Les r�v�lations de Botton sur Colombani et consorts
Une interview r�alis�e lors de la sortie du livre "Mes chers complices" de Pierre Botton

L'Investigateur : Avant m�me d'�tre sorti votre deuxi�me livre " Mes chers complices " a cr�e une vive effervescence dans le milieu journalistique. On �voque des pressions sur votre �diteur, sur certains journaux pour qu'ils se dispensent d'en parler et m�me des articles d�programm�s au tout dernier moment ? Qu'en est-il ?


Pierre Botton : ( rires ) . Vous en savez plus que moi ! Ce que je peux dire c'est qu'effectivement il y a un peu d' agitation journalistique pour savoir ce qu'il y avait dans le livre : qui �tait cit� ? qui ne l'�tait pas ? etc;

Il y a surtout eu une grande confusion autour de ma d�marche : Comme une tra�n�e de poudre la rumeur s'est r�pandu : Botton vide son sac, il r�gle ses comptes , il d�clare la guerre aux journalistes en g�n�ral et au " Monde " en particulier.

Or il n'est pas du tout question de cela. Dans ce livre et partant de mon enfance je raconte tout simplement ma vie et comment peu � peu j'ai plong� presque sans m'en apercevoir dans un syst�me qui est celui de la corruption du monde politique. J'essaye de r�pondre au travers de ma propre exp�rience � des questions toutes simples. Pourquoi n'en finit -on jamais avec les affaires, en d�pit de toutes les lois cens�es am�liorer la "transparence" du financement des partis politiques ? Pourquoi cela ne cesse t-il jamais ? Je crois que je relate mon propre parcours sans complaisance aucune.

C'est ce qui je crois m'autorise � parler des gens que j'ai pu cotoyer, � d�crire de l'int�rieur ce syst�me et le savant m�cano de complicit� m�diatico/ journalistique sans lequel il ne pourrait perdurer. Je ne viens pas dire ah c'est affreux, j'ai �t� condamn� alors que j'�tais innocent. Au contraire je pense que si je suis all� en prison c'�tait parfaitement m�rit� .

J'ai v�cu en dehors des lois pendant des ann�es, parce que j'�voluais dans un monde celui du pouvoir , de la politique dont les principaux acteurs pensent que les lois, les r�gles c'est pour les autres et o� l'on cultive l'id�e d'impunit�. Ce que j'essaye de faire comprendre dans mon livre c'est que je n'avais au d�part aucune pr�disposition pour devenir un voyou de la politique ni pour fabriquer de la fausse facture au kilom�tre.

Tout cela s'est fait tr�s "naturellement" si je puis dire, parce qu'il existe un climat g�n�ral dans les sph�res du pouvoir politique qui l'encourage, une loi du silence, entretenue par les fameux "complices".

Parmi ces fameux "complices" vous alignez une belle brochette de "grandes signatures" de la presse fran�aise. On ne va toutes les citer mais quand m�me Philippe Alexandre, Pierre Luc S�guillon et m�me Jean - Marie Colombani le directeur du Monde. Selon vous l'un aurait profit� de votre avion avec sa famille, les deux autres auraient entrain� le candidat Michel Noir lors de s�ances de "m�dias training" prestations qui auraient �t� r�gl�es en billets de 500 francs.

Pierre Botton : Mais vous savez c'est un peu une vraie/ fausse d�couverte, presque de l'histoire ancienne. C'est Michel Noir qui a d�pos� il y a maintenant presque dix ans devant la justice et qui racont� comment de grands journalistes de la presse �crite ou de la t�l�vision venaient lui dispenser des cours des m�dia - training � son domicile.

Michel Noir a encore expliqu� qu'en �change les m�mes repartaient avec une enveloppe de trois � cinq mille francs au terme de chacune de ces le�ons particuli�res . Il a cit� les noms, Colombani, Pierre Luc S�guillon, etc . On voit bien o� est le probl�me. Ces journalistes disposent d'une influence consid�rable. Mais est- ce leur m�tier d'entra�ner le mardi un responsable politique qu'ils vont interviewer le jeudi ou dont ils vont rendre compte de l'action?

Jean Marie Colombani conteste formellement les affirmations de Michel Noir !

Pierre Botton : Ah bon ? Et o� l'avez-vous jamais entendu s'exprimer sur la question ? Colombani et S�guillon ont �t� entendus par la justice mais personne n'a jamais �voqu� ces auditions. Ce qui est remarquable lorsque l'on se souvient de tout le battage qui a �t� fait autour des voyages de Patrick Poivre d'Arvor qui avaient �t� r�gl� sur ma soci�t�. Reportez vous � la collection du "Monde" lors du proc�s en 1993 et vous verrez comment PPDA y fut maltrait�. C'est aussi cela la complicit� : un violent coup de projecteur sur une cible d�sign�e un temps aux yeux de l'opinion comme la brebis galeuse mais l'omerta compl�te sur le syst�me lui m�me.

La justice a t-elle poursuivie ses investigations ? Y a t-il eu des sanctions ?

