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POURSUITES JUDICIAIRES ET RIFIFI AUTOUR DE " REVELATIONS " ET CLEARSTREAM
Il y a comme un air de rififi entre les deux auteurs du fameux livre " R�v�lation$ " qui stigmatisa, il y a un an, les agissements ill�gaux en mati�re de blanchiment de la soci�t� de clearing bancaire �tablie � Luxembourg, Clearstream. Un livre qui aboutit d'ailleurs rapidement � la mise hors circuit du patron de la soci�t� luxembourgeoise, Andr� Lussi, d�fendu corps et �me par la presse socialiste luxembourgeoise sous la f�rule de l'homme de main de Nadhmi Auchi, Jacques F. Poos, ex vice-Premier ministre luxembourgeois et dont les cons�quences finales sont aujourd'hui la vente conclue de Clearstream aux int�r�ts allemands.
Un bouquin qui a donc fait bouger les choses, on peut le dire. Et dont les listings de comptes non publi�s de banques � travers le monde et qui servent parfois � blanchir autant l'argent de la mafia russe que du trafic d'armes, figurent d'ailleurs en grande partie sur le site internet de " L'investigateur ", http:://www. investigateur.ms.
Le diff�rend entre les deux auteurs, Ernest Backes, le Luxembourgeois, � la base de la formidable documentation ayant servi � confectionner ce livre cr�dible et Denis Robert, le journaliste-�crivain fran�ais sp�cialiste d'une investigation s�rieuse, mais feutr�e et soft, s'est concr�tis� le mois dernier, lorsque Backes, enfin remis de sa longue et dangereuse maladie du c�ur (quadruple pontage coronarien), a pu enfin affronter les plaintes d�pos�es contre lui au Luxembourg par Clearstream et Lussi, alors que Robert, qui n'est singuli�rement pas attaqu� judiciairement au Luxembourg, doit se d�fendre contre plusieurs plaintes devant les tribunaux parisiens. (Backes est un ancien employ� de la Cedel, l'appellation ant�rieure de Clearstream). Alors que d'habitude, deux auteurs d'un m�me livre restent solidaires quand il s'agit d'affronter la justice, Backes, dans le cas pr�sent, a d�rog� � cette r�gle non �crite et a d�voil� qui a fait exactement quoi lors de la r�daction de " R�v�lation$ ". Ceci �videmment (lire les conclusions de l'avocat de Backes dans les pages suivantes) pour am�liorer sa d�fense devant le tribunal correctionnel luxembourgeois. Mais on ne peut pas en vouloir � Backes. En lisant le livre, on s'aper�oit tr�s vite, de par la forme du " Je " employ�e constamment, que c'est Denis Robert qui a r�dig� la partie narrative du livre, car il n'a cesse de raconter ses contacts avec Backes et de relater la progression de " son " enqu�te avec son " informateur " luxembourgeois.
Par ailleurs, d�s la r�daction de " R�v�lation$ ", les premi�res frictions eurent bien lieu entre les auteurs. L'enqu�te de " L'investigateur " a constat� que Backes s'est oppos� de temps en temps et pr�cis�ment une fois � la publication d'une information qui semblait capitale � Denis Robert. Ce dernier, comme il le conc�de d'ailleurs, a outrepass� le veto de Backes et inclus le chapitre dans le livre sign� par les deux auteurs. Il n'est donc que l�gitime que le Luxembourgeois, poursuivi sur exactement ce point au Luxembourg, se d�fende en disant la v�rit�.
Les relations sont aujourd'hui assez tendues entre les deux hommes. Caract�riellement tr�s oppos�s, tr�s diff�rents �galement dans leur fa�on d'approcher probl�mes et probl�matique, ils sont n�anmoins oblig�s de s'entendre face aux innombrables poursuites judiciaires contre lesquelles ils doivent d�j� se d�fendre, chacun de son c�t� (la tactique des banques et de Clearstream est tr�s mondialiste et tr�s organis�e). Etant �vident que c'est le journaliste Robert qui est en premier lieu d�pendant de l'informateur Backes qui dispose de la majorit� des preuves ayant conduit aux accusations du livre.
Il n'y a qu'� esp�rer que le front commun des deux auteurs tienne encore longtemps et qu'ils sachent chacun mettre de l'eau dans leur vin. Car au del� de leur livre, c'est le m�canisme qu'ils ont mis en route qui ne doit pas souffrir de querelles bilat�rales.
LA STRATEGIE DEFENSIVE D'ERNEST BACKES FACE AUX ATTAQUES DE CLEARSTREAM
permis aux parties d'attribuer dans la convention sociale, aux d�l�gu�s, tous les pouvoirs g�n�ralement quelconques ou m�me une partie de ces pouvoirs, les plus particuli�rement importants ? Nullement. "
pour ensuite retenir que
" D'une mani�re th�orique, on peut dire que la gestion journali�re consiste dans l'accomplissement des actes qui ne sont que l'ex�cution quotidienne de la ligne de conduite trac�e par le conseil. "
Il s'agit en l'occurrence de la m�me formule que de celle employ�e dans l'arr�t de notre de Cour d'appel de 1929. L'auteur belge continue :
" Le directeur est donc plus agent d'ex�cution qu'un repr�sentant charg� de prendre des d�lib�rations. Il ne faut croire cependant que le directeur ne puisse jamais prendre personnellement de d�cisions ; il a ce pouvoir � la condition que ses d�cisions ne soient en quelque sorte que la suite et la cons�quence de d�cisions prises ant�rieurement par le conseil ; en d'autres termes, toute initiative v�ritable lui est refus�e, car c'est le conseil qui � l'administration de la soci�t� et qui en porte vis-�-vis de celle-ci la responsabilit�. "
La Cour de cassation belge entend par gestion journali�re, le pouvoir d'accomplir des actes d'administration ne d�passant pas les besoins de la vie quotidienne de la soci�t� ou qui, en raison tant de leur peu d'importance que la n�cessit� d'une prompte solution ne justifient pas l'intervention du conseil d'administration lui-m�me. En fait, tout d�pend de l'objet social, de la dimension de l'entreprise, du capital social, de la nature juridique des actes � accomplir et de leur importance �conomique. C'est aux tribunaux qu'il appartient d'appr�cier dans chaque cas d'esp�ce et a posteriori si un d�l�gu� a pu valablement ou non accomplir une op�ration d�termin�e.
