extrait de " L'Europe des Fraudes ", Jean Nicolas, �ditions pna, 1999
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Jean Nicolas a publi� deux livres sur l'affaire Cresson et la chute de la Commission Santer. " L'Europe des Fraudes " parut en avril 1999, � peine un mois apr�s la chute de la Commission. Vu le succ�s du livre et de nouveaux documents qui afflu�rent, le journaliste fit �diter un second tome, " L'Europe des Fraudes II ", sorti en 2000. Nous publions ici de larges extraits de l'affaire Cresson, tir�s du premier tome. Les deux livres ont �t� r�imprim�s et peuvent �tre command�s pour 20 euros les deux livres. En effectuant une assignation postale (Luxembourg) ou un mandat postal international (autres pays), r�alisables dans tout bureau de postes, de 20 euros, avec indication " Europe des Fraudes I et II " � L'investigateur, Bo�te postale 81, L-8301 CAP, vous recevrez dans les 24 heures (Luxembourg) ou 48 heures (autres pays), ces deux ouvrages plus que jamais d'actualit�
Il est effarent de constater � quel point un ancien Premier ministre fran�ais et commissaire europ�en en exercice peut �tre mal entour� et mal conseill�. Et se retrouver au pi�ge de ses relations, amiti�s et amours compromettants. En d�l�gant sa d�fense � des juristes, membres de cabinet et autres porte-paroles manifestement peu � la hauteur. Qui sont si peu habiles qu'on est amen� tout naturellement � d�couvrir ce qu'on appelle aujourd'hui "la mouvance Cresson". Une mouvance bas�e sur de gros int�r�ts �conomiques et financiers, des prises d'avantage, du trafic d'influences ainsi que du n�potisme et du cousinage. Car il faut pr�ciser une chose tr�s clairement : la d�mesure des r�actions initiales de Mme Cresson sont � la base de l'int�r�t tout particulier port� par mes confr�res et moi aux agissements de ce commissaire qui avait finalement �norm�ment de choses � cacher.
Ce qui n'�tait pas encore une affaire �clate le 24 ao�t 1998 quand en premi�re page des quatre journaux belges de "Sud Presse", appara�t l'information: "Un proche d'Edith Cresson b�n�ficierait de largesses". L'information est �voqu�e au conditionnel, m�me si un proche de Cresson est cit� dans l'entourage de son cabinet, pay� fictivement par une soci�t� ext�rieure, la fameuse soci�t� Perrylux, impliqu�e depuis peu � cette date l� dans le d�tournement de quelque cent millions de francs belges (2,5 millions d'euros) d'aide humanitaire. Il n'y a donc aucun lien entre le n�potisme de Mme Cresson et ce premier scandale insignifiant quant � son "chiffre d'affaires", mais oh combien important quand au m�canisme qu'il va permettre de divulguer plus tard. Il n'y a rien de vraiment ill�gal dans ce cas d'�cole. Le fait est tout simplement moralement r�pr�hensible, un point, c'est tout.
Et multiples sont les occasions offertes au cabinet Cresson pour rattrapper le coup en jouant la transparence. Mais au lieu de prendre elle-m�me l'affaire en mains, ou du moins de laisser faire son chef de cabinet (il interviendra plus tard, trop tard et ne fera que pr�cipiter l'affaire, comme nous le verrons plus loin), l'ancien Premier ministre �ph�m�re de Fran�ois Mitterrand laisse agir son porte-parole bruxellois, un certain Jimmy Jamar. Mal lui en a pris, car ce dernier ne sera jamais � la hauteur.
D�s le d�but (sur instruction de sa patronne), il criera au complot, essayera de d�cr�dibiliser non seulement l'auteur, mais �galement tous ceux qui risqueraient de s'int�resser � la reprise de cette information et surtout, il d�mentira avec acharnement les faits les plus �vidents en �tant d�menti au coup par coup par les aveux de Ren� Bertehlot, de son chef de cabinet et des d�couvertes de grands quotidiens fran�ais. Sa version sera invariable : depuis toujours, on en veut � Edith Cresson, parce qu'elle est femme, parce qu'elle n'est pas une socialiste comme les autres, parce que c'est l'extr�me-droite qui dirige la manipulation, parce que... Il ne lui viendra jamais � l'esprit d'analyser intelligemment la situation et de chercher les (au d�but modestes) raisons du mal. Il forcera donc le journaliste, intrigu� par autant de mauvaise foi, � investiguer d'avantage sur un commissaire qui ne l'int�ressait gu�re initialement, les vraies fraudes suppos�es se situant plut�t � ce moment l� dans l'entourage du commissaire espagnol Manuel Marin.
Tout comme le cabinet Cresson, en r�pondant r�guli�rement � c�t� des questions des Parlementaires europ�ens, intriguera et provoquera ces derniers. La d�put� Edith M�ller, qui avait os� demander par �crit � Mme Cresson une liste des sous-marins employ�s par son cabinet, eut comme r�ponse un listing des fonctionnaires effectifs employ�s par le cabinet Cresson. Cresson ne pr�tendait pas ne pas occuper de sous-marins fictifs ou autres (encore qu'elle d�clara le 19 septembre 1998 au "Figaro" "je n'ai pas de sous-marins"), mais elle refusa de r�pondre � la question de la d�put�, en plus membre de la commission de contr�le budg�taire. Mal lui en prit, car autant les parlementaires que les journalistes, n'eurent de cesse d'essayer de d�couvrir la v�rit�... et ils y sont arriv�s!
