Gr�ce au calme des forces de l�ordre, les incidents qui ont marqu� pendant deux heures la fin de la manifestation nationaliste d�Ajaccio, n�ont fait aucun bless�. sans faire de bless�, la fin de la manifestation qui a rassembl� plusieurs milliers de nationalistes corses samedi en fin d'apr�s-midi � Ajaccio, "contre la r�pression" et "pour la lib�ration des prisonniers politiques". Dans la nuit, un double plasticage a endommag� des monuments publics � Nice.
La manifestation avait commenc� place de la Gare vers 19 heures. Le millier de personnes pr�sent s�est peu � peu �toff� jusqu�� doubler. Tr�s rapidement les organisateurs annon�aient 15 000 personnes avant d�abaisser ce chiffre � 12000. Pour indication 12000 personnes signifieraient que la foule couvrirait la surface enti�re du cours Napol�on, de la place des Palmiers et de celle du Diamant. Cela ne s�est jamais vu qu�� la Lib�ration et le lendemain du pr�fet Erignac. Derni�re indication : la population d�Ajaccio ville s��l�ve � 15 000 habitants. La police de son c�t� annonce 1800 personnes. Nous avons pour notre part proc�der � trois comptages diff�rents qui tous ont donn� un chiffre l�g�rement sup�rieur � 5000 personnes soit autant que pour les pr�c�dentes manifestations pour la langue corse et plus en arri�re pour les droits l�gislatifs. Cela appelle deux pr�cisions : tout d�abord les nationalistes sont la seule force politique � pouvoir regrouper autant de personnes en Corse. C�est donc d�une certaine mani�re une d�monstration de force r�ussie qui t�moigne de la vitalit� du mouvement nationaliste. N�anmoins, cette manifestation n�a pas constitu� � une manifestation historique � pour reprendre la d�claration pompeuse de Jean-Guy Talamoni. Elle repr�sente ni plus ni moins une d�monstration de force attendue de la part de l�enti�ret� du mouvement nationaliste sur un th�me f�d�rateur : la solidarit�. 400 personnes s��taient r�unies � Ajaccio et autant � Propriano. Notre observation nous m�ne � penser que la manifestation nationaliste a rassembl� le ban et l�arri�re-ban de ce courant de pens�e mais n�a pas r�ussi une fois encore � d�border au-del�.
Des assurances pour la fin de manifestation
Nombre de vieux militants �taient pr�sents pr�venus par le mouvement des � inorganis�s � qui tentent une perc�e derri�re des hommes comme Jean Biancucci ancien responsable du FLNC et devenu mod�r� � la suite de son �viction par Fran�ois Santoni, ou encore Edmond Simeoni le vieux leader d�il y a une g�n�ration. Des assurances leur avaient d�ailleurs �t� donn�es concernant la fin de manifestation. Les responsables d�Indipendenza les avaient assur�s que les rumeurs dont nous nous �tions fait l��cho concernant des incidents de fin de manifestation �taient � des mensonges de flics � (sic).
On pouvait encore constater des retrouvailles tout � fait r�confortantes comme Jo Sisti ancien dirigeant de l�ANC et de Resistanza, discutant chaudement avec son ancien dirigeant Pierre Poggioli dont il s��tait s�par�. Or la rumeur pr�te � Jo Sisti, militant agricole du Fium�Orbu beaucoup d�amiti� pour Toussaint Pieri, en cavale et responsable pr�sum� du nouveau FLNC. Toussaint Pieri �tait un militant de Corsica Viva et du FLNC du 5 mai l�organisation soup�onn�e d�avoir fourni un soutien logistique � Yvan Colonna. On sait par ailleurs que cette nouvelle organisation clandestine aimerait se trouver des porte-voix qui la repr�sentent lors des territoriales. Et comme certains dirigeants l�gaux ne d�testeraient pas �tre �paul�s par la clandestinit� dans leur combat l�gal, on observe avec int�r�t de nouvelles synergies se cr�ent entre les uns et les autres.
En t�te du cort�ge, huit adolescents portaient une banderole "Sulidarit�", suivis des �pouses des prisonniers portant des portraits de leurs maris et des �lus de Corsica Nazione, qui ont annonc� jeudi qu'ils ne si�geraient plus � l'assembl�e territoriale "jusqu'� nouvel ordre".
Cet agencement est un progr�s dans l�organisation d�une manifestation. En temps ordinaire, les protestataires d�filent tristement derri�re une banderole (quand il y en a une) donnant tr�s rapidement � la protestation l�allure d�un enterrement. Les Corses ont pris exemple sur les manifestations basques. De plus en plus d��changes ont, en effet lieu avec les organisations de soutien aux prisonniers basques. Des rencontres se sont multipli�es entre Indipendenza et Batasuna au point que les policiers ont un moment pens� qu�Yvan Colonna aurait pu se cacher en Pays Basque.