Dans le contexte des actions judiciaires, on lit souvent le conseil suivant : " il est toujours souhaitable que le conseil d'administration approuve explicitement au cours d'une r�union du conseil toute d�cision d'intenter une action en justice ". Le Conseil d'Etat examine m�me d'office si une soci�t� anonyme a agi r�guli�rement en justice et �carte formellement du domaine de la gestion journali�re les actions en justice en retenant qu'en ce qui concerne l'article 54 des lois coordonn�es sur les soci�t�s commerciales, il y a lieu de distinguer clairement deux pouvoirs : d'une part, le pouvoir de repr�senter la soci�t� dans l'instance et, d'autre part, le pouvoir de d�cider d'intenter une action judiciaire. S'il peut ressortir des statuts que l'administrateur d�l�gu� a le pouvoir de repr�senter la soci�t� au proc�s, le pouvoir m�me de d�cider d'intenter un proc�s, d�cision qui n'est en aucun cas � qualifier d'acte de gestion journali�re, est r�serv� au conseil d'administration.
Ainsi, la jurisprudence belge � ce sujet rappelle constamment que la d�cision d'exercer un recours appartient au seul conseil d'administration ou � un ou plusieurs administrateurs agissant en vertu d'une clause statutaire. Les d�cisions ne cessent de rappeler qu'en vertu de l'article 54, alin�a 4, les statuts peuvent toutefois conf�rer � un ou plusieurs membres du conseil d'administration le pouvoir d'agir comme repr�sentant en justice, mais non le pouvoir de d�cider d'ester en justice, pouvoir qui, en vertu de l'article 54 alin�a 1er, incombe exclusivement au conseil d'administration.
Un arr�t tr�s r�cent du Conseil d'Etat belge (22 d�cembre 1999) rappele d'ailleurs pour la n-i�me fois que " la d�cision d'introduire un recours en annulation devant le Conseil d'Etat n'est pas une acte de gestion journali�re. " L'arr�t pr�cise encore qu'il appartient � la soci�t� requ�rante de fournir la preuve que la d�cision d'agir en justice a �t� prise en temps voulu et par son organe statutairement comp�tent. Ce qui vaut pour les recours administratifs vaut �videmment pour les actions judiciares en g�n�ral et plus particuli�rement pour les d�cisions graves telle celle de mettre l'action publique en mouvement par voie de citation directe.
A noter encore qu'on ne saurait consid�rer d'un acte de peu d'importance, n'entra�nant que peu de cons�quences pour la soci�t� - comme l'a fait implicitement Me Kleyr dans son avis pour qualifier la d�cision d'agir en justice de simple acte de gestion journali�re - le fait d'agir au p�nal et au civil contre les pr�tendus auteurs d'un livre publi� � travers toute l'Europe et faisant des vagues � l'�chelle mondiale.
Il est �vident que dans pareille hypoth�se, comme d'ailleurs dans tous les proc�s de presse, la publication mise en cause se voit attribuer une publicit� bien plus importante et r�p�titive encore, ces proc�s �tant �troitement suivis par la presse, abstraction faite de ce qu'une telle affaire judiciaire perdue (et on risque toujours de perdre un proc�s, surtout en mati�re de libert� de la presse) est certainement plus grave qu'une action non intent�e favorisant d'ailleurs l'oubli des imputations par lesquelles on se sent l�s�. Il en irait peut-�tre autrement d'ordonnances de paiement pour le recouvrement de petites sommes, mais telles sommes ne sont pas du domaine de la Clearstream. Vu les circonstances, on ne saurait consid�rer l'acte d'agir contre le livre R�v�lations (d'ailleurs � grande �chelle : � Luxembourg, � Paris et � Bruxelles) comme un banal acte de gestion journali�re. Il reste donc que Andr� Lussi ne pouvait valablement prendre la d�cision d'agir en justice de sorte que la citation directe est irrecevable.
Le dernier �chappatoire que voit l'avis de Me Kleyr n'est pas non plus op�rant. Il pense que la r�union du conseil d'administration du 28 juin 2001 - par le fait qu'aucun administrateur ne se soit plaint des initiatives personnelles de Lussi, fait qui reste � �tablir - ait pu ratifier ex post les d�cisions de l'administrateur d�l�gu� � la gestion journali�re. En effet, " lorsqu'un acte a �t� accompli dans un d�lai d�termin�, la ratification devra intervenir dans le m�me d�lai sous peine de rester inop�rante ; elle ne peut porter atteinte aux droits aquis des tiers. Ce serait le cas pour l'intentement d'une action en justice " . En d'autres termes : si une action en justice �tait � introduire dans un certain d�lai et que la ratification n'est pas intervenue dans le m�me d�lai, elle restera inop�rante. En l'occurrence, le d�lai pour introduire l'action est de trois mois (prescription abr�g�e de la loi sur la presse) � partir de la publication du livre, soit � partir du 1er mars 2001. Ce d�lai est �chu le 1er juin 2001. La r�union du conseil d'administration de Clearstream ayant eu lieu seulement le 28 juin, toute ratification �ventuelle �tait tardive et inop�rante. La question de savoir si oui ou non cette r�union ait pu v�hiculer une ratification �ventuelle et implicite des agissements de Lussi, entretemps chass�, n'est donc d'aucune pertinence.
La citation de Clearstream restera donc d�finitivement irrecevable sous cet angle.
A remarquer pour le surplus, qu'en l'occurrence, nous sommes en pr�sence d'une particularit� qui fait que Clearstream ne peut exciper de l'article 53, alin�a 3, deuxi�me phrase.
En effet, il est express�ment marqu� - mensong�rement - dans l'exploit que la soci�t� y est repr�sent� par son conseil d'administration. Ainsi, une d�cision du conseil �tait n�cessairement requise.
II. SUBSIDIAIREMENT : irrecevabilit� de la citation directe au regard des r�gles de proc�dure criminelle
A titre subsidiaire, et seulement pour le cas o� le moyen principal d'irrecevabilit� de la citation directe serait rejet�, le sieur Backes soul�ve l'irrecevabilit� de la citation directe de Clearstream Banking S.A. au motif que les faits d�f�r�s font actuellement l'objet d'une information pr�paratoire en cours et non encore cl�tur�e par une ordonnance de renvoi.