Madame Cresson ne connaissait pas Claude Perry! C'est la premi�re r�action du cabinet de la DG 12. Madame Cresson l'a peut-�tre vu une fois, mais elle l'a imm�diatement �conduit. C'est la deuxi�me version des conseillers de la commissaire. Mensonge sur mensonge. "Ren� Berthelot n'a jamais travaill� avec Mme Cresson � Bruxelles". Il s'agit ici d'une d�claration du cabinet Cresson au "Figaro". C'est encore un gros mensonge. Analyse et autopsie des mensonges et des combines d'Edith Cresson...
Quand Madame Cresson arrive officiellement � Bruxelles en janvier 1995 pour prendre ses fonctions de commissaire, elle amm�ne avec elle son "ami de trente ans", Ren� Berthelot, ancien dentiste de la bonne ville de Chatellerault, le fief de la brave Edith, dont elle �tait maire jusqu'en 1997. Berthelot, peu aim� par le reste de l'entourage pour le r�le qu'il joue dans la mouvance Cresson, a besoin de "gagner" sa vie � Bruxelles. Car Cresson ne veut � aucun prix se priver de sa compagnie. Berthelot est d�fini par des proches de la commissaire comme son "gourou". Il lui pr�dit l'avenir, la voyait d�j� dans le temps acc�der aux fonctions de pr�sident de la R�publique, bref, il la conseille dans un domaine beaucoup moins scientifique que le secteur de la recherche que le commissaire fran�ais est appel� � diriger et au sein duquel Berthelot sera cens� travailler plus tard. Cresson se procure un appartement � Bruxelles et y loge �galement Berthelot. C'est du provisoire, mais au d�but, on s'organise comme on peut.
Entre en lice un autre personnage, tout aussi �nigmatique : le fran�ais Claude Will�me. Il est chef adjoint des services de s�curit� de la Commission europ�enne et ancien de la DGSE. Will�me connait beaucoup de monde au Breydel, le b�timent h�bergeant la centrale de fonctionnement de la Commission. Et ce n'est pas sa fonction dirigeante � la S�curit� qui le desservirait. Il est donc normal qu' Edith Cresson ou Ren� Bertehlot s'adressent � ce fichier vivant des communaut�s europ�ennes. Will�me conna�t de suite une solution aux probl�mes mat�riels et de logement de Ren� Berthelot : Claude Perry. Ce dernier travaille � ce moment l� depuis une vingtaine d'ann�es en tant que patron de plusieurs soci�t�s de sous-traitance avec la Commission et il a la renomm�e d'�tre le "deus ex machina" qui peut arranger tous les coups. Au sein de la Commission, la disponibilit� de la structure de soci�t�s de Claude Perry pour affiner tous les arrangements demand�s, est un secret de polichinelle. Will�me lui parle donc de Berthelot et Perry a vite fait de comprendre quel peut �tre son int�r�t d'enr�ler le dentiste dans son �quipe de sous-marins, d�partement "travailleurs fictifs". Pour lui, une occasion d'entrer en contact avec un nouveau commissaire, de poser ses jalons et d'�tendre encore un peu plus sa p�n�tration de cette organisation europ�enne si int�ressante du point de vue p�cunier.
Le 6 f�vrier 1995, Claude Perry et Ren� Berthelot d�nent pour la premi�re fois ensemble. Ils mettent au clair les modalit�s de l'embauche du dentiste, les conditions de payement et d�finissent la structure officielle du contrat. Le 24 f�vrier, ils se rendent ensemble � la Caisse d'Epargne de l'Etat � Luxembourg pour y ouvrir un compte bancaire courant au nom de Berthelot. On d�jeune le m�me jour � Luxembourg et on remet le couvert le 8 mars. Perry insiste bien s�r aupr�s de sa nouvelle taupe pour rencontrer sa patronne. Berthelot va toucher de l'argent pour ne rien faire, �tre log� aux frais de Perry et ce dernier s'int�resse � un contact privil�gi� avec la commissaire. Le march� est donc vite conclu et il s'agit maintenant de concr�tiser.
