Apr�s la diffusion, lundi soir, de l'�mission de France 2 de nombreuses r�actions spontan�es sont parvenues � Corse-Matin, la plupart �manant dr personnes intervenant dans ces reportages. Toutes se d�clarent choqu�es et afflig�es par la mani�re dont a �t� trait�e l'information par les journalistes de France 2.
Malhonn�tet�, provocation, trahison sont les sentiments qui pr�valent apr�s cette diffusion. Un sentiment largement partag� par l'ensemble de la population de l'�le
Jean-Claude Acquaviva, chanteur du groupe � A Filetta � : � Affligeant et malhonn�te �
� C'est absolument scandaleux. Nous avons consacr� deux jours entiers � ces journalistes. Nous leur avons parl� des probl�mes de fond de la Corse, de l'agriculture, de la culture, de l'histoire, des racines de la violence. Ils ont retenu une seule phrase, que j'assume totalement, mais en gommant le discours pr�alable qui la justifie. C'est affligeant et profond�ment malhonn�te Depuis la parution, je me suis entretenu avec Beno�t Duquesne qui persiste dans sa malhonn�tet�. C'est lamentable, les m�dias nationaux sont en train de cr�er un climat d�testable, qui d�veloppe ici un sentiment anti-France et qui manipule l'opinion fran�aise contre nous �.
�tienne Suzzoni, vigneron � Lumio et pr�sident de la Chambre d�agriculture de la Haute-Corse : � Une caricature malfaisante �
� Les r�alisateurs de l'�mission ont donn� une image de la soci�t� corse qui est d�valorisante. Ils ont trait� les probl�mes en diabolisant la situation � travers leur prisme pour la transformer en caricature malfaisante. Ils ont occult� les probl�mes de fonds. J'ai notamment l'impression que tout ce qui pouvait mettre en cause les responsabilit�s collectives de l'�tat dans les probl�mes corses a �t� censur� �.
Jean-Pierre Susini, nationaliste de Luri : �J�ai �t� d�stabilis�
� J'ai �t� d�stabilis� par ses questions rapides et ses encha�nements. J'ai pourtant essay� de relater les �v�nements de Luri tels qu'ils se sont pass�s, avec les n�gociations entre le colonel de gendarmerie et les villageois. Ils m'ont appel� de Paris, le comit� de r�daction, et au final ils tronquent tout. Pendant l'interview, j'ai �t� orient�, d�stabilis�. Je suis parti sur un sujet et j'ai atterri sur un autre. Au d�part on m'avait propos� de parler de l'ind�pendance. C'est de la provocation et de l'intoxication, et c'est comme cela qu'on en arrive � de telles situations. C'est un montage malhonn�te et d�solant. C'est la derni�re fois que je m'exprime sur celle cha�ne. �
Le Docteur Sauveur F-Gandolfi-Schelt, maire de Biguglia : �Une �mission exag�r�e�
C'est une �mission exag�r�e, o� l'on voit trop de destructions Cela donne l'impression d'�tre � Beyrouth. Pour le reste, qu'il y ait des plasticages et du racket, tout le monde la sait, les faits sont l�. Mais il n'en demeure pas moins que les journalistes de la TV ont fait un travail de sape� �
Dominique Sialelli, directeur de la brasserie Pietra et interview� dans l'�mission: �Un go�t de proc�s en sorcellerie�
Il y a actuellement une multiplication d'�missions sur la Corse qui laissent un go�t de proc�s en sorcellerie. Je pense que la situation dans l��le est plus complexe que ne peut le laisser transpara�tre une �mission r�ductrice. C'est le c�t� frustrant. A partit de l�, les m�dias du continent ont tendance � refl�ter l'opinion publique continentale. Sur les �v�nements de Luri, en Corse on �voque la disproportion donn�e � cette affaire, sur le continent on est d'abord vex�s de l'atteinte au symbole de l'�tat, Cela r�v�le une fracture entre deux opinions publiques. Il est dommage que les m�dias, au lieu de r�duire cette fracture, d'essayer de comprendre, ne fassent que l'aggraver.