II.1. r�gles applicables
Une citation directe est exclue lorsque " le fait d�f�r� est d�j� soumis � une information pr�paratoire ". Dans tel cas " le tribunal ne peut �tre saisi que sous forme de renvoi d'une juridiction d'instruction " . Cette r�gle vaut pour le Minist�re public qui, " apr�s avoir saisi le juge d'instruction ne peut, � peine de nullit� de la proc�dure, abandonner la voie de l'information pr�paratoire et traduire directement devant le tribunal correctionnel une personne pr�venue de la m�me infraction, tant que la Chambre du Conseil n'a pas rendu une ordonnance �puisant sa juridiction " . Elle repose sur le principe que " quand une instruction a �t� ouverte sur le r�quisitoire du procureur, le droit de statuer sur l'intentement des poursuites appartient exclusivement � la juridiction d'instruction ", la loi entendant " qu'une personne ne soit traduite devant la juridiction de jugement qu'apr�s que la juridiction d'instruction a d�cid� qu'il y a lieu de poursuivre cette personne et a ainsi d�livr� � la partie poursuivante un permis de citer " . La r�gle est encore dict�e par le principe qu'en cas de non-lieu prononc� suite � l'information judiciaire, toute citation, qu'elle �mane du Parquet ou de la personne se pr�tendant l�s�e, est irrecevable . La r�gle vaut d�s lors a fortiori pour la partie se pr�tendant l�s�e et dont le droit de mettre en mouvement l'action publique est " un droit exceptionnel qui doit �tre strictement renferm� dans les limites fix�es par le code d'instruction criminelle" . Il tombe en effet sous le sens que si le Minist�re Public n'a plus le droit de mettre en mouvement l'action publique - d�j� engag�e par la saisine du juge d'instruction - par voie de citation devant le tribunal correctionnel, la partie se pr�tendant l�s�e s'en trouve pareillement d�pourvue. Ainsi la citation directe par la partie se pr�tendant l�s�e " n'est pas recevable quand l'action publique a d�j� �t� mise en mouvement par la saisine du juge d'instruction " . Ce principe est depuis longtemps fermement ancr� dans notre droit : la voie de la citation directe par la personne se pr�tendant l�s�e " n'est ouverte qu'en l'absence de poursuite du minist�re public. Si une instruction est ouverte, la voie de la citation directe n'est plus permise " . Le juge d'instruction �tant saisi in rem, il suffit pour rendre irrecevable la citation directe que les faits soumis � l'instruction soient les m�mes que ceux gisant � la base de la citation directe, quelles que soient les personnes morales ou physiques ayant le cas �ch�ant initi�, par leur plainte, l'ouverture de l'instruction.
II.2. Application � l'esp�ce
base factuelle
Le sieur Backes se trouve actuellement sous le coup d'une information judiciaire ouverte contre lui et contre inconnu suite � un r�quisitoire du Minist�re Public du 1er mars 2001 " du chef de violation du secret professionnel, violation du secret bancaire (art.458), diffamation, calomnie, vol, recel ". Le sieur Backes en a connaissance de par une ordonnance de perquisition et de saisie d�livr�e par le juge d'instruction Georges Oswald en date du 2 mars 2001. Il en a eu connaissance seulement en date du 19 septembre 2001, date de la perquisition � domicile. Les officiers de police judiciaire en charge de la perquisition ont recherch� au domicile de Monsieur Backes, toutes les pi�ces en relation avec CEDEL/CLEARSTREAM, plus particuli�rement les " microfiches ayant servi pour la r�daction du livre R�v�lations " (cf. pi�ces relatives � la perquisition). Les officiers ont saisi, � l'occasion, toutes les pi�ces et documents ostensiblement en rapport avec CEDEL/CLEARSTREAM (cf. proc�s-verbal de perquisition et de saisie). Dans la mesure o� jusqu'� l'heure actuelle, Monsieur Backes n'a pas encore �t� formellement inculp� par le juge d'instruction - il a seulement �t� entendu comme t�moin par le juge d'instruction Ernnest Nilles dans le cadre de l'information judiciaire ouverte contre Clearstream, respectivement, ses dirigeants - il n'a pas encore eu acc�s au dossier, de sorte qu'il ne peut pas informer le tribunal sur l'ensemble des faits soumis au juge d'instruction.
En cas de n�cessit� et pour autant seulement que les d�veloppements qui vont suivre ne paraissent pas suffisamment probants, il appartiendra au Parquet d'informer le tribunal et les parties sur l'envergure de la saisine du juge d'instruction et de produire toutes les pi�ces requises faisant foi de ces informations - la d�fense du sieur Backes ne se contentera en effet pas d'affirmations, mais exige des preuves. Ne doutant pas que l'ouverture de cette instruction doit r�sulter d'une plainte, il appartiendra notamment au Parquet de fournir copie de cette derni�re, ce qui permettra d'avoir une id�e des faits soumis � instruction. Cependant, il ne fait d'office aucun doute, au regard de l'ordonnance de perquisition et de saisie et du proc�s-verbal avec inventaire de la perquisition, qu'il s'agissait de trouver toutes les pi�ces en relation avec Cedel/Clearstream et le livre R�v�lation$. Il est �galement constant en cause qu'il s'agit de faits susceptibles de constituer le d�lit de diffamation ou de calomnie. En effet, les chefs d'inculpation mentionnent expressis verbis les pr�ventions de la diffamation et de la calomnie, � nouveau en relation incontestable avec la parution du livre R�v�lation$. La saisine � tel point large du juge d'instruction doit n�cessairement englober les faits � la base de la citation directe de Clearstream.
Enfin, si Monsieur Backes ignore l'identit� officielle du plaignant � l'origine de l'information ouverte contre lui, il ne reste pas moins que des rumeurs, confirm�es par d'autres �l�ments de fait, donnent sur la vraisemblance que c'est la Banque G�n�rale du Luxembourg qui a d�pos� plainte et ainsi engag� l'ouverture de l'information sur les faits faisant l'objet de la plainte. Or, la Banque G�n�rale a pr�cis�ment et exclusivement mis en cause les passages du livre R�v�lation$ relatifs aux op�rations dans le cadre de l'affaire BCCI. Ceci r�sulte du communiqu� de presse de la Banque G�n�rale du 5 mars 2001 exposant les motifs et les objets de sa plainte (communiqu� vers� aux pi�ces). Le communiqu� par lequel la BGL " d�ment cat�goriquement les accusations port�es contre elle dans le livre R�v�lation$ " et qu'elle sous-titre " Les transferts incrimin�s ont �t� effectu�s en toute l�galit� dans l'int�r�t de tous les cr�anciers de la BCCI " porte exclusivement sur les passages du livre en relation avec les transferts de la BCCI vers un compte de la BGL (BGLCLIEN) et critique les m�mes passages (ce sont les seuls qui sont critiqu�s) que ceux faisant l'objet de la citation directe de Clearstream.
cons�quences
En raison des r�gles et principes d�velopp�s ci-avant, la citation directe de Clearstream doit �tre d�clar�e irrecevable.