Ce sera fait une premi�re fois le 23 mars, � 15 heures 30. Edith Cresson rencontrera Claude Perry en compagnie de Ren� Berthelot dans son appartement priv�. Cinq jours plus tard, Cresson, Berthelot et Perry se retrouvent � nouveau, cette fois ci au tr�s s�lect restaurant "l'Amigo" � Bruxelles. Et la troi troisi�me rencontre aura lieu le 11 avril au priv� de Mme Cresson. Toute la bande s'y retrouve: Berthelot, Will�me, Perry et Catharina Klaver (une secr�taire de Perry, �galement sa compagne dans la vie et qui lui servira � plusieurs reprises de g�rante de soci�t�s off-shore). La ma�tresse de maison sert des c�telettes d'agneau � l'ail, accompagn�es de haricots blancs. Qu'est-ce qu'on arrose ce soir l�? L'entente financi�re entre Perry et Berthelot, pardi. Et en signe d'all�gresse, Madame le commissaire se laisse aller � �crire sur une feuille blanche et de sa main quelques noms de personnes des milieux de la Commission susceptibles d'aider Perry � trouver des contrats communautaires. Elle l'envoit chez l'un des membres de son cabinet, Jack Metthey, pour une �ventuelle embauche via Perry d'un scientifique finlandais re�u la veille et pour un contact avec un autre �minent savant su�dois. Perry est �galement cens� visiter sur initiative de Mme Cresson un certain Jensen, directeur de la biotechnique � la DG 12. Elle invite m�me Berthelot � faire d�couvrir son bel appartement � Perry. Ce dernier fera d'ailleurs plus tard une d�claration sous la foi du serment, accompagn�e d'un plan tr�s tr�s d�taill� des appartements de Mme Cresson, o� il certifie : "je soussign�, Claude Perry, d�clare par la pr�sente sous la foi du serment, que lors des multiples repas et r�unions avec Madame Edith Cresson et Monsieur Ren� Berthelot, il fut question, avec l'assentiment de Madame Cresson, de l'emploi fictif de Ren� Berthelot". Et
Perry rajoute :"(...) en cas de besoin, j'en t�moignerai en Justice". C'est clair, c'est net et rajout� � la chronologie des �v�nements, les d�mentis "indign�s" (Le Figaro) de Madame Cresson n'ont plus grande valeur. Sans oublier que la commissaire d�clare au journal "Le Monde" en date du 4 octobre 1998 : "le docteur Berthelot a pass� un contrat avec M. Perry � titre priv� et je ne vois pas en quoi cela me concerne." Quel effroyable mensonge comme le prouve ce chapitre. Mensonge confirm� par Berthelot lui-m�me qui d�clare au confr�re de "Lib�ration" qu'il "habitait dans l'appartement de Cresson et avait libre acc�s � son bureau." Et Bertehlot confirme tout comme Perry que sa patronne �tait au courant de sa "mission" pr�s de Perry et que lui, Berthelot, "�tait con d'avoir accept�" ce march�.
Conclusion : Mme Cresson a menti ! Non seulement Perry t�moigne de ce qu'elle �tait au courant du pourquoi de l'embauche de Berthelot, mais ce dernier en fait �galement de m�me.
Quelques jours s'intercalent ensuite, puisque Berthelot va passer de courtes vancances (du 17 au 22 avril) � l'h�tel Mercure � Tours. D�s le 25 avril, Perry s'en va visiter le docteur Hansen, directeur � la DG 12, sur recommandation de Mme Cresson. Il n'en sortira rien et c'est bien pour cela que Claude Perry se dira abus�, sinon escroqu� par Edith Cresson. 170 000 francs belges par mois (4 250 euros) pour Berthelot, plus un loyer de 80 000.- (2 000 euros) pour un appartement qu'il lui trouve � la mi-95 pour d�barrasser Cresson de son omni-pr�sence, c'�tait effectivement cher pay� pour ne jamais avoir de contrat avec les DG de la grande pr�tresse. Elle a bien voulu faire b�n�ficier son ami des largesses de Perry, mais encore r�cemment, elle clamait haut et fort qu'il n'avait jamais eu de relations contractuelles avec les d�partements lui incombant. L'arroseur arros�? Certes, s'il n'y avait le profit tir� de cette situation pour le moins d�licate par le proche de Cresson. Et on peut dire finalement que la commissaire ind�licate a abus� d'une part des largesses de Perry tout en l'abusant lui m�me d'autre part en ne renvoyant pas l'ascenseur. Le beau r�le qu'elle essaye de s'attribuer aujourd'hui ne tient en tout cas pas la route du point de vue moral.
Mais pour l'instant, Perry ne se doute pas encore qu'il sera confin� dans le r�le de la vache � lait. Il est en pleine euphorie et emm�ne Berthelot le 4 mai chez Ren� Hardy, g�rant de la soci�t� Harco, l'une des filiales de "l'empire Perry". C'est ici que le brave dentiste trouvera son employeur officiel, qui lui payera �galement son loyer. Harco refacturera les d�penses pour Berthelot � Perrylux. Et Perry va continuer de faire le si�ge de Mme Cresson, sans que cela ne la d�range, au contraire, comme l'indiquent les rendez-vous suivants.
La quatri�me rencontre Perry-Cresson se d�roule le 10 mai. A 18 heures, Cresson a une entrevue avec l'un de ses fonctionnaires, un certain Van De Bon, qui int�resse �galement Perry. Ce dernier arrive une heure plus tard, en compagnie de l'in�vitable Berthelot et de Claude Will�me. Pour parler affaires � cinq. Tr�s int�ressant de constater qu'une semaine apr�s cette r�union � cinq et avec Van De Bon, Cresson se fait envoyer une note confidentielle de son collaborateur Jean-Luc Demarty, chef de cabinet adjoint. Cette note, dat�e au 17 mai, concerne un changement dans l'organigramme du cabinet Cresson. Et elle est fax�e le m�me jour � 18 heures 10 par Ren� Berthelot chez Claude Perry. Annot�e de la fa�on suivante par Berthelot: "Confidentiel. Pour information. Amiti�s. Ren�." La note parle d'une s�paration formelle entre la DG 12 et le Centre de Recherches (CCR). Elle informe �galement sur la nomination d'un certain Draxler � la t�te d'une nouvelle direction, mais elle r�v�le surtout "la cr�ation d'une unit� charg�e des relations entre la DG 12 et la DG 13 et la nomination de Van De Bon � sa t�te." Copie de cette note est envoy�e � Fran�ois Lamoureux, alors chef de cabinet de Cresson et �... Jack Metthey, celui-m�me que Cresson avait pouss� Perry � rencontrer le 11 avril (ce que Perry fit d'ailleurs. Il eut les renseignements et tuyaux demand�s). Et... � Claude Perry, via Ren� Berthelot. Pourtant, Madame Cresson a toujours d�menti qu'en ce temps l�, Berthelot ait eu une quelconque activit� dans son cabinet alors qu'il �tait pay� par Perry. La pi�ce en question prouve exactement le contraire! Van de Bon transmettra d'ailleurs lui aussi des courriers internes de Mme Cresson � Perry. Ainsi, le 30 juin, il faxera � 12 heures pile copie d'une lettre de Cresson au recteur Witte de l'Universit� n�erlandophone de Bruxelles � Perrylux. Pour quelle raison, puisque Perry ne traite pas avec le cabinet Cresson. Pas ou pas encore? Ou pas officiellement, une n�buleuse de soci�t�s ext�rieures permettant tous les artifices pour ne pas reconna�tre les parties en cause ? Alors que Cresson vient � peine de quitter � ce moment l� la pr�sidence d'une soci�t� commerciale fran�aise, S.I.S.I.E., bien s�r toujours en relations d'affaires avec la Commission.
