Lethier, D�d� la Sardine, Holzer... et les autres
20 milliards de francs�, dont 3,5 milliards de subventions publiques. C'est le c�ut que repr�senta, le rachat par Elf, de la raffinerie Leuna en ex RDA. Presque 300 millions de francs ont servi � ce qu'on appelle pudiquement le " lobbying ". En fait, � acheter et corrompre. Les deux b�n�ficiaires de ces 300 millions, l'Allemand Holzer et surtout le Fran�ais Lethier, ont toujours d�menti avoir revers� de l'argent. Les documents et auditions en possession de L'investigateur et qui �manent de la Justice suisse et fran�aise, prouvent le contraire. Et les juges, � Gen�ve et � Paris, se sont forg� une certitude au fil des ann�es d'enqu�te : de l'argent a �t� redistribu� sous forme de pots-de-vin, en Allemagne et en France et ce sont les services secrets fran�ais, via la DGSE et Pierre Lethier, qui ont r�parti les fonds.

Le 4 juin 1992, Pierre Lethier, 47 ans, est � l'origine de la constitution " par ordre personnel donn� � la soci�t� bancaire d'administration et priv�e " Verwaltungs- und Privatbank Vaduz " au Liechtenstein, d'une soci�t� d�nomm�e " Stand By Establishment Vaduz " et enregistr�e sous le num�ro 259.104. Le juge d'instruction genevois Paul Perraudin qui enqu�te dans l'affaire des centaines de millions d'Elf disparus entre autres via la Suisse et qui s'int�resse en particulier � l'ancien agent secret fran�ais qui r�side e.a.comme lui � Gen�ve, constate par �crit et en annotation : " soci�t� constitu�e � la demande de Pierre Lethier, pouvoir en faveur de Strub, Lethier et Holzer ".

C'est que le juge P�raudin, petit homme qui ne paye pas de mine, mais qui, tel une fourmi infatigable, n'a eu cesse de remonter � coups de demandes d'aide ou d'entraide, de perquisitions et de commissions rogatoires internationales, les circuits de l'argent suspect d'Elf, est arriv� au bout d'une liste exhaustive, appel�e " la tapisserie " dans le langage des initi�s et dont L'investigateur est parmi les premiers � avoir �t� en possession en �t� 2001. " Ce n'est qu'ainsi que je r�ussirai � comprendre le flux de l'argent d'Elf et surtout, les diff�rents chemins qu'il a pris ", nous confia le juge dans son bureau. Et P�raudin a compris.

Le 2 septembre 1991, le Corse Andr� Guelfi, encore appel� " D�d� la Sardine " et sa soci�t� Nobelpac Vaduz au Liechtenstein passent un �trange march� avec Sofax, la banque log�e � l'adresse d'Elf, dans la Tour de la D�fense, une banque qu'on retrouvera d'ailleurs en mars 2001 sur la liste des comptes non publi�s de la coop�rative bancaire de clearing " Clearstream ". Cet accord aboutit au virement, la veille de No�l 1992, de la coquette somme de 256 millions de francs sur le compte num�ro 39.370 ouvert le m�me jour ( !) de la soci�t� de Guelfi. 36 millions iront dans la minute sur les comptes de la soci�t� " Showfast Ltd Londres " du Cr�dit Suisse de Gen�ve " en faveur de Pierre Lethier ", comme le rel�ve Perraudin. Egalement au m�me moment, 220 millions de francs atterriront sur le fameux compte de la soci�t� �voqu�e plus haut, la " Stand By Establishment Vaduz ", constitu�e sept mois plus t�t par� Pierre Lethier.

Deux virements successifs, le premier d'un montant de 55,5 millions en date du 4 f�vrier 1993 et le second de 4,25 millions en date du 6 avril 1993, atterriront directement sur un compte " en faveur de Pierre Lethier " � Vaduz. Le reste de l'argent du lobbying rejoindra les comptes de diverses soci�t�s et instituts bancaires, en �troite relation avec l'autre agent secret de l'affaire Elf, Dieter Holzer ou encore l'Irakien Nadhmi Auchi via sa banque Paribas, sous mandat dans l'affaire Elf-Ertoil . Et l'argent qui a officiellement et selon les d�positions et de Lethier et de Holzer, constitu� leur r�mun�ration personnelle pour activit�s de lobbying dans l'int�r�t d'Elf et qui n'aurait donc par cons�quent jamais �t� redistribu�, s'engouffre dans un tableau dress� personnellement par le juge Perraudin et recensant plusieurs centaines d'adresses et de comptes bancaires, de soci�t�s et de fiduciaires interm�diaires. Une construction � y perdre son latin !