Elle a en effet �t� introduite :
- apr�s ouverture de l'instruction (1er mars 2001) ;
- pour les m�mes faits ;
- aucun renvoi n'ayant �t� prononc� jusqu'� l'heure actuelle (vu l'absence d'inculpation � l'heure actuelle, cela risque d'ailleurs de durer !).
Subsidiairement, si le tribunal ne s'estimait pas suffisamment renseign� pour d�clarer d'office irrecevable la citation directe � ce sujet, le sieur Backes demande au tribunal :
d'enjoindre, avant tout autre progr�s en cause, au Minist�re Public de communiquer au tribunal et aux parties copie du r�quisitoire introductif du 1er mars 2001 et de la plainte � l'origine de l'information judiciaire en r�servant aux parties tous autres droits et moyens � faire valoir sur base des documents � fournir.
A noter encore que Monsieur Backes ignore pareillement si Clearstream est, � c�t� de la BGL (ou au lieu de la BGL) l'initiateur de l'information et si oui : si cette plainte a �t� faite avec constitution de partie civile de Clearstream ; et, si non : si entretemps, Clearstream s'est constitu�e partie civile devant le juge d'instruction dans le cadre de l'information judiciaire en cause.
La connaissance de la r�ponse � ces questions est importante car, dans ces cas, la citation directe de Clearstream serait encore irrecevable de ce chef. Il appartiendra donc �galement au Minist�re Public de fournir cette information au tribunal. Injonction � ce sujet est donc �galement demand� par le sieur Backes.
III. A TITRE TRES SUBSIDIAIRE : moyen tir� de l'article 16, alin�a 3 de la loi sur la presse
III.1 les principes
L'article 16, alin�a 3 de la loi sur la presse dicte qu' " Avant de s'occuper du fond, le tribunal d�cidera si la personne pr�sent�e comme auteur du d�lit l'est r�ellement. L'imprimeur, l'�diteur et le distributeur seront toujours maintenus en cause jusqu'� ce que l'auteur ait �t� judiciairement reconnu comme tel. " Notons d'embl�e pour la bonne compr�hension de ce qui va suivre que Monsieur Backes n'a pas r�dig� les passages incrimin�s par la citation directe. Nous d�velopperons les faits apr�s avoir rappel� le droit applicable. Dans la mesure o� la question de savoir si le cit� est r�ellement l'auteur des passages incrimin�s doit �tre v�rifi�e avant tout d�bat au fond, nous estimons qu'il s'agit d'une question de recevabilit� de la citation directe. A d�faut il s'agit pour le moins d'une question de fond primaire donnant le cas �ch�ant sur un acquittement pur et simple sans que le fond proprement dit ne puisse �tre abord�. On ne saurait en effet exiger d'une personne de se d�fendre de reproches envers des agissements d'autrui, de prouver la v�racit� de propos �crits par autrui, ou encore d'�tablir son absence d'intention malveillante pour un acte d'autrui. L'adjectif " r�ellement " a toujours �t� interpr�t� de fa�on stricte par les juridictions. M�me si un article de presse ou tout autre �crit rendu public porte l'indication du nom d'un auteur d�termin� et connu (donc pas un pseudonyme), le tribunal a le devoir de v�rifier si l'auteur indiqu� comme auteur l'est r�ellement, c'est-�-dire s'il est personnellement le r�dacteur du texte incrimin�. Dans ce contexte le tribunal, m�me en face de l'aveu de l'auteur, doit en appr�cier la sinc�rit� et la cr�dibilit� de cet aveu .
En effet, " ni la d�claration, ni l'aveu de la personne d�sign�e comme auteur ne constituent une preuve d�cisive ; en l'absence d'une pareille preuve, le juge doit se baser sur les pr�somptions fournies par les d�bats " . Reste � d�finir la notion d'auteur : " - Auteur - d�signe le cr�ateur intellectuel de l'�uvre : celui qui a con�u et r�alis� l'�crit " ; " C'est le r�dacteur qui est v�ritablement l'auteur " .
Ces d�finitions paraissent d'ailleurs �videntes en ce que les d�lits de presse ne constituent que la p�nalisation d'un abus de la libert� de la presse, donc de la libert� d'expression. C'est donc celui qui s'exprime, qui r�dige le texte incrimin�, qui doit �tre consid�r� comme auteur. Ainsi, ceux qui n'ont pas particip� � la r�daction du texte incrimin� �chappent totalement aux poursuites . N'oublions pas � ce sujet le plus �l�mentaire des principes de droit p�nal : chacun n'est tenu que de son propre fait. Ainsi en mati�re de d�lits de presse, chacun ne peut �tre coupable que de son �uvre propre .
La jurisprudence luxemborgeoise a toujours �t� particuli�rement claire � ce sujet. Elle a retenu que m�me si une personne constitue une source d'information privil�gi�e d'un journaliste qui, sur base de ces informations, a r�dig� son article, le journaliste doit �tre tenu comme seul responsable de ce qu'il a d�cid� de sa propre conscience d'admettre � la publication, le tri des informations lui soumises �tant de l'essence m�me de la profession de journaliste, sauf � la partie poursuivante de rapporter la preuve que l'informateur ait directement collabor� � la r�daction mat�rielle du texte incrimin�, ce qui �quivaudrait � un acte de corr�it� au sens de l'article 66 du Code p�nal . Il s'agit d'un arr�t relativement r�cent de notre Cour d'appel (1993) qui confirme une jurisprudence plus que centenaire et qui, comme nous allons le voir ci-apr�s, est applicable par analogie.
III.2. application � l'esp�ce
base factuelle
Une lecture m�me sommaire du livre R�v�lation$ donne sur quelques constats qui n'ont pu passer inapper�u � quiconque :
1.) le livre R�v�lation$ est divis� en trois parties ;
2.) la premi�re partie (page 9 - page 262) doit n�cessairement avoir �t� r�dig�e par Denis Robert, car il y raconte l'histoire de son enqu�te dans la forme purement subjective (en commen�ant par " j'ai rencontr� Ernest Backes voici quatre ans ").