Il faut insister ici sur un droit de r�ponse sign� Edith Cresson et publi� le 15 septembre dans les quatre journaux du groupe Sud Presse. Mme Cresson y affirme : "Je ne suis pas intervenue pour cette soci�t� (Perrylux)". Un parfait mensonge, puisqu'au moins, ses recommandations manuscrites prouvent le contraire. D'ailleurs, Mme Cresson ne fit jamais le proc�s dont elle mena�a le journal "La Meuse" dans son droit de r�ponse. Cresson r�cidiva le 18 d�cembre par une lettre de son avocat belge, Alain Berenboom, � l'�diteur du journal belge "La Meuse". Berenboom y parle d'une "singuli�re manoeuvre" et se demande "si dans cette affaire, c'est la poursuite d'objectifs personnels de lui ou d'une personne avec laquelle il est en cheville qui guide l'auteur." Et l'avocat de rajouter au nom d'Edith Cresson: "la fa�on dont Monsieur Nicolas a syst�matiquement mis en cause ma cliente" l'�tonne, tout en reprochant au journaliste d'avoir fait la promotion de ses informations "aupr�s de coll�gues �trangers". Il est vrai que les confr�res �trangers et surtout Jean Quatremer de "Lib�ration" ont continu� l'enqu�te sur Edith Cresson et ont abouti � des r�v�lations dont nous reparlerons plus loin.
Le 27 juin, cinqui�me rencontre de celui que Madame Cresson ne connaissait pas, puis avait �conduit de suite. Encore un restaurant chic qui sert de cadre � un d�ner de travail entre les membres de l'�quipe de choc : Cresson, Perry, Will�me et Berthelot. Le 19 juillet, Perry, devenu entretemps le "porte-cl�" de Cresson, se fait inviter sur initiative de Madame le commissaire, � la Maison de France. Le lendemain, il reverra Cresson pour la sixi�me et derni�re fois, lors d'une r�union de travail � 15 heures dans l'appartement de la commissaire.
Mais le travail continue. A la fin de la p�riode de vacances, le 30 ao�t, est pr�vue une importante r�union de travail dans les bureaux d'Harco � Bruxelles. Elle sera remise au 19 septembre.Y assistent des d�l�gu�s des DG 12 et 18 ainsi que Berthelot, in�vitablement, et surtout, Tim Riedinger, un autre ami tr�s proche d'Edith qui fait �galement de bonnes affaires avec la Commission europ�enne. Il est l'un des personnages cl�s de la mouvance Cresson. Le soir, Perry et Berthelot d�nent ensemble. L'ambiance est moins sereine. Cela fait des mois que le petit pied noir d'Oran investit dans le dentiste de Chatellerault et qu'il ne voit rien revenir. Berthelot est mis sous pression. On se revoit pour d�ner le 3 octobre dans l'appartement lou� par Perry via Harco pour Berthelot rue Duray � Bruxelles. Les rendez-vous se succ�dent le 18 octobre � 13 heures 30, le 17 novembre � 19 heures et finalement, le 6 d�cembre � 17 heures chez Harco. C'est le moment o� Perry, qui a toujours du mal � accepter les �vidences, se rend n�anmoins compte de ce qu'on le m�ne peut-�tre en bateau. La merveilleuse collaboration qui aura co�t� quelques millions de francs belges � Perry est en train de se terminer en queue de poisson. Elle ne survivra pas � l'hiver 95-96...
Tout aurait �t� dit, tout aurait �t� �crit, si Edith Cresson n'avait pas tent� de passer pour plus int�gre qu'elle ne l'est. "Lib�ration" reprend les informations de "La Meuse" et m�ne sa propre enqu�te. Jean Quatremer arrive � interviewer Ren� Berthelot qui admet dans les grandes lignes les reproches moraux qui le concernent et qui sont adress�s �galement � Edith Cresson. Qui quant � elle n'appr�cie pas l'article de "Lib�". Et r�agit par un droit de r�ponse et une assignation en justice contre le quotidien fran�ais. Ce qui bien s�r ne fait qu'aviver l'envie du journaliste d'en savoir plus. C'est le moment que choisit en plus Dov Z�rah, l'actuel chef de cabinet d'Edith Cresson, pour convoquer le journaliste de "Lib�" et un journaliste de Radio France. Et il leur r�v�le d'autres cas de n�potismes, puisque selon lui, la presse les apprendra de toute fa�on. Il est vrai qu'auparavant, les initiatives de Cresson � l'encontre du "Nouvel Observateur" avaient beaucoup intrigu� et fait craindre le pire � l'entourage de l'ancien premier ministre.