Figuraient dans la foule des militants de la premi�re heure, ainsi que des jeunes portant des T-shirts sur lesquels on pouvait lire "On a tous h�berg� Yvan" et son corollaire en langue corse (un vieil Ajaccien nous a signal� une �norme faute d�orthographe sur le tee-shirt en langue corse), en r�f�rence aux personnes mises en examen au lendemain de l'arrestation d'Yvan Colonna, le 4 juillet.
Des drapeaux � t�te-de-maure et aussi l'embl�me du FLNC �taient brandis ici et l� tandis que fusaient quelques slogans "I.F.F." I francesi fora" (les Fran�ais dehors).
Tout au long du parcours, les manifestants, bafouant la pr�somption d�innocence d�Yvan Colonna, ont scand� "Yvan, Yvan, Yvan" tapant dans leurs mains et des cris "Libert�" (libert�) ont retenti � l'approche de la pr�fecture.
Des incidents en fin de manifestation
Vers 20H00, apr�s l'appel � la dislocation du rassemblement, une centaine de manifestants, plut�t jeunes et pour certains encagoul�s, ont lanc� des pierres, des bouteilles et des fumig�nes en direction des forces de l'ordre. Celles-ci, mass�es devant le commissariat de police et la pr�fecture, ont r�pliqu� par l'envoi d'abondants gaz lacrymog�nes, mais sans charger. Les consignes semblaient �tre strictes : surtout �viter le contact. C�est d�ailleurs selon nos informations ce qui a permis d��viter des drames quelques-uns de ces manifestants �tant venus arm�s.
Malgr� les pr�visibles d�n�gations d�Indipendenza concernant ce point pr�cis, beaucoup de ces jeunes appartenaient aux structures de la jeunesse ind�pendantiste et prenaient leurs ordres chez leurs � a�n�s �. Ils sont venus avec des projectiles, des p�tards transform�s en engins explosifs. Nous savons qu�il y a eu des discussions avec les � adultes � qui ont donn� leur accord � des incidents. Ils ne pouvaient toutefois appara�tre � la t�te des jeunes, faute de se d�consid�rer aupr�s des nationalistes mod�r�s � qui ils avaient promis le calme.
Le but de ces jeunes �tait d�attirer les forces de l�ordre dans les petites rues, de les pousser � matraquer sans discernement et �ventuellement d�aller plus loin dans la riposte. Le sang-froid des policiers et gendarmes n�a pas permis � ce sc�nario de se d�rouler et c�est tant mieux.
Des manifestants ont saccag� puis incendi� une voiture de police, en criant "FLN". D'autres br�laient des poubelles au milieu de la chauss�e ou s'en prenaient � une agence de la Banque populaire proven�ale et corse, endommag�e par un incendie. � quelques dizaines de m�tres de l�, des touristes d�naient en terrasse, mais tous les magasins qui devaient rester exceptionnellement ouverts pour le d�but des soldes avaient baiss� le rideau. Le calme est revenu dans le centre vers 22H00.
Derri�re les mobilisations l�ombre de la clandestinit�
Le porte-parole du CAR, Jean-Marie Poli, a pr�sent� comme un grand "succ�s populaire" cette manifestation "pour dire le ressentiment de tout un peuple, �c�ur� par la fa�on dont il est trait�". "Des non-nationalistes sont venus manifester parce qu'ils n'ont pas accept� le verdict" du proc�s Erignac, estimait Jean-Christophe Angelini, porte-parole du Parti de la Nation corse (mod�r�), d�ordinaire mieux inspir�.
La manifestation �tait organis�e deux jours apr�s le retrait "jusqu'� nouvel ordre" des �lus de Corsica Nazione de l'assembl�e de Corse et au lendemain d'un communiqu� du FLNC Union des Combattants revendiquant une vingtaine d'attentats et annon�ant une rupture de la "tr�ve" de ses "actions militaires".
"La tr�ve de nos actions militaires a pris fin le 11 juillet 2003", avait affirm� le groupe clandestin arm� dans un communiqu� d'une page re�u en fin de journ�e par Radio Corse Frequenza Mora (Radio France). C'est ce jour-l� qu'ont �t� condamn�s, � des peines allant jusqu'� la perp�tuit�, huit nationalistes jug�s pour l'assassinat du pr�fet Claude Erignac par la cour d'assises sp�ciale de Paris. Ce verdict a �t� qualifi� d'"inique" par les principaux responsables nationalistes.