Or, comme le r�v�lent les documents secrets de la Justice genevoise en possession de L'investigateur, le juge Perraudin et le Procureur Bertossa n'ont pas perdu leur latin ! Dans un document dat� au 14 septembre 2000, le juge P�raudin constate en page 6 : " vu la non transparence du flux de l'argent, il s'impose de conclure que la totalit� ou une partie des FRF 256 000 000 ont �t� vers�s � des tiers, des d�cideurs publics, des personnes disposant de l'autorit� d'�tat, des �lus et d'autres interm�diaires. " Et en page 13 de la m�me note, P�raudin accuse : " Des personnes physiques et juridiques ont b�n�fici� sous le nom de code " Observatoire est-allemand " des sommes d'argent d�termin�es. D'autres personnes, de nationalit� fran�aise, ont �galement re�u sous le m�me nom de code d'importantes sommes d'argent. "

Les magistrats genevois -et ils sont rejoints en cela par leurs homologues fran�ais- n'accordent donc aucun cr�dit aux d�n�gations de Pierre Lethier affirmant mordicus que les fameux 292 millions de francs constituent tout simplement la r�mun�ration personnelle des deux lobbyistes Lethier et Holzer. Pour P�raudin et �galement Van Ruymbeck et Joly, Lethier a dit une seule fois la v�rit� ; c'est quand il affirma l'an pass� que " l'argent est revenu en France ".C'est son avocat, ma�tre Strub (qu'on retrouve dans la cr�ation de " Stand By ") qui fait d'ailleurs �tat de ce retour d'argent en octobre 2 000, dans une interview au "Herald Tribune " : " j'ai accueilli le 7 mai 1992 dans mon bureau une r�union entre Lethier, Holzer et un dirigeant d'Elf, Hubert Leblanc Bellevaux. Ce dernier m'a remis un contrat �tablissant les commissions � verser ".

L'agent secret s'est �vapor�, le restaurateur de Sirven � Gen�ve aussi

" M. Lethier Pierre, Roger, MARCEL, Mandat d'Arr�t : 28/09/00, ne le 21/03/55 � Gray (70) de Marcel et Monique Cuenet, demeurant 79, chemin de Ruth 1223 Cologny-Gen�ve, en Suisse. " La fiche de signalisation envoy�e aux autorit�s judiciaires internationales et concernant Pierre Lethier est laconique et la belle villa avec vue plongeante sur le lac L�man a �t� d�sert�e depuis longtemps par l'ancien colonel des services secrets fran�ais. Une gardienne vigilante et agressive �loigne les visiteurs trop curieux du portail d'entr�e. " Monsieur L�thier n'est pas l� et je ne sais pas quand il revient " nous crie-t-elle !

Pierre Lethier s'est en effet �vapor� et avec lui, les explications dont le p�le financier parisien compos� des juges Van Ruymbeck, Joly et Vichnievsky, aurait tant besoin pour savoir qui a touch� quoi dans l'affaire Elf. Car si Alfred Sirven est certainement celui qui saura dire pour quelle raison et dans quelle direction politique et personnelle tant d'argent a �t� investi dans le lobbying, Lethier et son coll�gue allemand Holzer connaissent seuls les b�n�ficiaires pr�cis de presque 300 millions de francs dont surtout Lethier a mis en place d�s 1992 un syst�me compliqu� et non transparent de r�partition, comme en t�moignent les tableaux secrets de la Justice genevoise.