Ensuite on constate :
3.) que les passages incrimin�s dans la citation directe sont extraits de cette premi�re partie (pages 152 -157 et intercalaire entre 190 et 191);
4.) que le texte m�me des passages incrimin�s �tablit qu'ils sont r�dig�s par Denis Robert qui �voque Ernest Backes comme tiers par rapport � son r�cit ;
5.) que Denis Robert utilise des citations de Ernest Backes pour compl�ter son texte et qu'il commente : le fait de proc�der � des citations (d'ailleurs entre guillemets) �tablit de nouveau que ce n'est pas Ernest Backes qui a r�dig� ces passages, mais Denis Robert qui cite Ernest Backes comme tiers.
Il faut donc s'�tonner de ce que :
1.) Clearstream s'attaque � Ernest Backes comme pr�tendu auteur de ces propos ostensiblement r�dig�s par Denis Robert (l� on pourrait l�gitimement penser que l'action � Luxembourg contre Ernest Backes n'est qu'un stratag�me pour intimider Ernest Backes en tant que source potentielle pour d'autres publications au sujet de Clearstream) ;
2.) que Clearstream cite seulement Backes et s'abstient de citer en justice (� Luxembourg) Denis Robert, auteur �vident des propos ;
3.) que Clearstream s'abstient de citer l'�diteur et l'imprimeur, alors que depuis l'existence de la loi sur la presse, on cite simultan�ment les auteurs pr�sum�s, l'�diteur et l'imprimeur en attendant la d�cision sur la question de savoir si la personne indiqu�e dans l'�uvre est r�ellement son auteur pour, le cas �ch�ant, mettre les autres cit�s hors cause.
Cette n�gligence de la part de Clearstream, peut-�tre voulue pour des raisons tactiques/strat�giques imp�n�trables, ne saurait emp�cher le tribunal d'examiner rigoureusement la question sous l'angle de l'article 16 alin�a 3 de la loi sur la presse et d'y attribuer la sanction incontournable.
Nous faisons remarquer un autre �l�ment �tonnant :
Il faut se rendre � l'�vidence que le vrai proc�s Clearstream contre le livre R�v�lation$ n'est pas plaid� ici, sur notre place financi�re : il se d�roule devant la Chambre de la presse du Tribunal de Grande Instance de Paris. En effet, Clearstream y a introduit une action civile gigantesque dans laquelle elle demande 4.800.000 francs (119.000 Euro) et o� elle met en cause non seulement les quelques passages autour des op�rations concernant l'affaire de la BCCI, (le seul volet dont Clearstream a saisi le tribunal correctionnel de Luxembourg), mais toute une panoplie de passages du livre.
Dans cette action, tous les passages incrimin�s sont tir�s de la premi�re partie du livre R�v�lation$, et, chose (pas tellement) curieuse : Ernest Backes n'y est pas assign� : on agit exclusivement contre Denis Robert, contre Editions Les Ar�nes et contre l'�diteur Laurent Beccaria. L�, on a donc indubitablement compris que Denis Robert est l'auteur de la premi�re partie du livre R�v�lation$ et plus particuli�rement des passages incrimin�s, notammment ceux relatifs � la BCCI: � croire que les parisiens ma�trisent mieux la lecture de la langue fran�aise.
Le Tribunal notera encore qu'au moment o� il est saisi des faits relatifs aux op�rations dans l'affaire BCCI, ces m�mes faits sont pendants devant le tribunal de Paris, mais l�, ces faits sont imput�s � Denis Robert et � l'�diteur.
l'attitude du cit� direct
Pour autant qu'on puisse encore en douter malgr� la formulation parlante des textes reproch�s, le sieur Backes conteste formellement �tre l'auteur des passages incrimin�s par la citation directe. Le livre R�v�lations est divis� en trois parties. La premi�re partie (pages 9-262) a �t� exclusivement r�dig�e par Denis Robert. La deuxi�me partie, � savoir celle intitul�e " Lexique " p. 263 - p. 400 a �t� finalis�e comme suit : Ernest Backes a r�dig� une version initiale. Cette version �tait trop longue selon l'avis de l'�diteur, de sorte que ce dernier a comprim� le lexique en l'abr�geant, c'est-�-dire en intervenant sur le texte initialement r�dig� par Ernest Backes. La troisi�me partie du livre intitul�e " Documents ", p. 401 - 443 est compos�e de pi�ces fournies en grande partie par Ernest Backes.
C'est pour ces contributions (draft du lexique, partie documents) que Ernest Backes figure comme co-auteur sur la page de couverture du livre R�v�lation$. Mais Ernest Backes tient � souligner de fa�on absolument formelle :
- qu'il n'est intervenu d'aucune mani�re ni dans la conception, ni dans la r�daction mat�rielle de la premi�re partie du livre ;
- que plus particuli�rement il n'est intervenu d'aucune mani�re dans la r�daction des passages incrimin�s par la citation directe ;
- qu'il n'avait pas non plus la charge ou la facult� de proc�der � une lecture du texte, voire, le cas �ch�ant, � une correction de ce dernier, avant publication. Il �tait clair d'embl�e que Denis Robert serait l'auteur exclusif de la premi�re partie avec tous les droits exclusifs et toutes les libert�s attenant � cette qualit�, droits et libert�s respect�s par Monsieur Backes.
Il est vrai que Monsieur Backes a sans doute servi d'informateur privil�gi� pour l'enqu�te de Denis Robert relat�e dans la premi�re partie du livre. Mais cela, conform�ment aux principes applicables, ne fait pas de lui l'auteur des passages incrimin�s.
En ce qui concerne la citation de propos �manant de lui, Ernest Backes pr�cise qu'en substance, ces citations correspondent probablement � ce qu'il a pu dire � Denis Robert au cours de l'enqu�te de ce dernier. Mais il tombe sous le sens :
- qu'il n'est pas responsable ipso facto � titre d'auteur d'un texte de presse si ce dernier, r�dig� par autrui, cite approximativement des propos �manant de lui - or, c'est uniquement pour ce fait et en cette qualit� (celle d'auteur) qu'il est cit� devant le tribunal sur base de la loi sur la presse;
- qu'en tant qu'�tranger � la r�daction mat�rielle de la premi�re partie, il n'a pas concouru � la publication de ses citations de sorte que toute culpabilit� � ce titre est exclue,
le tout �videmment sans pr�judice quant � une r�alit� de fond : les contenus des citations, � supposer qu'ils correspondent textu (et non seulement en substance) � ce qu'aurait dit Ernest Backes, ne sont aucun�ment susceptibles d'encourir une quelconque qualification p�nale et sont pour le surplus couvertes par la libert� d'opinion et d'expression.