C'est ainsi qu'on apprendra de source on ne peut plus officielle que Ren� Berthelot a effectivement fictivement "travaill�" pour HARCO et donc Perry sans que ce dernier n'obtienne cependant concr�tement un contrat r�el de la part des directions g�n�rales sous l'autorit� de Mme Cresson. Dov Z�rah confirmera �galement que Berthelot avait b�n�fici� d'un contrat de "visiteur scientifique" � la DG 12 de Mme Cresson et que le dentiste de la bourgade de Cresson �tait devenu expert en mati�re de recherche sur le SIDA.
Berthelot fut ainsi favoris� via trois contrats � charge du contribuable :
- 1er contrat du 1er septembre 1995 au 26 f�vrier 1996 pour un salaire initial mensuel de 146 500 francs belges (3 600 euros). N'oublions pas que Berthelot b�n�ficiait encore � ce moment l� du traitement de Perry et du loyer gratuit ! Ce qui fait, tout additionn�, la rondelette somme de 400 000 francs belges (10 000 euros)!
- 2�me contrat du 1er mars au 31 ao�t 1996. Le salaire a �t� augment�, mais le montant n'est pas indiqu�.
- 3�me contrat du 1er septembre 1996 au 28 f�vrier 1997.
Le 1er mars 1997, Ren� Berthelot est engag� au Centre Commun de Recherche (CCR) qui se trouve �galement sous l'autorit� de Cresson. Ce contrat prendra fin le 31 d�cembre 1997. Dov Zerah montrera quelques travaux de Berthelot, des rapports d'activit�s, aux deux journalistes s�lectionn�s. Ils d�criront ce travail comme de "petites notes" et comme "nul et insipide" et en tout cas en contradiction flagrante avec le salaire octroy� � l'ami de Mme Cresson. Berthelot remettait ces notes au d�but toutes les six semaines, puis tous les quatre mois, aux services concern�s. Cas aggravant : Berthelot a "travaill�" pendant une ann�e compl�te comme expert sur le SIDA dans le d�partement du Poitou-Charentes avec... la ville de Chatellerault, sa ville de domiciliation et le fief de Mme Cresson. 13 d�placements officiels sur 15 effectu�s par Berthelot et subventionn�s par les services de Mme Cresson avaient comme destination la bonne ville de Chatellerault. Il ne doit plus y avoir un seul cas de SIDA dans cette m�tropole! Et apr�s le contrat de travail fictif chez Perry, ce dernier contrat a �galement des relents de favoritisme aux frais du contribuable europ�en.
Le fils de Berthelot disposait quant � lui d'un contrat d'auxiliaire avec �ch�ance au 31 d�cembre 1998 � la DG 12. Encore un chercheur n� qui, dans le civil, est "actuaire en assurances". Alors qu'Elisabeth Schemla, ancienne r�dactrice en chef du "Nouvel Observateur" et auteur d'un livre �logieux sur l'eph�m�re passage de Cresson a Matignon, s'est vue embauch�e au m�me CCR pour s'y occuper des relations presse dans l'hexagone. Or, en octobre 1998, certains journaux scientifiques sp�cialis�s contact�s en France ne purent nous indiquer aucun rapport professionnel avec Mme Schemla.
Le correspondant bruxellois de l'hebdomadaire parisien "Le Nouvel Observateur", Didier Pavy, �tait le premier journaliste fran�ais � relever les informations parues en Belgique au sujet d'Edith Cresson. Il mena une enqu�te s�rieuse et fit pr�voir un papier sur l'affaire Cresson-Berthelot. C'est l'�l�ment d�cisif qui entra�na Cresson � r�diger en toute h�te le droit de r�ponse insipide adress� au groupe de presse belge. Un droit de r�ponse que "Le Nouvel Obs" re�ut deux jours avant... son confr�re belge concern�. Et la veille de la parution de l'article sur Cresson dans l'hebdo fran�ais, Madame Cresson honora Jean Daniel, le patron parisien, d'une entrevue. Il va sans dire que le papier fut annul�. Ce n'est que plus de deux mois plus tard qu'un nouveau papier sur Cresson, mais n'�voquant "l'affaire" qu'en quelques lignes, eut le droit de para�tre. Et s'attira de suite les foudres de l'ancien Premier ministre socialiste. Qui d�l�gua l'ancienne r�dactrice en chef, r�cente biographe de Madame et entretemps dot�e d'un confortable job de relations publiques au Centre de Recherche d�pendant de Cresson, jusque dans la conf�rence de r�daction du "Nouvel Observateur". B�atrice Schemla eut le droit de s'y expliquer et de se justifier le 30 octobre, provoquant un grand malaise � l'int�rieur de la soci�t� des r�dacteurs du magazine. Elle profita �galement de cette occasion pour d�noncer le complot d'extr�me-droite con�u � Bruxelles par une poign�e de journalistes sous l'influence de... Jean Nicolas !
Et c'est justement Elisabeth Schemla ainsi que le fils de Ren� Berthelot qui furent "d�nonc�s" par le chef de cabinet d'Edith Cresson comme d'autres b�n�ficiaires de contrats au commissariat de Mme Cresson. L'initiative de Schemla aupr�s de ses anciens coll�gues t�moigne en tout cas de ce que cette campagne de d�cr�dibilisation envers certains journalistes trop curieux est syst�matique et orient�e tous azimuts depuis le bureau de Mme Cresson.