A " l'Auberge d'Onex ", superbe restaurant gastronomique en banlieue genevoise, le patron, Valentino Rusconi, se rappelle des r�ceptions et repas opulents d'Alfred Sirven en compagnie de ses amis fran�ais et allemands pour discuter affaires. Il nous fixe rendez-vous pour apr�s le service afin de nous d�crire plus en d�tail ces personnages qui entouraient Sirven et L�thier. Quand nous revenons, il n'est plus l�. " Il est parti en vacances ", explique son ma�tre d'h�tel. " Nous ne savons pas quand il revient. "

A l'h�tel " Le Richemond ", en plein centre de Gen�ve, M., un r�ceptionniste, accepte de nous parler malgr� la formelle interdiction de sa direction. Il reconna�tra sur photos, dans un bistrot, certains hommes politiques allemands ayant log� � l'h�tel et s'�tant r�uni avec Sirven et L�thier dans un petit salon du " Richemond ". Il nous fixe rendez-vous pour plus de d�tails � son adresse priv�e, un quatri�me �tage d'un immeuble de Gen�ve. Quand nous y arrivons, la porte restera ferm�e. Le lendemain aussi. Et les jours suivants �galement.

" L'affaire Elf est un roman � cl�s ". La citation est de Pierre L�thier. Ce dernier a occup� de tr�s hautes fonctions dans les services de renseignement fran�ais, notamment la DGSE o� il fut chef de cabinet de trois directeurs successifs (de Marenches de 77 � 81, Marion de 81 � 83 et Imbot de 85 � 86), et porte le grade de colonel. C'est lui qui " traitait " par exemple pour la DGSE l'ex mercenaire Bob Denard. Et qui fut �galement " l'agent traitant " d'un certain� Alfred Sirven avant de devenir le coordinateur de l'intervention des services fran�ais dans l'op�ration Elf-Leuna.

Les juges fran�ais se sont pos�es d�s le d�part beaucoup de questions sur l'intervention massive des services secrets fran�ais dans cette sombre affaire Elf. Et ont constat� que depuis ses origines sous de Gaulle, les structures internes et les relations externes d'Elf, sont investis par des hommes de la DGSE. Elf devient une sorte de deuxi�me minist�re des affaires �trang�res, dont le syst�me parall�le se fait surtout remarquer � l'�poque en Afrique. Les hommes d'Elf ont �videmment beaucoup plus de marche de man�uvre que les diplomates fran�ais. Et peuvent tisser leurs r�seaux comme et o� ils veulent.

Pas moins de cinq grad�s de la DGSE seront impliqu�s au nom d'Elf dans l'affaire Leuna. Hubert Leblanc Bellevaux (achat de complexes industriels), Alain Guillon (directeur du raffinage et de la distribution), Alfred Sirven, Andr� Guelfi et� Pierre Lethier. Alain Guillon r�pond dans une audition du 8 juin 2000 au juge Van Ruymbeck : " cet argent sp�cial �tait � objectif multiple ". Et Guillon d'assurer le juge que l'argent de L�thier et Holzer a servi au lobbying politique. Il en sera de m�me dans la d�position de Jean-Claude Vauchez face � Eva Joly le 22 f�vrier 2000 et de celle d'Andr� Tarallo le 2 ao�t 2 000 face � Van Ruymeke

Le juge Van Ruymbeke aura d'ailleurs le privil�ge de recueillir, le 2 ao�t 2000, les seules d�positions de Lethier. Ce dernier �voque dans son audition son " statut particulier d'agent secret fran�ais " et sa mission " d'infiltrer des agents fran�ais dans la toile �conomique mondiale ". Il �chappe de peu � une mesure d'�crou � la suite de cette audition et conclut dans son livre " Agent secret " : " on ne veut rien savoir du fond de l'affaire Elf ". Lethier avait �galement confirm� ce jour l� � Van Ruymbeck que " des pots-de-vin avaient �t� vers�s � certaines personnes en France ".

Van Ruymbeck d�livrera un mandat d'arr�t international contre L�thier que les autorit�s suisses se refuseront d'ex�cuter. Le 10 octobre 2001, un proche de L�thier, Thierry Imbot, fils de l'ancien patron de la DGSE dont Lethier fut chef de cabinet et qui avait d�clar� quelques semaines plus t�t avoir des r�v�lations � faire dans le cadre de l'affaire Elf, meurt, d�fenestr� dans son nouvel appartement � Paris. L'enqu�te conclut � un accident. Lethier s'�vapore�


LE MYSTERE HOENER
Un richissime homme d'affaires allemand, tr�s li� � l'ex chancelier allemand Helmut Kohl et surtout, son �pouse Hannelore, qui s'est suicid�e le 6 juillet 2001. Un "accident" mortel sur fond de financement occulte de la CDU, de services secrets omni pr�sents et de relents de l'affaire Elf. Des r�v�lations exclusives, longtemps avant son d�c�s, sur ce personnage intrigant, dans " L'investigateur ", o� Hoener se disait en danger de mort. Une mort suspecte qui n'int�resse juges et enqu�teurs en coulisses. Comme s'il ne fallait pas trop en d�couvrir. R�cit et r�v�lations.