Le FLNC-Union des Combattants, consid�r� comme proche des mouvements Corsica Nazione et Indipendenza, avait d�cr�t� une "suspension effective de ses actions politico-militaires" le 13 d�cembre 2002, dans le but apparent de donner une chance au dialogue politique relanc� par le gouvernement et son ministre de l'Int�rieur Nicolas Sarkozy.
Le mouvement avait revendiqu� les attentats les plus violents perp�tr�s ces derni�res semaines. Il s'agissait notamment de celui qui avait fortement endommag�, en plein jour, le bureau de poste de Folelli (Haute-Corse) lundi dernier � l'heure de l'intervention t�l�vis�e du pr�sident Jacques Chirac. Parmi les autres b�timents publics vis�s, figurent les tr�soreries d'Ajaccio et de Sart�ne (Corse-du-Sud), une caserne et la gendarmerie de Borgo, pr�s de Bastia. Le groupe avait �galement endoss� des attentats contre des biens appartenant � des hauts fonctionnaires en poste dans l'�le, notamment le directeur r�gional de la Poste ou un responsable du Tr�sor public.
Il avait �galement vis� dix villas, la plupart appartenant � des personnes domicili�es sur le continent. Dans ce d�compte se trouvent les quatre r�sidences secondaires qui ont �t� souffl�es � Tiuccia (Corse-du-Sud) quelques heures apr�s le r�sultat du r�f�rendum et attribu�e au groupe d�Ajaccio qui avait �galement plastiqu� la voiture d�un commissaire des RG et les villas de deux responsables du CRESP.
On note en Corse l�humour du FLNC Union des Combattants qui rompt une tr�ve en revendiquant 18 attentats perp�tr�s� avant la dite tr�ve.
Pour faire bonne mesure, le lendemain, et pour donner corps � l�id�e de solidarit�, deux r�sidences secondaires inoccup�es appartenant � des Italiens �taient partiellement d�truites.
La premi�re villa, en construction, �tait situ�e � Galeria, sur la c�te occidentale de l'�le, la seconde, aux marines de San Ambroggio, non loin de Calvi, a subi de tr�s gros d�g�ts.
Un changement de situation ?
Il est rassurant que les nationalistes cherchent � donner � leur manifestation une grande ampleur. Il semblerait que le courant unitaire l�emporte en son sein. Ce courant est dispos� � faire des concessions aux � mod�r�s � de mani�re � aller ensemble aux territoriales de 2004. Ces concessions seront essentiellement quantifi�es en termes humains. La parit� et l�union pourraient provoquer la col�re de bien des dirigeants d�Indipendenza. Un homme comme Fran�ois Sargentini ne cache plus ses ambitions. Jean-Guy Talamoni a sa place de droit. Tout comme Quastana. Mais les autres� Et tous ces dirigeants tels que Pierre Poggioli, Jean Biancucci, Edmond Simeoni qui d�sirent plus que tout au monde retrouver leur si�ge � l�Assembl�e. L��criture est d�ailleurs devenue un tremplin pour leaders nationalistes corses au ch�mage. Edmond Simeoni a sorti le sien sous forme d�entretiens avec un vieux cheval de retour de l�autonomisme, Pierre Dottelonde, auteur d�un bon ouvrage dat� sur Aleria. Pierre Poggioli a annonc� la sortie du sien sans qu�on en connaisse le contenu. Il ne reste plus � Jean Biancucci � se tailler une plume et d�entamer � son tour un ouvrage. Mais plus que ces querelles de chef, un �l�ment nouveau pourrait emp�cher le FLNC Union des Combattants d�aller trop loin dans la violence. Ce sont les recours en annulation d�pos�s par Jean-Guy Talamoni et un responsable corsiste, Toussaint Luciani. Apr�s le d�pouillement de toutes les listes d��margement, travail de titan accompli dans la r�gion de Bastia et de Furiani par Edmond Simeoni et ses camarades, et par Toussaint Luciani dans la r�gion ajaccienne il appara�t qu�environ 6500 votes sont douteux. Le recours, selon les nationalistes, a des chances de l�emporter d�autant que cette fraude a �t� commise dans des endroits o� le � oui � a �cras� le � non �. Elles ont �t� constat�es dans des bureaux o� des personnes sont connues pour pratiquer de telles m�thodes et toujours au profit des m�mes causes : celles qui ont pr�n� le � non �. Ceux qui ont port� le probl�me devant le Conseil d��tat entendent que cette fois-ci il y ait des condamnations au p�nal afin de servir d�exemple. Il y a un an la Ligue des droits de l�homme avait effectu� un travail de pointage en s�appuyant sur les constatations faites par un certain nombre de personnes lors des scrutins pr�c�dents.