Un "actuaire en assurances", fils d'un grand ami, une journaliste d�vou�e et un dentiste cas�s. Et dans le cas de Ren� Berthelot, il faut signaler qu'apr�s son emploi fictif qui se termina en f�vrier 1996, ce dernier �tait d�j� salari� depuis septembre 1995 par la Commission et le d�partement de Mme Cresson plus pr�cis�ment en tant que visiteur scientifique charg� de recherches dans le cadre de la lutte contre le SIDA, comme nous l'avons vu pr�c�demment. Et encore une fois, on constate que la formidable commissaire au "coeur gros comme �a", est pr�te � toutes les manipulations pour assurer un revenu aussi fantaisiste soit-il, � son ami. Apr�s son passage dans la mouvance Perry, Berthelot continue donc de "travailler" pour la DG 12 de Cresson. Il est visiteur scientifique et gagne � ses d�buts 24 400 FF. Presque deux ans plus tard, la commissaire fran�aise expliquera aux enqu�teurs de la COCOBU (Commission de Contr�le Budg�taire du Parlement europ�en) que Berthelot �tait "visiteur scientifique" pour l'aider "dans la pr�paration du programme cadre recherche et d�veloppement". Pas b�te, la structure: Cresson se payait donc un conseiller priv� selon ses propres dires sur le budget de la DG 12 communautaire. Mais ce conseiller plus que sp�cial ne pouvait plus, � partir du 1er mars 1997, rester employ� pour raisons de r�gles statutaires, par la DG 12. Cresson le fit tout simplement passer avec un contrat d'un an au Centre Commun de Recherche, qui d�pend �galement de la commissaire au grand coeur. Et comme il faut bien augmenter de temps en temps ses employ�s, le salaire qui a la forme "d'indemnit� mensuelle" passe � 45 375 FF. Soit presque le double du montant allou� un an auparavant. Belle progression et tout cela sans intervention syndicale! Mais que personne n'aille pr�tendre que Mme Cresson a avantag� qui que ce soit ! Elle vous r�pondra comme elle l'a fait devant les parlementaires de la COCOBU : elle embauche qui elle veut!
Mais Berthelot n'est pas encore au bout de ses... joies. Car comme par miracle, son indemnit� europ�enne n'est pas diminu�e du montant de sa retraite fran�aise, ce qui constitue donc un gain de 14 167 FF pour le dentiste! En plus, Berthelot encaissera entre septembre 95 et f�vrier 96 un double salaire augment� d'un loyer gratuit. Au total quelques quatre cent mille francs belges pour le dentiste expert du SIDA. La belle carri�re de Ren� Berthelot se termina finalement en 1998 pour raisons de sant�... Le coeur commen�ait � l�cher cet homme qui s'en retourna d�finitivement � Chatellerault. Mais fut encore pay� pendant sept mois (1,8 millions de francs, soit 45 000 euros) par les services de Cresson. Ind�ment, comme l'ont constat� d�but 1999 les contr�leurs du service financier interne � la Commission.
Deuxi�me important volet de l'affaire Cresson qui en est devenue une entretemps et r�v�l� �galement par les journaux du groupe Sud Presse le 16 novembre 1998 : l'affaire S.I.S.I.E., les initiales d'une soci�t� parisienne au nom significatif : Services Industries et Strat�gies Internationales et Environnement. L'historique et le cheminement de cette soci�t� sont extr�mement compliqu�s, mais son but et les motivations � son origine sont plus que limpides. Un retour "historique" en arri�re s'impose pour bien comprendre cette nouvelle mouvance.
En octobre 1990, Edith Cresson n'est plus qu'ex-ministre des affaires europ�ennes du cabinet de Michel Rocard. Elle est donc � la recherche d'une occupation salari�e. C'est Didier Pineau-Valenciennes qui r�cup�re la femme politique. Le patron du groupe Schneider cr�e "sp�cialement pour elle" comme il le conc�dera ouvertement, une soci�t� de services destin�e � promouvoir les activit�s de son groupe dans le monde et � faciliter ses contacts avec des responsables du plus haut niveau. Cresson semble toute indiqu�e pour remplir cette t�che de voyageur de commerce de luxe. Elle prend donc ses aises au sein de cette nouvelle soci�t� qui s'appelle � ses d�buts S.I.S.I., les quatre lettres repr�sentant "Schneider Industries Services International". Avec elle et dans ses bagages : son fid�le conseiller Abel Farnoux, qu'on retrouvera tout au long de la carri�re et dans l'ombre d'Edith Cresson. Il n'aura d'ailleurs jamais � s'en plaindre. Au printemps de l'ann�e 1991, Edith Cresson remplace Michel Rocard comme Premier ministre du pr�sident Mitterrand. Elle ne sait pas encore que son mandat ne durera pas tr�s longtemps et est exhalt�e par cette nouvelle t�che. Elle peut l�cher S.I.S.I. sans probl�me, puisque cette soci�t� ne devait son existence qu'au fait d'�tre le filet de sauvetage pour Cresson. Edith d�barque � Matignon, avec � nouveau dans ses bagages, Abel Farnoux. Mais en avril 1992, c'en est brusquement termin� de Matignon. Malgr� les bonnes, les tr�s bonnes relations entre Cresson et Mitterrand, elle est devenue intenable et c'est Pierre B�r�govoy qui succ�de � Cresson. Cette derni�re retourne chez S.I.S.I. avec ... Abel Farnoux.