Au mois de mars 2001, les lecteurs de " L'investigateur " furent les seuls � pouvoir apprendre ce que la presse fran�aise, puis allemande, divulguera quatre mois plus tard : " CANNES : L'un des financiers occultes de la CDU, un certain H�ner, vient d'�tre retrouv� mort dans sa superbe propri�t� cannoise. L'homme d'affaires immens�ment riche �tait r�put� pour se balader avec des attach�-case remplis de billets de banque et d'alimenter par des versements officiels les comptes en banque de fondations proches de la CDU allemande, aurait fait une mauvaise chute dans l'escalier de sa maison. Or, H�hner a d�j� fait l'objet de plusieurs attaques ou interventions brutales par le pass� et craignait depuis l'�clatement de l'affaire ELF et de ses ramifications allemandes, pour sa vie. L'homme aurait eu certainement des choses � dire et �tait, selon nos informations, sur le point de parler. Plusieurs millions de marks ont atterri sur les comptes des fondations Hannelore Kohl et ZNS aux fins de rejoindre ensuite les comptes de la CDU par un savant m�canisme financier. Selon des sources g�n�ralement bien inform�es, H�hner aurait �galement �t� � une certaine �poque l'amant de Mme Kohl. "

LE CARNET SECRET DE MONSIEUR HOENER

La mort de Diethelm Ho�ner � Cannes en janvier de l'an 2001 �tait donc pass�e inaper�ue et si " L'investigateur ", qui est lu dans les r�dactions et dont le site internet est tr�s visit� par les confr�res, n'avait lanc� la nouvelle, il y a fort � parier que l'affaire serait rest�e enterr�e � jamais. "Le Parisien" avait finalement relanc� le sujet en soulignant que ce proche d'Helmut Kohl, qui connaissait bien le volet allemand de l'affaire Elf, pouvait en d�ranger certains. Se sentant menac�, il aurait m�me �crit ses craintes dans un m�morandum, raconta " Le Parisien ", qui dit d'ailleurs d�tenir un carnet secret accusateur de Hoener.

" L'investigateur " s'est laiss� expliquer la teneur de ce carnet par le journaliste du " Parisien ", Laurent Valdigu�, qui se refuse � le communiquer � la Justice ou � d'autres organes de presse.

Laurent Valdigu� : C'EST UN DOSSIER ROUGE contenant dix " documents " class�s confidentiels. Deux ans avant sa mort suspecte, le milliardaire allemand Diethelm H�ener avait remis � des proches quelques copies de ce dossier, " au cas o� il lui arriverait quelque chose ". La lecture de ce " m�morandum ", dont nous d�tenons un exemplaire, d�montre que Diethelm H�ener se sentait bel et bien en tr�s grand danger. Motif de son inqui�tude ? Le d�tournement d'une partie de l'aide allemande � la Russie au lendemain de la chute du mur de Berlin, et une �ventuelle op�ration d'espionnage industriel aux Etats-Unis. Un sujet explosif. Le milliardaire allemand, proche d'Helmut Kohl, avait alert� la CIA d�s 1995. " Le programme Rho ".