Les personnes qui accusent aujourd�hui les partisans du � non � de tricherie sont persuad�es que, sans elles, le � oui � aurait gagn� puisque seulement 2000 voix s�paraient les deux camps au profit du � non �. Elles d�signent plus particuli�rement les amis de M. Zuccarelli, r�put�s dans l��le pour leur habilet� � truquer les scrutins. � On ne peut parler de d�mocratie quand la triche atteint un tel niveau, accuse un nationaliste. Et c�est l� la principale raison de la violence. Que l�on en finisse avec ma fraude.
Les nationalistes se rendront alors au verdict des urnes. Nous l�avons d�j� dit cent fois. Nous n�avons pas l�intention de prendre le pouvoir par un putsch. Mais si demain, nous allons unis dans un cadre �lectoral propre, nous ferons la d�monstration que nous sommes le premier parti de Corse. �
Si les faits de fraude �taient av�r�s, Nicolas Sarkozy pourrait trouver l� une excellente mani�re de se sortir du gu�pier corse et de remettre en marche la r�forme institutionnelle sans laquelle tout est bloqu� dans l��le. Les clandestins pourraient trouver dans cet atermoiement une raison de ne pas laisser filer la violence jusqu�� l�extr�me.
Autre petit fait nouveau : Nicolas Alfonsi et �mile Zuccarelli ont renonc� � demander l�alignement de la loi �lectorale sur la norme continentale. La Corse va donc vraisemblablement conserver les crit�res anciens : 5% des votants pour aller en second tour et prime � la meilleure liste de 10%. Toutes les listes ont donc leur chance d��tre repr�sent�s ce qui diminue d�autant le nombre de ceux qui ont int�r�t � une reprise de la violence.
Mais les clandestins craignent d�sormais la r�pression. Ils sont en effet persuad�s (� juste titre) que depuis 1998, police et gendarmerie ont accompli des progr�s gigantesques dans la connaissance des structures clandestines. Elles ont notamment cess� de croire comme la DNAT en 1998, qu�il s�agissait d�un mouvement fortement structur�. Elles savent que le FLNC agit par secteur tr�s autonomis� et que le nombre de ses militants actifs n�exc�de pas la soixantaine. La plupart des noms ont �t� cit�s lors des proc�s-verbaux de militants interrog�s. Il est d�ailleurs curieux que les policiers aient mis autant de temps � coincer un Yvan Colonna cens� �tre en Corse.
Aujourd�hui, en cas de r�pression forte, le FLNC ne r�sisterait gu�re plus de six mois. En 1986 d�j�, plus de cent militants avaient �t� arr�t�s par les hommes de Charles Pasqua et il avait fallu le retour de la gauche pour sauver le FLNC de la catastrophe. Mais cette faillite militaire, traduite par des meurtres, ajout�e deux ans plus tard � un mouvement des fonctionnaires dont �taient exclus les nationalistes, avait pr�cipit� la scission du mouvement (l�ANC en septembre 1989 puis la scission des deux FLNC en 1991).
Enfin, beaucoup de militants ont aujourd�hui la cinquantaine voire plus et n�ont pas envie de passer le reste de leur vie en prison. La duret� des peines inflig�es ces derniers temps les effraient surtout depuis qu�ils savent qu�ils ont peu de chances de conna�tre une nouvelle amnistie. C�est pourquoi ils entendent remettre sur la table la question du transfert des prisonniers � Borgo. C�est toujours mieux que rien en cas d�incarc�ration.
L�horizon s�est donc �clairci avec cette accusation de fraude qui d�montre une fois de plus que la clandestinit� n�est qu�un moyen pour un mouvement sans chef d�acc�der � des postes de notables. C�est �galement le signe d�une soci�t� totalement bloqu�e qui ne parvient � avancer que gr�ce � la violence. L�inconnu est du c�t� du FLNC 3 et de ses ambitions.
Pour l�instant on peut s�attendre � des destructions massives de biens immobiliers. On peut notamment raisonnablement mettre sur le compte du FLNC Union des Combattants les plasticages d��difices publics � Nice. Si cette hypoth�se �tait la bonne, cela voudrait dire que le FLNC Union des Combattants a d�cid� de mettre la pression sur le gouvernement en agissant sur continent ce qui devrait d�clencher une vive r�action de Nicolas Sarkozy, d�fi� sur ses propres terres.
Le conseil d��tat va devoir rendre sa copie le plus rapidement possible. Nicolas Sarkozy, en homme avis�, a d�ores et d�j�, affirm� qu�il tiendrait ses promesses, tarissant ainsi la piste agricole.
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