Sur le continent, l'image de la Corse deviendra encore plus n�gative, et ici nous aurons le sentiment d'�tre une nouvelle fois incompris. Tout cela n'est pas tr�s constructif, On aurait pu �tre plus nuanc�. Cela devient insupportable que l'on dise les � Corses � en globalisant une diversit� d'individus. On nous met sur le dos beaucoup de choses. Au final c�est r�ducteur et cela alimente un discours anti-corse. �
Jean-Luc Biancarelli, professionnel du tourisme � Porto-Vecchio : c�est une mani�re r�currente qu'ont les m�dias nationaux d'aborder la Corse par le petit bout de la lorgnette. L'incompr�hension avanc�e par le journaliste phare de l'�mission, au nom des Fran�ais, rien que le fait de l'�noncer autant de fois, ne fait qu'accentuer les diff�rences, Nous aussi nous avons beaucoup de sujets d'incompr�hension par rapport au comportement de la France � notre �gard. J'ai, par contre, appr�ci� l'intervention, venant en fin d'�mission et certainement � malencontreusement � raccourcie, du PDG de la soci�t� Pietra. Un discours positif et optimiste, dans ce magma t�l�visuel bas� plus sur les fantasmes que sur la r�alit� insulaire.
J.-A. Tomasini, maire de Castirla � Mes propos d�natur�s �.
Jacques-Andr� Tomasini, maire de Castirla, ne cachait pas son m�contentement hier, apr�s l'�mission diffus�e sur Franca 2 l'autre soir. � J'ai pass� quatre heures avec l'�quipe de tournage at au bout du compte les motivations avanc�es pour la r�alisation de cette �mission ont �t� occult�es. Mes propos ont �t� totalement d�natur�s et sortis de leur contexte. Il est clair que l'objectif recherch� � travers cette �mission �tait simplement de v�hiculer une image n�gative de la Corse. Je suis d��u et m�content �.
Francis Sicurani, secr�taire g�n�ral de la FDSEA: �Le parti pris des journalistes de France 2�
Francis Sicurani, au titre de secr�taire g�n�ral de la FDSEA, a �t� quatre fois en contact t�l�phonique avant d'�tre film�, il y a environ trois semaines, dans le cadre du sujet traitant de l'agriculture, et bien entendu du probl�me de l'eau et de la s�cheresse. � D�j�, au moment du tournage, il avait d�tect� le parti pris des journalistes de France 2. J'avais mis en garde lors de cette interview la journaliste qui la r�alisait, pour que mes dites soient respect�s, parce que j'avais d�j� saisi � ce moment-l�, la direction programm�e que pouvait prendre ce reportage. Le toll� provoqu� par sa diffusion, alors que je ne l'ai pas moi-m�me vu, me conforte dans ce que j'avais pr�vu. Je vais donc prendre le temps de visionner la cassette du reportage, avant de donner une suite qui soit �tay�e du mieux possible s'il y a lieu �.
No�lle Vincensini, responsable du collectif anti-raciste Av� Basta.� D'une certaine mani�re, j'ai �t� la plus mal trait�e. J'apparais comme une esp�ce d'agit�e, incoh�rente, tant le montage a hachur� mes propos � estime No�lle Vincensini, d��ue, comme beaucoup d'autres, par la diffusion, lundi soir sur France 2 de l'�mission � Compl�ment d'enqu�te �
� Les deux tiers de l'interview film�e ont disparu. On aurait pu au moins sur une de mes phrases laisser d�velopper l'argumentation qui l'accompagnait. Leur conduite avec moi traduit le plus cr�ment � quel point on peut �carter ce qui n'entre pas dans la vision pr�con�ue du journaliste. Ainsi j'avais d�nonc� la corsophobie galopante qui d�ferle sur les m�dias nationaux et qui r�pand, soit insidieusement, soit grossi�rement, un certain rejet de la Corse. J'avais cit� des exemples dont celui d'Eddy Mitchell parlant d'une �le de cr�tins. Quand on dit la Corse, les Corses, quand on globalise dans les commentaires discriminatoires, on fait du racisme. Ces propos-l� ont compl�tement disparu. Des passages entiers ont �t� gomm�s ou r�duits � leur plus simple expression � regrette celle qui avait souhait� intervenir en tant que citoyenne et non pas comme pr�sidente du collectif antiraciste Ava Basta, tient-elle � pr�ciser.