Un mois plus tard, la soci�t� d'accueil change de fond en comble. Non seulement, les initiales deviennent S.I.S.I.E. le 25 juin 1992, mais encore voit on entrer le 8 d�cembre 1992 la soci�t� SES, une filiale d'Elf-Aquitaine dirig�e par Loik Le Floch-Prigent, dans le capital de la soci�t�. Apr�s Pineau-Valenciennes et ses d�m�l�s avec la Justice belge, voici un autre "cas", rendu c�l�bre quelques ann�es plus tard dans l'affaire de "la putain de la R�publique" et du pr�sident du Conseil Constitutionnel fran�ais, Roland Dumas. Ce capital donc, augment� depuis le 20 juillet 1992, est r�parti de la fa�on suivante:
- 5 000 actions pour SERIBO, entreprise fran�aise d'industrie du bois,
- 5 000 actions pour la soci�t� Koch Transporttechnik,
- 5 000 actions pour la soci�t� SES de Le Floch-Prigent,
- 500 actions pour Edith Cresson,
- 500 actions pour Abel Farnoux
- 500 pour Jean-Claude Gorichon.
Notons que 500 actions valent en 1992 quelques 60 000 francs fran�ais ou 360 000 francs belges (9 000 euros). En novembre 1993, c'est Edith Cresson qui devient la pr�sidente de la soci�t� S.I.S.I.E.. Le vice-pr�sident s'appelle, qui en douterait : Abel Farnoux. Exactement un an plus tard, S.I.S.I.E. change de statut et devient une soci�t� anonyme � directoire et conseil de surveillance. Abel Farnoux acc�de � la pr�sidence et Jean-Pierre Souviron devient vice-pr�sident. Ce dernier est un industriel du proche entourage d'Edith Cresson. Un autre ami de l'ex Premier ministre fait son apparition au sein de cette soci�t� en tant qu'administrateur : Bernard Esambert de la Compagnie financi�re de Rothschild. Il est tr�s li� avec Cresson. Celle ci lui avait d'ailleurs confi� lors de son passage � Matignon une importante mission sur les entreprises fran�aises. Et cinq jours avant de prendre officiellement possession de son fauteuil de commissaire europ�en, soit le 26 d�cembre 1994, Edith Cresson vend ses actions dans S.I.S.I.E. Elle a dor�navant les mains libres et rien n'emp�che maintenant S.I.S.I.E. de conclure des contrats de plus en plus juteux avec la Commission europ�enne, tout en ayant son ex-pr�sidente du conseil et ex-actionnaire � l'int�rieur de l'institution. La soci�t� ne se g�nera d'ailleurs pas pour ce faire. Quand � la nouvelle commissaire, elle a cr�� les conditions l�gales pour ne plus �tre en rapport avec S.I.S.I.E. Mais qu'en est-il des conditions effectives et des conditions morales?
La soci�t� informatique SEMA Group fait providentiellement son entr�e dans le capital en 1995, tout comme l'italienne STET avec Massimo Masini comme administrateur. Par ailleurs, des amis de Cresson comme l'industriel Nicolas Lebon, Jean-Pierre Souviron ou Dominique Giral cr�ent en 1995 une �manation de S.I.S.I.E., la soci�t� S.I.S.I.E. - Management. Le capital est de 51 000 FF et augment� l'ann�e suivante � 129 000 FF avec les apports de nouveaux actionnaires comme Christian Quesnot, ancien chef d'�tat major de Fran�ois Mitterrand, Pascal Hanras, Philippe Rivet, Beata Zupnik, Cyril Luneau ou Hassan L. Chammah. Plusieurs des actionnaires ou administrateurs de S.I.S.I.E. - Management figurent �galement au conseil de S.I.S.I.E. S.A., retransform�e statutairement une derni�re fois le 2 juillet 1998. Ainsi, Farnoux repr�sente S.I.S.I.E. - Management au conseil d'administration de S.I.S.I.E. S.A. et d'autres noms apparaissent : Hubert Curien au conseil de surveillance, Quesnot dans les deux soci�t�s, Lebon �galement, puis Daniel Rouxel et surtout Jean-Herv� Lorenzi, habitu� des cabinets minist�riels socialistes et �missaire du Premier ministre Cresson au minist�re de l'Economie et des Finances du temps des splendeurs de Matignon. Lorenzi avait en 1991 la charge de faire l'interm�diaire entre Matignon et Bercy. Il s'agit donc encore une fois d'un homme de confiance de la commissaire et d'un membre important de sa mouvance. Fin 1997, un conflit �clate entre certains administrateurs. Souviron et Quesnot claquent la porte.
Entretemps, le premier chef de cabinet de Cresson � la Commission, Fran�ois Lamoureux, a quitt� sa patronne pour s'installer comme gestionnaire responsable des programmes Phare et Tacis � la Commission. Lamoureux a d�j� �t� chef de cabinet adjoint de Cresson � Matignon. C'est donc un autre homme de confiance qui dirige les op�rations de subventions vers les pays de l'Est. Or, S.I.S.I.E. passe justement de nombreux contrats avec les projets Phare et Tacis. Qui se sont r�v�l�s, ind�pendamment de la pr�sence de Lamoureux, peu fiables depuis 1991. Quelques 124 milliards de francs belges (30 milliards d'euros) ne semblent en effet pas �tre arriv�s � destination ou ne pas avoir atteint les objectifs vis�s.