Le " document 1 " du m�morandum est un texte de 33 pages. Diethelm H�ener y raconte les coulisses de ses activit�s financi�res. Au d�but des ann�es quatre-vingt, il d�cide d'investir sur le march� am�ricain. "J'entreprenais un programme d'investissement dans des compagnies de haute technologie d�veloppant des ordinateurs, de m�me que dans des soci�t�s de biotechnologies qui s'appr�taient � d�velopper de nouvelles th�rapies. " L'homme d'affaires rep�re aux Etats-Unis, notamment en Californie, des petites entreprises qui d�butent. Il ach�te ainsi des actions de Compaq, la marque d'ordinateurs, ou d'Acuson, entreprise sp�cialis�e dans l'imagerie m�dicale, ou de Lotus Developpement, qui va mettre au point le logiciel Lotus. Pour son " programme ", Diethelm H�ener a cr�� le groupe Rho Management et dissimule ses investissements derri�re des " trusts " anonymes. Prudent, il limite � 35 % ses prises de participation dans les soci�t�s am�ricaines " pour �viter les craintes protectionnistes d'expropriation �trang�res de la technologie am�ricaine ". Il fait fortune. Les d�tournements d'argent entre l'Allemagne et la Russie. " En 1990, en liaison avec la r�unification allemande, et pour aider la Russie dans ses efforts de transformation, l'Allemagne a transf�r� 44 milliards de dollars � la Russie. " H�ener , d�s 1995, �crit qu'" une partie importante de ces r�serves ont �t� vol�es ". " Au lieu de d�poser les deutsche Mark � la banque centrale allemande, la banque centrale de Russie les a transf�r�s en Suisse. De la Suisse, l'argent fut transf�r� aux �les Ca�mans et a disparu ", �crit-il. Comment d�tient-il ces informations explosives ? Proche des milieux financiers dans l'entourage imm�diat d'Helmut Kohl, ami de Karl Otto Poehl, le pr�sident de la Bundesbank, Diethelm H�ener pourrait parfaitement d�tenir ces informations de sources " directes ". Dans son m�morandum, il cite � plusieurs reprises l'affaire " Aldrich Aimes ", du nom de cet agent de la CIA pay� par Moscou via la Suisse. Il cite aussi des informations qui lui auraient �t� remises � l'�poque par le capitaine Barril, ancien de la cellule de s�curit� de l'Elys�e sous Fran�ois Mitterrand. Espionnage industriel � grande �chelle. Que sont devenus les fonds allemands d�tourn�s de Russie ?

Dans le " document 5 " de son rapport, Diethelm H�ener avance une explication : " Mon amie a �t� contact�e par un homme qui m'�tait totalement inconnu et qui lui demande si j'accepterais de m'occuper de certains fonds d'investissements d'origine suisse. Les personnes derri�re ces fonds �taient int�ress�es par des investissements en mati�re de biotechnologies... Ils pensaient que j'�tais le plus qualifi� pour cela. " Diethelm H�ener s'informe de l'origine de l'argent. " Il m'a �t� r�pondu que ces fonds appartenaient en fait � un groupe d'investisseurs comprenant un ancien Premier ministre russe et s'�levaient � 100 millions de dollars. " L'homme d'affaires suppose ainsi que les d�tenteurs des capitaux russes envol�s ont cherch� � " utiliser le fil conducteur Rho " pour investir dans l'�conomie am�ricaine. Selon lui, ces investissements avaient pour but secret d'effectuer " une op�ration d'espionnage � grande �chelle ". Autrement dit, H�ener soup�onnait des Russes de vouloir mettre la main sur les entreprises de pointe am�ricaines, afin de d�couvrir certains proc�d�s en mati�re de biotechnologie ou d'informatique. La CIA alert�e. D�s 1995, Diethelm H�ener alerte les services secrets am�ricains au plus haut niveau. Via un officiel am�ricain, membre du gouvernement Clinton, William B. Bader, il obtient rendez-vous avec le patron de la puissante CIA et commence � r�diger les notes de son " m�morandum ". Ce sont ces textes, r�unis ensuite dans ce dossier rouge, qui r�sument toute l'op�ration : une affaire de milliards de dollars entre l'Allemagne, la Russie et les Etats-Unis. Le plus �tonnant aujourd'hui est de constater qu'en 1999, quatre ans apr�s les premiers �crits de Diethelm H�ener , un audit du Fonds mon�taire international (FMI) a confirm� l'existence de d�tournements d'une partie de l'aide internationale � Moscou. En tombant de l'escalier de sa villa, Diethelm H�ener a-t-il �t� rattrap� par ses r�v�lations ?

LES NOUVELLES REVELATIONS DE " L'INVESTIGATEUR "

Beaucoup de raisons pour qu'un homme se " suicide " ! Hoener, dans le voisinage duquel habitait � Cannes un certain Dieter Holzer, l'agent secret allemand par qui ont transit� les centaines de millions de francs de l'argent de la corruption d'Elf dans l'affaire Leuna-Minol et dans la villa duquel Mme Kohl venait lui rendre visite de temps en temps, �tait �galement tr�s li� � l'ancien chef de l'administration de la chancellerie allemande, Schmidtbauer. Des contacts tr�s r�guliers ont eu lieu entre le patron des services secrets allemands Schmidtbauer et Hoener.