*
Il est constant en la mati�re qu'en cas de contestation, la qualit� d'auteur doit �tre �tablie par la partie publique et/ou la partie civile. Le fait que le nom de Ernest Backes figure sur les pages de couverture est � ce �gard un �l�ment de fait totalement insuffisant au regard de la jurisprudence en la mati�re.Les r�gles strictes concernant la charge de la preuve restent donc applicables, ce d'autant plus que l'all�gation du cit� direct n'est pas d�pourvue de vraisemblance (cf. le principe de la pr�somption d'innocence et celui de l'indivisibilit� du fardeau de la preuve) au regard de la teneur des textes incrimin�s par lesquels il appara�t, d'office, qu'ils ont �t� r�dig�s par Denis Robert. N�anmoins, le sieur Backes verse � l'appui de ses contestations une attestation testimoniale de la part de Monsieur Denis Robert. Pour le surplus, et seulement pour autant qu'on saurait par impossible exiger de lui qu'il prouve son innocence et que l'attestation testimoniale soit � cet �gard insuffisante, le sieur Backes offre de prouver par t�moins qu'il n'est pas l'auteur de la premi�re partie (p.9 - 262) du livre R�v�lation$, qu'il n'a aucun�ment particip� � la r�daction de cette partie et qu'il n'est pas intervenu dans la conception et la r�daction mat�rielle du texte figurant aux pages 9 � 262 de R�v�lation$, et encore plus particuli�rement des passages incrimin�s dans la citation directe, et qu'il n'a contribu� d'aucune mani�re � la publication des citations approximatives de ses propos personnels.
Le cas �ch�ant seulement, les t�moins � entendre seraient les suivants :
1.) Denis Robert, �crivain, 23, rue de Bouteiller, F-57000 Metz
Laurent Beccaria, �diteur, F-75005 Paris, 33, rue Linne.
En fin du pr�sent chapitre, Ernest Backes tient � faire remarquer - que ce soit tr�s clair et afin que le pr�sent moyen ne donne pas lieu � toutes sortes de sp�culations publiques de la part de Clearstream qui s'acharne � discr�diter � tout bout de champs et par tous moyens le livre R�v�lation$, respectivement, pris individuellement, les auteurs des parties respectives, qu'il n'entend nullement se distancier du r�cit de Denis Robert. (un d�faut de distanciation d'un texte d'autrui, nous le savons depuis l'arr�t de la Cour europ�enne des droits de l'Homme dans l'affaire Marc THOMA, ne peut d'ailleurs engager une responsabilit� quelconque).
Seulement, au p�nal, Monsieur Backes ne saurait
1.) devoir se d�fendre contre les reproches relatifs � un texte qu'il n'a pas r�dig� ;
2.) �tre condamn� pour un texte d'autrui, soit-il calomnieux - quod non.
Ernest Backes demande donc au tribunal de constater sur base des �l�ments d'ores et d�j� constants et ceux �tablis par l'attestation testimoniale vers�e, la partie civile et le Parquet restant en d�faut d'�tablir qu'il est l'auteur des passages incrimin�s, qu'il n'est pas l'auteur des passages incrimin�s et partant :
principalement :
de d�clarer irrecevable la citation directe de Clearstream ;
subsidiairement :
de prononcer d'ores et d�j� et avant tout autre examen au fond l'acquittement pur et simple de Ernest Backes ;
tr�s subsidiairement :
et avant tout autre progr�s en cause : d'admettre l'offre de preuve par voie de t�moignages formul�e par Ernest Backes et refixer l'affaire � une audience ult�rieure � laquelle les t�moins seront appel�s et entendus ;
IV. A TITRE ENCORE PLUS SUBSIDIAIRE : moyen tir� de l'article 7 alin�a 3 de la loi sur la presse
IV.1. principes applicables
L'alin�a 3 de l'article 7 de la loi sur la presse stipule que " Si le fait imput� est l'objet d'une poursuite r�pressive ou d'une d�nonciation sur laquelle il n'a pas �t� statu�, l'action en calomnie sera suspendue jusqu'au jugement d�finitif, ou jusqu'� la d�cision d�finitive de l'autorit� comp�tente ". Ce texte veut qu'au cas o� les faits contenus dans les passages incrimin�s � titre de calomnie font l'objet d'une poursuite r�pressive au moment o� le tribunal est amen� � statuer sur le fond de la citation directe pour calomnie, l'action est suspendue, c'est-�-dire que le tribunal doit surseoir � instruire et � statuer au fond jusqu'au jugement d�finitif sur ces faits ou jusqu'� la d�cision d�finitive de l'autorit� comp�tente (ordonnance de non-lieu par la Chambre du conseil).
IV.2. Application � l'esp�ce
Il para�t qu'actuellement les r�v�lations contenues dans R�v�lation$ aient donn� lieu � l'ouverture d'une instruction contre Clearstream, respectivement contre plusieurs de ses dirigeants. L'envergure de la saisine du juge d'instruction n'est cependant pas connue par le cit� direct. Il r�sulte cependant d'un communiqu� de presse du 9 juillet 2001 �manant du Parquet �conomique et financier qu'une information judiciaire a �t� ouverte. Aux termes m�mes de ce communiqu�, l'ouverture de l'information a �t� conditionn�e notamment par le livre R�v�lation$ " mettant en cause la m�me Clearstream en all�guant que des manipulations et irr�gularit�s auraient �t� commises tant au niveau des comptes propres que des comptes clients ". Suivant le communiqu� du Parquet, une enqu�te pr�liminaire au cours de laquelle des personnes ayant �t� " en charge aupr�s de Clearstream au cours des derni�res 10 ann�es des Finances et de l'Informatique " ont �t� entendues et qu' " en pr�sence de ces indices graves, le Parquet a estim� indispensable de requ�rir l'ouverture d'une information judiciaire seule habilit�e et si n�cessaire moyennant recours aux mesures coercitives appropri�es, d'op�rer les v�rifications au niveau de la documentation et des archives disponibles au niveau de Clearstream " tout en ayant pr�alablement expos� qu'il s'agirait " de v�rifier si au niveau de Clearstream des infractions � la loi p�nale en g�n�ral et aux dispositions de lutte anti-blanchiment en particulier ont �t� commises ".