Rien d'ill�gal en principe dans les diverses activit�s d'Edith Cresson, de ses soci�t�s satellites, de ses sous-marins bien pay�s pour peu de travail. Sauf que beaucoup d'indices intriguent. Et on constate qu'une soci�t� plus que proche d'Edith Cresson, bourr�e d'administrateurs on ne peut plus proches de la commissaire, b�n�ficie de contrats int�ressants avec entre autres un secteur dirig� par un tr�s proche de l'ancien Premier ministre fran�ais qui est lui-m�me l'un des vingt commissaires du gouvernement europ�en. S.I.S.I.E., depuis l'accession de Mme Cresson � son commissariat, a b�n�fici� de 7 contrats de la Commission pour un montant total de 3,1 millions d'euros (125 millions de francs). Telle une structure de l'ombre, la mouvance Cresson est bien organis�e, n'a peur de rien et est dans tous les bons coups. Car m�me si Madame Cresson insiste sur le fait qu'elle n'a jamais rien fait d'ill�gal, elle ne pourra pas nier que beaucoup de ses proches amis et �galement l'une ou l'autre soci�t� commerciale proche et m�me tr�s proche d'elle, s'en sont mis plein les poches. Comme le chanterait Georges Brassens: "les copains d'abord". Mais est-ce l� le r�le, la mission et le sens moral de la fonction d'un commissaire europ�en?
Troisi�me volet des affaires de Mme Cresson � la Commission europ�enne : celui de l'actuel directeur d'Air France, Jean-Cyril Spinetta. Encore une vieille connaissance de la commissaire. Spinetta se trouve dans l'embarras le 3 janvier 1996. Cet ancien conseiller de Fran�ois Mitterrand est mis sur la touche par le gouvernement Jupp�. Il d�missionne du corps pr�fectoral et cherche une occupation. Cresson lui en trouvera une � Bruxelles. Spinetta y effectuera bri�vement, mais consciencieusement, un travail qui ne correspond gu�re aux hautes qualit�s intellectuelles de cet �narque. Il ne restera d'ailleurs pas longtemps sur Bruxelles et retournera, selon ses d�sirs exauc�s par Edith Cresson, comme "expert national" de la Commission dans son pays ("J'avais demand� � Mme Cresson de pouvoir passer une partie de mon temps � Paris", avouera-t-il). R�tribu� avec 330 000 francs belges (8 000 euros) pendant les cinq premiers mois, il touchera encore 110 000 francs (3 000 �cus) de la DG de Cresson apr�s son d�part de Belgique en sus de son traitement � charge de l'�tat fran�ais. Quand il devient charg� de mission au minist�re de l'�ducation nationale fran�ais en juin 1997, son indemnit� de la Commission lui est toujours vers�e. Quand il devient directeur de la compagnie a�rienne fran�aise en septembre, son compte en banque est toujours cr�dit� par la Commission. Spinetta remboursera cependant le trop per�u de sa propre initiative � une Commission peu regardante.
Mais Edith Cresson a un grand coeur. En partant pour Bruxelles, elle n'a pas oubli� le "triste sort" r�serv� � son chauffeur et son garde du corps fran�ais auxquels elle a droit en tant qu'ancien chef du gouvernement fran�ais. Comme elle ne pouvait pas les emmener � Bruxelles o� ils auraient fait double emploi, elle en fit en un tour de main des "experts nationaux". Avec l'indemnit� qui y correspond. Quelques 100 000 francs belges mensuels (2 500 euros) pour rester � Paris.
Quatri�me volet des tribulations de Mme Cresson : l'affaire Jean-Louis Reiffers. Ce dernier est �videmment un ami d'Edith et sa mise en relation avec la Commission europ�enne commence d'une fa�on tout � fait normale. En 1995, Edith Cresson lance la r�daction d'un livre blanc sur l'�ducation et la formation. Elle a recours en juillet pour ce projet aux services de Jean-Louis Reiffers, doyen honoraire de la facult� des sciences �conomiques de l'universit� de la M�diterrann�e. Reiffers pr�side un groupe de r�flexions dont le mandat a d'ailleurs �t� prolong� en juillet 1998. Et il est effectivement qualifi� pour ce travail. Il a exerc� diff�rentes fonctions � la Banque Mondiale et fut �galement conseiller de Cresson � Matignon pour les questions se rapportant � l'�ducation nationale. L'indemnit� de Reiffers se chiffre � 66 000 FF (10 000 euros).
Or, en 1996, Cresson fait lancer un appel d'offres afin de r�aliser les objectifs d�finis par le fameux livre blanc, con�u, lui, par des fonctionnaires europ�ens sur base des cogitations du groupe de r�flexion... pr�sid� par Reiffers. Et qui r�pond entre d'autres soci�t�s � cet appel d'offres? Une soci�t� au nom de "Jean-Louis Reiffers Conseil". Son projet s'intitule "Accr�ditation des comp�tences" et son co�t se chiffre � 530 000 FF. L'organe de contr�le des appels d'offres int�rieur � la Commission, la CCAM, constate la "proximit� notoire" entre Cresson et Reiffers, mais c�de finalement face aux pressions �crites en date du 16 novembre 1996. Et voil� donc le pr�sident du groupe de r�flexion qui, � travers une soci�t� lui appartenant, ex�cute �galement via un appel d'offres remport�, le programme qu'il a lui m�me pr�conis� et �labor�. Le service du contr�le financier interne de la Commission et l'UCLAF (l'unit� anti-fraude de la Commission), a commenc� en 1998 � enqu�ter sur cette nouvelle affaire. Et ce nouveau cas de favoritisme flagrant envers un proche ne d�range pas du tout Madame Cresson !
(Investigateur 164 du 30 janvier 2003)
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