No�lle Vincensini ajoute : � Avec des gens de France j'ai pass� des moments tr�s forts de ma vie, Ils ont contribu� � faire de moi ce que je suis. C'est pourquoi je ne supporte pas qu'on leur serve une image de mon �le en d�calage de ce qu'elle est vraiment. Les erreurs dans le traitement de la r�alit� corse alimentent en ce moment la mont�e d'un sentiment anti-fran�ais parmi les plus jeunes surtout et c'est inqui�tant. �
Ses propos rejoignent un peu ceux de Jean Baggioni, pr�sident du Conseil ex�cutif de Corse tenus le 1er septembre � l'Assembl�e de Corse. Il avait regrett� que � l'ensemble de nos compatriotes ne soit parfois instruit des probl�mes de la Corse qu'� travers le traitement de certains �v�nements m�diatis�s � l'exc�s �.
�voquant la situation politique dans l��le, Jean Baggioni d�non�ait cette sur-m�diatisation qui, � travers des � centaines d'heures de radio ou de t�l�vision, des milliers de pages de journaux quotidiens ou hebdomadaires, sans parler des nombreux ouvrages qui nous sont consacr�s, pourrait laisser croire que nous sommes ou qu'on nous prend pour � le nombril du monde �. Sur ce sujet, il � avouait son inqui�tude face � la lente et inexorable d�gradation de l'image de la Corse � dont avait-t-il pr�cis� � je souffre avec la plupart de nos compatriotes �.
Il avait alors conclu en invitant l'ensemble de ses coll�gues ainsi que les �lus de l'Assembl�e � un sursaut : � Je voudrais que nous entamions la plus rapide des corrections de cette vision d�form�e, pour retrouver notre vraie place, celle,
d'une �le g�n�reuse ouverte et dynamique �
Le service de communication de France 2 fait savoir � Corse-Matin que son �mission a r�alis� une tr�s bonne audience : 4,1 points, ce qui repr�sente exactement 2,18 millions de t�l�spectateurs et pr�s de 24% de parts de march�.
Ainsi, � Compl�ment d'enqu�te a battu lundi soir son propre record d'audience avec le th�me de la Corse
Lettre d�un lecteur
L��mission � compl�ment d�enqu�tes � soul�ve un probl�me r�curent en Corse. Des journalistes de France 2, cornaqu� par les responsables de FR3 Corse et de Radio Bleu Frequenza mora, enqu�tent sur place et enregistrent des dizaines d�heures d�interview.
Le journaliste principal Benoit Duquesnes, fait preuve au cours des interviews d�un esprit partisan un rien aga�ant mais rien de choquant. C�est au montage que tout se g�te. Benoit Duquesne montre une Corse caricaturale, en proie � une violence inextinguible et peupl�e d�habitants ambigus.
Que dire d�un tel tableau ? Il n�est pas compl�tement faux mais parce qu�il n�est pas compl�tement juste non plus, il en devient faux. Quelques �l�ments essentiels d�abord : le mouvement nationaliste ne repr�sente qu�un cinqui�me de l��lectorat qui vote soit quinze pour cent des inscrits. C�est honorable mais �a n�est pas �norme.
En second lieu, le mouvement clandestin est fort d�une centaine d�individus . Sa permanence traduit assur�ment un probl�me plus profond qu�une simple question de petite d�linquance. Les Corses sont les premi�res victimes de la violence puisqu�une moiti� des attentats touchent des Corses.
Ce ne sont pas les propos d�irresponsables comme Jean-Pierre Susini qui donne le ton de la Corse. Sa d�fense est d�ailleurs mis�rable. Cet homme qui est entr� dans l�histoire insulaire en affirmant qu�il � tol�rait � les gendarmes pr�tend soudain avoir �t� d�stabilis� par les questions des journalistes. � cela une solution toute simple : ne pas r�pondre aux questions. Tout le monde s�en trouvera fort aise.