La saisine du juge d'instruction semble donc tr�s g�n�rale et reposer sur tous les faits rassembl�s au cours de l'enqu�te pr�liminaire, m�me si le Parquet fait remarquer dans le communiqu� qu'en cours d'instruction, il n'a pu �tre constat� qu'il y aurait eu des manipulations syst�matiques et que l'enqu�te (l'instruction ?) continuerait pour des faits isol�s, mais notamment pour des " manipulations au niveau des comptes propres relat�s par un certain nombre de personnes " en y ajoutant une phrase lourde de sens comme quoi l'infraction d'abus de biens sociaux ne serait punissable que depuis 1992, l'escroquerie fiscale que depuis 1993 et que jusqu'au 11 ao�t 1998, seul le trafic de stup�fiants �tait une infraction primaire du blanchiment punissable.
L'ouverture de l'instruction contre Clearstream, respectivement ses dirigeants, est donc en relation directe avec des faits divulgu�s dans le livre R�v�lation$. Il para�t donc probable que les op�rations dans l'affaire BCCI tombent sp�cifiquement (ou g�n�ralement par les enqu�tes au sujet des comptes non publi�s et les manipulations des comptes propres etc.) dans le champ des faits soumis au juge d'instruction saisi in rem. Il se peut donc que les faits pr�tendument imput�s dans les passages incrimin�s par la citation directe, ou partie d'eux, fassent actuellement l'objet de l'information judiciaire.Pour appliquer la loi, en l'occurrence l'article 7 de la loi sur la presse, article indubitablement d'ordre public, il appartient au tribunal d'examiner contradictoirement si les faits pr�tendument imput�s font l'objet de cette information judiciaire.
Le sieur Backes demande acte qu'il exige cette v�rification. N'ayant aucun acc�s au dossier MP / Clearstream, le cit� direct ne peut que demander au tribunal d'enjoindre, avant tout autre progr�s en cause et en vue de statuer sur un �ventuel sursis � statuer sur base de l'article 7 alin�a 3, au Parquet de communiquer l'int�gralit� du dossier de l'enqu�te pr�liminaire � l'information judiciaire et copie du r�quisitoire introductif du Parquet ayant donn� lieu � l'ouverture de l'information judiciaire. Seule telle communication pourra renseigner le tribunal et les parties sur l'ampleur de la saisine du juge d'instruction en vue de savoir si les faits pr�tendument imput�s font actuellement l'objet d'une poursuite r�pressive exigeant la suspension des poursuites engag�es par la citation directe contre Ernest Backes.
V. A TITRE D'ULTIME SUBSIDIARITE , sans reconnaissance pr�judiciable aucune, sous toutes r�serves et seulement � toutes fins utiles : offre de preuve
La d�fense du sieur Backes est d'avis qu'au regard des moyens ci-avant oppos�s, plus particuli�rement de celui � titre principal et, � tout le moins, de celui � titre subsidiaire, il n'y aura pas d'instruction ou de jugement au fond de l'affaire.
Ce n'est qu'� titre d'ultime subsidiarit�, sans la moindre reconnaissance pr�judiciable aucune, uniquement pour le cas o� Monsieur Backes, qui n'a pas r�dig� les passages litigieux , devrait prouver quoi que ce soit, et seulement pour ne pas risquer la forclusion de l'article 9 de la loi sur la presse exigeant que " la preuve sera offerte lors de la premi�re comparution devant le tribunal � peine de d�ch�ance " et nonobstant le principe applicable � l'esp�ce que l'offre de preuve ne doit �tre formul� par le pr�venu qu'� partir de l'audience � laquelle il reconna�t �tre l'auteur des passages incrimin�s et des imputations - quod non en l'esp�ce - que le sieur Backes formule la pr�sente offre de preuve.
La pr�sente offre de preuve intervient encore sous toutes r�serves et notamment moyennant contestation formelle
1.) du caract�re calomnieux ou diffamatoire des passages incrimin�s ;
2.) de la pr�sentation des propos qui sont imput�s � Ernest Backes et qui sont sortis de leur contexte pour �tre juxtapos�s, amalgam�s, comment�s abusivement et interpr�t�s faussement.
3.) pour partie des faits : de l'imputation � Cedel/Clearstream.
L'offre de preuve est encore formul�e sous r�serve expresse de soulever ult�rieurement tous moyens de fait et tous moyens de droit relevant des droits national et international relatifs � la libert� de la presse, � la libert� d'opinion et d'expression et plus particuli�rement ceux r�sultant de l'article 10 de la Convention Europ�enne des Droits de l'Homme et de la jurisprudence aff�rante de la Cour Europ�enne des Droits de l'Homme.
Enfin, l'offre de preuve intervient �videmment sous la r�serve expresse d'�tablir ult�rieurement la bonne foi, respectivement l'absence absolue du dol sp�cial consistant dans l'intention m�chante ou le dessein de nuire.
Sous r�serve de toutes ces pr�misses : le cit� direct Ernest Backes offre de prouver par toutes les voies de droit, notamment par voie de t�moignage et par la production de documents probants, pi�ces et attestations que la teneur des passages incrimin�s - ci-apr�s recopi�s textuellement selon la citation directe (les corrections pour conformer les reproches au texte exact du livre �tant indiqu�s en parenth�ses et soulign�es) - est v�ridique (v�racit� des faits imput�s - exceptio veritatis) :
" Revenons � la BCCI. Apr�s avoir pass� d'innombrables heures � recouper les donn�es et rechercher les virements, Ernest jubile. Il a trouv� ce qu'il cherchait. L'aiguille BCCI dans la meule de foin de Cedel. Il note, avec certitude, dans la journ�e du 8 ao�t 1991, une activit� sur le compte en Cedel de la banque pakistanaise. Cette activit� n'a rien � voir avec un remboursement de coupons de paiement � la firme d'un droit automatique de garde. Non, il s'agit d'un premier virement ill�gal.
En d'autres termes, un d�tournement de fonds puisque la banque est sous s�questre.
Le 8 ao�t 1991, alors m�me qu'Ernest �tait en grande discussion avec le Premier ministre Santer, une op�ration de retrait d'actifs a �t� liquid�e sur un des comptes en Cedel de la BCCI. Ce jour-l�, sur le compte n� 13935 au nom de la Bank of Credit and Commerce International Luxembourg, ont �t� d�bit�s cent cinquante-sept postes de valeurs mobili�res (en actions et en obligations) totalisant quelque 100 millions de francs fran�ais (environ 15 millions de dollars). L'ensemble de ces valeurs a �t� transf�r� vers un compte non publi� de Cedel : il s'agit du compte n� 32506 BGLCLIEN, de la Banque g�n�rale du Luxembourg.