Des versements de la part de Hoener ont �galement eu lieu :
-sur le compte priv� d'Hannelore Kohl pour le montant d'un million de Deutschmark en d�cembre 1992
-� la centrale de la CDU via Baader aux Etats-Unis. Les montants sont consid�rables, mais le total vers� reste impr�cis.

Une note blanche des Renseignements G�n�raux fran�ais et en possession de " L'investigateur ", pr�cise d'ailleurs : " une personnalit� allemande proche de Schmidt-Bauer, qui r�side en France, dans le Sud, et qui est un ancien conseiller financier du pr�sident de la Budesbank P�hl, � vir� un million de $ (DM ?), sur le compte personnel, priv�, de Hannelore Kohl. C'�tait arrang� par Schmidt-Bauer. C'�tait arriv� avant qu'elle cr��e sa fondation avec William Baader, l'Am�ricain. La personnalit� allemande en question a re�u une m�daille allemande, il y a un mois, au consulat d'Allemagne � Marseille ".

Diethelm Hoener en savait trop. Comme par exemple que beaucoup d'argent en rapport avec Elf - Leuna - Minol est pass� sur les comptes d'une filiale bancaire dirig�e par un ami d'Helmut Kohl : l'agence de Kassel de la Dresdner Bank et Bernd Fahrholz, aujourd'hui l'un des patrons de cette banque � Francfort. Quand Fahrholz re�ut sa promotion francfortoise, il emmena, sur ordre de Helmut Kohl, les dossiers d�licats de Leuna avec lui � Francfort et les y classa strictement confidentiels et exclusivement g�r�s par le chef, c'est � dire Fahrholz (" Chefsache "). Une bonne partie des documents disparus dans la chancellerie allemande et concernant Leuna, subsiste dans les coffres de la Dresdnerbank et de Bernd Fahrholz

De quoi est finalement vraiment mort, dans sa fastueuse villa de Cannes en janvier 2001, le milliardaire allemand Diethelm Ho�ner qui �tait un proche d'Helmut Kohl? Sa chute, t�te premi�re du haut d'un escalier de sa r�sidence-forteresse sur la C�te d'Azur, a-t-elle �t� purement accidentelle ou sciemment provoqu�e pour �liminer un homme qui en savait long - sinon trop - � propos de dossiers internationaux explosifs? Notamment sur le volet allemand de l'affaire Elf... Certaines zones d'ombre appel�es � �tre clarifi�es par les investigations compl�mentaires subsistent. Celles-ci ont �t� men�es par les enqu�teurs cannois du SIR (Service d'investigations et de recherches), apr�s l'ouverture d'une information par un magistrat grassois, le juge Coutton. Selon une source proche de l'enqu�te, �crivit l'AFP, il subsiste des zones d'ombres au sujet de cette chute dont a �t� victime un homme d'une soixantaine d'ann�es jouissant d'une immense fortune (environ un milliard de francs fran�ais), en bonne sant� apparente mais tr�s fatigu� moralement. En fait, tr�s seul et angoiss�.

Cette angoisse Diethelm H�ener aurait ce soir-l� pu chercher � la tromper avec quelques verres d'alcool de trop. Ce qui aurait pu contribuer � sa perte d'�quilibre au moment o� il rejoignait sa chambre en �tage. Les constatations polici�res initiales n'excluent pas d'autres sc�narios, consid�r�s n�anmoins "comme peu cr�dibles" par certains des enqu�teurs cannois, toujours en charge du dossier de cette mort �trange. Encore que Hoener n'�tait pas buveur, mais effectivement tr�s apeur�, comme nous avons pu nous en rendre compte, au printemps 2000, lors d'une visite dans sa maison. Pour assurer sa protection de tous les instants dans sa villa cannoise "La Fleuri�re", avenue de Vallauris - une r�sidence actuellement estim�e � 150 millions de francs fran�ais -, le milliardaire angoiss� n'avait vraiment pas l�sin� sur les moyens. Il avait fait appel aux plus m�diatiques sp�cialistes fran�ais en mati�re de protection rapproch�e.. Il avait dot� sa villa d'un �quipement sophistiqu� en d�tecteurs, cam�ras et projecteurs lui assurant une s�curit� digne d'un bunker. Ce qui n'avait pas nui pourtant au confort et � la d�coration d'une propri�t� de r�ve pour laquelle il avait investi plus de 200 millions de francs, le seul parc accueillant 3 000 roses et 130 oliviers.