Les protestations qui ont �t� �mises lors de l��mission radiophonique Forum, traduisent le sentiment de trahison v�cu par ceux qui ont �t� interrog�s. Mais que voulaient-ils au fait ? Car l� r�side la profonde ambigu�t� des nationalistes corses : ils justifient la violence mais se montrent furieux qu�on montre une Corse violente ? Il faudrait savoir.
Les directeurs de FR3 et de RCFM ont pris la parole pour expliquer qu�eux aussi s��taient fait rouler dans la farine. On croit r�ver. Voil� des hommes qui passent une partie de leur temps � Paris et qui soudain, crient au viol de leur conscience. Et puis apr�s tout que n�ont-ils eux diligenter des sujets sur Luri, Tolla� Tout se passe comme le pouvoir tout entier �tait aux mains des m�dias continentaux. Peut-�tre faudrait-il que le syst�me m�diatique insulaire se bouscule un peu au lieu de s�enfermer dans un syst�me n�gatif de protestation perp�tuelle sur l�air bien connu de � On est tous des incompris �.
Que la presse continentale ne comprenne pas la Corse est d�sormais un fait acquis. Mais alors qu�attendons-nous pour nous prendre en main et imposer notre propre vision de la Corse � un continent demandeur ? Et peut-�tre que le succ�s grandissant de notre site est aussi la cons�quence de cette d�sesp�rante m�diocrit� m�diatique corse ?
Plusieurs d�entre nous sont bien plac�s pour en parler. Il ne s�agit pas d�accabler des individus qui sont souvent bien meilleurs que sur le continent. Pour comprendre ou tenter de comprendre la Corse, il est n�cessaire de ne jamais rester en repos. Mais que faisons-nous de cette intelligence sinon de la transformer en un � lascia corre � permanent.
Notre l�gitimit� � d�noncer le regard que porte le continent sur nous est bas�e sur la conviction que nous avons et que nous d�montrons que nous ne sommes pas tels qu�on nous d�peint.
Or tout laisse penser qu�en fait, en dehors des blessures d�amour-propre que nous inflige la presse continentale, nous ne sommes pas s�rs de nous. Nous sommes sans cesse effleur�s par le doute de ce que nous sommes profond�ment. Nous �voluons entre des paroles d�une pr�tention sans nom, nous prenant pour le nombril du monde, et des p�riodes de d�pression terribles o� nous pensons ne jamais nous en sortir.
Combien de r�dactions insulaires analysent leur attitude, leurs reportages pour tenter de d�gager une attitude constructive ? Notre r�ponse en connaissance de cause est aucune.
Voil� pourquoi le reportage de Duquesnes �tait un reportage destin� � conforter la mauvaise image de la Corse sur le continent. Mais voil� pourquoi, si nous ne savons rien faire d�autre que de pleurer sur l�anti-corsisme galopant, nous m�ritons ce qui nous arrive.
Et dans ce domaine, la prime revient aux nationalistes et plus particuli�rement au CAR dont les communiqu�s d�goulinent de sentiments larmoyants, de phrases excessives, d�erreurs historiques qui se concentrent en une d�marche qui n�aboutit � rien sinon � conforter les Corses dans leur immobilisme.
Quelques mots tout de m�me sur l�attitude de Claude Semp�re, Benoit Duquesnes et consorts. On ne peut pas en m�me temps reprocher � la Corse son manque de dynamisme et suspecter tous ceux qui r�ussissent d�attitude mafieuse. Et cette remarque vaut pour les Corses qui �prouvent un malin plaisir � s�observer et � s�auto-d�nigrer. Il eut �t� plus positif de tenter de cerner la r�alit� corse avec �galement ces dizaines de milliers de personnes qui, sans �tre toutes anti-nationalistes, r�vent d�une soci�t� o� tout ne soit pas bas�e sur la violence ou les rapports de force. On a bien le droit � une part de na�vet� non ?
TOUT LE DOSSIER CORSE
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