La Banque g�n�rale du Luxembourg et Cedel, deux des plus importantes (institutions) financi�res de la place, pouvaient-elles ignorer la fermeture de la BCCI dans 73 pays dans le leur ? Leurs responsabilit�s (responsables) avaient-ils conscience du risque qu'ils couraient, en cas d'enqu�te, d'�tre poursuivis en tant qu'auteurs et coauteurs de " d�tournement de fonds et de banqueroute frauduleuse ? " "
Cedel " �tait n�cessairement au courant de la fermeture de la banque ".
" Gr�ce � ses microfiches, Ernest Backes poss�de aujourd'hui la preuve que la BCCI, banque mafieuse par excellence, a poursuivi ses activit�s malgr� l'interdiction d'exercer dont elle faisait l'objet. Celui qui prendrait le temps d'examiner les comptes des autres filiales de la BCCI qui adh�raient � Cedel d�couvrirait sans doute d'autres tr�sors. Mais il nous suffit de savoir que, trente et un jours apr�s sa fermeture, cette banque pouvait encore " servir " un cr�ancier et lui transf�rer des avoirs substantiels, au d�triment de dizaines de milliers d'autres cr�anciers l�s�s, qui eux, ne seront jamais rembours�s. C'est le signe d'une flagrante in�galit� de traitement. Pour quelles raisons a-t-on pris pareil risque � Cedel ? L'administration (L'administrateur) d�l�gu�, Andr� Lussi, �tait alors le seul dirigeant de la firme � pouvoir donner son accord pour de pareilles transactions. Une chose est s�re, ce n'est pas pour la r�mun�ration que rapporte ce type de transfert. Cedel n'a encaiss�, pour 157 transactions de type " 31 ", que 157 dollars en frais de transfert, soit un dollar par transaction. Une recette ridicule pour une telle prise de risque.
" J'ai trouv� mon aiguille, se r�jouit Ernest. Quant � la meule de foin contenant les autres aiguilles, je l'ai mise en botte et l'ai conserv�e chez des amis hors du Luxembourg. Je la donnerai au juge qui saura s'en servir � " "
" Les liquidateurs n'�taient pas encore nomm�s. Pour prendre un tel risque, il fallait que l'ordre vienne de tr�s haut � Dans cette op�ration trouble, l'administrateur d�l�gu� de Cedel a jou� au " cascadeur " pour quelqu'un d'autre. Le fameux compte " BGLCLIEN " qui a re�u l'argent devait �tre tr�s influent sur la place financi�re. Ou susceptible de garantir une impunit� totale.
A d�faut de pouvoir identifier les personnes physiques ayant profit� de cette transaction interdite, il est en tout cas certain qu'une telle op�ration chez Cedel n'a pu �tre effectu�e sans l'aval de l'administrateur d�l�gu� Andr� Lussi, garant du respect des lois et r�glements en vigueur au sein de la firme de clearing. "
" (�) la soci�t� de clearing a permis, dans la plus parfaite ill�galit�, des transferts de titres op�r�s par la Bank of Credit and Commerce International (BCCI) apr�s la mise sous s�questre des avoirs de cette banque. (�) "
Sous toutes les r�serves pr�c�demment pr�cis�es et sous toutes autres r�serves g�n�ralement quelconques, le cit� direct Ernest Backes demande au tribunal d'admettre la preuve de ces faits conform�ment � l'article 9 alin�a 1er de la loi sur la presse.
A noter encore que suivant ce texte et la jurisprudence aff�rente, ce n'est qu'apr�s le jugement admettant la preuve des faits imput�s - et devant intervenir avant tout autre progr�s en cause - que le cit� direct Backes aura � signifier, dans le d�lai de huitaine, au minist�re public et � la partie civile la copie des pi�ces dont il entend faire usage et les qualit�s des t�moins par lesquels il entend faire sa preuve.
* * * *
PAR CES MOTIFS
et tous autres � d�duire en plaidant et � suppl�er m�me d'office et sous la r�serve expresse et formelle de pouvoir changer, majorer ou modifier les pr�sentes conclusions en cours d'instance et suivant qu'il appartiendra, Ma�tre Pol Urbany, pour sa partie conclut � ce qu'il
PLAISE AU TRIBUNAL
A titre principal
d�clarer irrecevable la citation directe pour d�faut d'une d�cision du conseil d'administration et d�faut de pouvoirs de Andr� Lussi de prendre seul la d�cision de l'intenter ;
A titre subsidiaire
principalement constater qu'une information sur les m�mes faits est ouverte et d�clarer irrecevable la citation directe ;
subsidiairement et avant tout autre progr�s en cause, enjoindre au Parquet de communiquer le r�quisitoire introductif du 1er mars 2001 et la ou les plaintes � l'origine de ce r�quisitoire ;
enjoindre au Parquet de produire un document probant �tablissant que Clearstream n'est pas partie civile dans le cadre de cette information judiciaire contre Ernest Backes ;
A titre tr�s subsidiaire :
constater principalement que Ernest Backes n'est pas l'auteur des propos incrimin�s et d�clarer irrecevable la citation directe et renvoyer Ernest Backes des fins de la poursuite, sinon d�clarer malfond�e la citation directe et acquitter Ernest Backes ;
sinon donner subsidiairement acte � Ernest Backes de son offre de preuve � ce sujet telle que formul�e ci-avant dans les motifs et cens�e �tre reprise ici ; la d�clarer recevable et remettre l'affaire en vue de l'audition des t�moins ;
A titre encore plus subsidiaire
vu l'information judiciaire contre Clearstream ;
enjoindre au Parquet de verser avant tout autre progr�s en cause le r�quisitoire introductif y relatif et le dossier de l'enqu�te pr�liminaire en vue de v�rifier s'il y a lui de suspendre le jugement de la citation directe dans l'attente du sort de cette instruction ;
A titre d'ultime subsidiarit�
donner acte � Ernest Backes, sous les r�serves pr�cis�es dans les motifs ci-avant, de son offre de preuve ci-avant formul�e dans les motifs et cens�e reprise ici ;
sous les m�mes r�serves, admettre la preuve par voie de jugement avant tout autre progr�s en cause.
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