Or, comme Hoener r�v�le dans son carnet secret comment de "fortes sommes d'argent auraient �t� d�tourn�es d'Allemagne sur fond de bagarres entre services secrets", les policiers fran�ais envisagent qu'il a pu �tre victime d'une main meurtri�re dans son inviolable r�sidence cannoise.

La vid�osurveillance �tait d�branch�e. Le parquet de Grasse, alert� par le premier rapport de police, a ouvert une information judiciaire pour "recherche des causes de la mort ". Selon un premier rapport m�dical, la position du corps ne semblerait pas "compatible " avec la chute effectu�e. Quelqu'un aurait-il " pouss� " l'homme d'affaires du haut de son escalier ? C'est ce que cherche � d�m�ler le juge de Grasse, Jean Coutton. " Ce qui est b�te, soupire un des anciens amis de Diethelm H�ener, c'est que la nuit de sa mort, le magn�toscope des cam�ras de s�curit� n'enregistrait pas. "


Dresdner Bank, Fahrholz et l'argent de la CDU
L'affaire Elf est loin d'avoir livr� ses derniers secrets. Les recherches de " L'investigateur " permettent aujourd'hui de lever un nouveau coin du voile recouvrant cette gigantesque affaire de pots de vin, d'argent de la corruption et de commissions occultes, cette fois ci dans le cadre du volet Leuna-Minol, du nom de la raffinerie de Leuna et des stations services Minol dans l'ancien Est allemand, qu'Elf racheta sur ordre de Fran�ois Mitterrand � prix d'or pour aider Helmut Kohl dans sa conqu�te de l'Est.

Etonnant en effet que de constater selon des informations et des documents en possession de " L'investigateur ", que les premi�res n�gociations financi�res concernant ce march� se firent en 1992 par l'interm�diaire d'une plut�t obscure filiale de la Dresdner Bank dans la ville allemande de Kassel. Mais tr�s rapidement et sur ordre de Helmut Kohl, les comptes furent transf�r�s de Kassel � Francfort. Les dossiers concernant l'affaire Leuna furent rapidement transf�r�s au bureau de Bernd Fahrholz qui en fit son dossier personnel. " C'est � partir de ce moment l� que l'affaire devint opaque et fut frapp�e du plus grand secret ", nous confie un ancien banquier de cet institut financier.

Un autre employ� de la filialede Kassel t�moigne : " nous �tions mortifi�s quand d'un jour � l'autre, le dossier nous fut brutalement enlev� et transf�r� � Frankfort, chez Fahrholz ! ".

Surtout que ces dossiers �taient majoritairement constitu�s de ceux disparus dans les bureaux du chancelier allemand. Ces dossiers " �gar�s " se trouvent encore aujourd'hui en possession de la Dresdner Bank et de son dirigeant, le " docteur " Bernd Fahrholz, l'ami de Helmut Kohl.

Quant � ce dernier, il renie toujours l'implication de son �pouse, morte en 2001, dans l'affaire de l'argent sale de la CDU. " L'investigateur " est en mesure d'�tablir que Diethelm Hoener, le richissime millionnaire allemand qui est mort �galement en juillet 2001 dans des conditions �tranges dans sa villa de Cannes et dont les relations �taient tr�s �troites avec Hannelore Kohl, n'�tait pas le seul � avoir utilis� les comptes personnels de Mme Kohl respectivement ceux de l'une de ses fondations, pour faire parvenir de l'argent blanchi � la CDU. Derri�re cet homme d'affaires effac� s'est toujours profil� l'ancien chef de la chancellerie allemande, Schmitbauer, l'homme qui tenait tous les fils de cette inextricable affaire entre ses mains.

Reste � examiner le r�le jou� par l'Am�ricain William Bader, � la t�te d'une importante fondation aux Etats-Unis et proche de la CIA. Hoener a vir� d'�normes sommes � destination de la CDU sur les comptes de la fondation de Bader. Ce dernier effectuait ensuite le transfert vers les tr�soriers du parti chr�tien social allemand. Bader, ex secr�taire d'�tat adjoint pour l'�ducation et la culture, �tait universitaire en 1953 et 1954 � Munich.

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