquet de Toulouse ouvrait une information judiciaire.
Le 24 mai, le journal poursuit : " Le courage de "Patricia" et "Fanny" commence � payer ; (...) ceux qui les connaissaient n'en doutaient pas." Ind�niablement, La D�p�che du Midia �t� tr�s en pointe dans l'affaire Al�gre. Trop ? C'est ce que pensent Dominique Baudis, Marc Bourragu� et Jean Volff. " Il y a deux phrases que je n'oublierai pas, d�clare M. Baudis. C'est Jean-Michel Baylet, directeur de la publication de La D�p�che, disant : "Tant mieux si M. Baudis arrive � prouver qu'il est innocent." C'est une inversion totale de la logique de la justice. Quant � M. Br�ard, procureur de la R�publique, il a dit : "J'ai agi sous la pression des m�dias. Je ne suis pas le seul � mettre en cause le r�le trouble jou� par ce journal.""
Marc Bourragu� a d�pos� quatre plaintes en diffamation contre vingt-deux articles de La D�p�che du Midi. Quant � Philippe Douste-Blazy, il ne comprend pas pourquoi "La D�p�che a accord� autant de place � l'affaire, sans donner la parole � Dominique Baudis". Il est vrai que le conflit entre M. Baudis (UMP) et M. Baylet (PRG) ne date pas d'hier, et s'est parfois jou� devant les tribunaux. " Nous sommes le seul vrai contre-pouvoir � Toulouse, s'emporte M. Baylet. Dominique Baudis avait la ville � sa botte. L'affaire Al�gre, c'est nous qui la sortons, en faisant notre travail de journalistes. Mais il ne faut pas oublier que plusieurs personnes ont cr�� les conditions pour que l'on sache tout. Sachez que je ne p�se jamais sur le quotidien du journal. Nous n'avons pas failli. Nous avons sollicit� M. Baudis, il n'a pas voulu s'exprimer."
Devant les gendarmes, le 18 juin, "Patricia" en dit pourtant un peu plus. Elle d�taille l'intervention du journaliste de La D�p�che qui suit l'affaire Al�gre depuis le d�but : "C'est un journaliste de La D�p�che (...) que j'ai rencontr� par l'interm�diaire de mon avocate dans son cabinet (...). C'est lui qui �crit un livre sur moi, Vicky - NDLR : Fanny - et Isabelle. Bien entendu, il est au courant de toute l'affaire (...) mais il n'a pas le droit de r�v�ler le contenu des informations que je lui communique." Le 17 septembre, cette fois devant le juge Thierry Perriquet, c'est "Fanny" qui explique ses relations avec ce m�me journaliste : "Je l'ai rencontr� trois fois, je pense, il m'a propos� de faire un bouquin avec d'autres prostitu�es et "Patricia", mais j'ai toujours refus�. La derni�re fois que je l'ai rencontr�, c'�tait la semaine derni�re, aux archives du journal La D�p�che, o� je m'�tais rendue pour rechercher un article. (...) Je pr�cise ici que je recherchais cet article car il y avait Marc Bourragu� dessus. - Le journaliste - m'a demand� ce que je cherchais. (...) Il m'a propos� de m'aider, puis m'a longuement parl� de toute l'affaire. (...) Il m'a �galement appel�e hier au t�l�phone pour me demander le num�ro de ma m�re."
"LE JOURNAL D'UN CLAN"
Un livre, sign� par ce journaliste, et un autre, d'un "collectif", et intitul� Nous, Fanny, Nadia et Patricia, prostitu�es � Toulouse, doivent justement sortir prochainement aux �ditions Michel Lafon. Jean-Michel Baylet assure que si le journaliste lui "en avait parl� avant, il lui aurait dit que c'�tait inopportun". Sur le fond, M. Baylet d�ment avoir fait pression sur la justice : " Nous n'avons pas r�clam� l'ouverture d'une information judiciaire, c'est du r�visionnisme ! J'ai simplement d�couvert la haine mortelle que me voue Dominique Baudis. Pourtant, on se conna�t tr�s bien, il est m�me venu manger chez moi."
Il ne veut surtout pas, dit-il, m�langer la politique avec cette affaire : " C'est un fait-divers dramatique, pas une histoire de politique. La D�p�che, ce n'est pas le journal d'un clan. Il ne faudrait pas tout nous mettre sur le dos, on ne peut salir l'ensemble de notre travail. Al�gre, il n'est jamais venu prendre l'ap�ro chez moi..." Une allusion � la visite de Patrice Al�gre, avec un ami, chez le substitut Marc Bourragu�.
G. Da.
Affaire Al�gre
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