Pierre Botton : non les journalistes mis en cause par Noir ont �t� entendus et puis l'affaire a fait "Pschiiit ". �a c'est arr�t� l�. Il faut savoir que le diable se niche dans les d�tails. Si PPDA a �t� accroch� par les juges c'est parce qu'il avait b�n�fici� de voyages r�gl�s sur mes soci�t�s; il y avait donc des traces des factures. Avec le r�glement des prestations en liquide c'est plus difficile � �tablir. De plus l'affaire ne risquait pas de prosp�rer sur le plan judiciaire puisque le m�dia/ training et ses aspects sonnants et tr�buchants devait �tre rapidement couvert par une loi d'amnistie relative au "financement des partis politiques".

Une chose est certaine Pierre Luc S�guillon a reconnu les faits devant le juge: tant le m�dia/ Training que les 5000 francs vers�s en liquide. Colombani lui a d�clar� au juge :" selon moi ce n'�tait pas du m�dia/ trainning mais une "conversation film�e". Il faut appr�cier la nuance �. Il conteste aussi avoir �t� r�mun�r� pour cette " conversion film�e". Lorsque le juge lui pose la question de savoir pourquoi l'ancien ministre et maire de Lyon le met alors en cause Colombani �voque une op�ration contre "le Monde"�

Mais vous m�me � l'�poque vous n'avez pas confirm� les affirmations de Michel Noir ?

Pierre Botton : ai-je �t� int�rrog� � ce sujet ? Non ! Jamais ! Il faut mesurer l'embarras suscit� par cette "petite affaire" j'en conviens mais parfaitement embl�matique des m�urs de ce milieu. Michel Noir avait �t� la coqueluche des m�dias pendant des ann�es, la guest star de toutes sortes d'�mission. Evidement tout cela n'�tait pas gratuit. Alors plut�t que d'entrer dans des pol�miques aussi inutiles que d�licates pourquoi �voquer les accusations de Noir m�me pour les d�mentir ? Autant les passer sous silence �.

Vous dites tout cela n'�tait pas gratuit ? Pourriez vous �tre plus pr�cis ?

Pierre Botton : Ma soci�t� Vivien est sorti exsangue de l'aventure . Avec un trou de 11 millions de francs. De quoi avoir une id�e du "juste prix" des campagnes �lectorales.

Comment une soci�t� dont le chiffre d'affaire annuel est de 7 millions de francs peut -elle sortir de ses caisses 11 millions de francs.

Pierre Botton : ( rires ) Ca c'est une bonne question que je vous invite aller poser au Cr�dit Lyonnais� Je crois que c'est une parfaite illustration de ce sentiment d'impunit� absolue qui habite le sommet de la classe politique. Qui peut en effet se permettre d'aller voir son banquier pour lui r�clamer un d�couvert �quivalant � un an et demi de son salaire , le tout sans aucune garantie ?

Tout s'arrange toujours dites vous � Votre s�jour en prison d�montre le contraire !

Pierre Botton : Je n'ai pas eu des ennuis parce que j'avais des activit�s d�lictueuses en mati�re de financement politique mais parce qu'� partir de 1988 Michel Noir s'est trouv� en concurrence directe avec Jacques Chirac. Le coup de tonnerre a �t� la d�claration dans le Monde de Michel Noir selon laquelle il valait mieux perdre les �lections que son �me. A l'�poque la droite du RPR, Chirac , Pasqua , sont partisans de faire ce qu'il faut pour r�cup�rer les voix du Front National. Beaucoup pensent aussi que la Pr�sidentielle de 1988 sera la derni�re chance de Chirac d'acc�der � l' Elys�e. L' article de Noir qui conseille donc � Chirac de "perdre les �lections" a donc entra�n� des r�actions d'une violence inouie au sein du RPR. A tel point que Michel est venu se cacher plusieurs jours chez moi. Il n'osait pas repara�tre devant Chirac qui voulait le forcer � d�missionner du gouvernement .

Michel Roussin le grand manitou des services secrets appellait toutes les heures chez moi en me disant : Je sais qu'il est l� ! Je r�pondais : non il est pas l� �. Roussin a m�me finit par envoyer deux policiers des "services" .

Ensuite donc �a �t� la guerre � mort entre Chirac et Noir. Ma chute n'a donc rien a voir avec un sursaut de morale au sommet de l' Etat . Je pourrais d'ailleurs l'illustrer d'une autre fa�on. En 1992 alors que je suis en prison et que mon cas d�fraye la chronique, suscite des indignations multiples et vari�es au sein de la classe politique, dans le m�me temps le chauffeur de Jacques Chirac n'en continue pas moins d'aller porter des enveloppes pour r�gler en liquide ses fameux voyages.

Vous �voquez les "services ". On trouve une bien curieuse anecdote dans votre livre avec ce r�cit de la d�mission forc�e d'un haut fonctionnaire qui refusait de tripatouiller les statistiques du commerce ext�rieur ?

Pierre Botton : Exact . Michel Noir qui �tait donc ministre s'inqui�tait d'un mauvais chiffre � venir du commerce ext�rieur. Il m' a donc envoy� moi qui n'avait aucune fonction officielle rencontrer ce haut fonctionnaire pour lui demander s'il ne pouvait int�grer une commande d'Airbus � venir afin de gonfler artificiellement cette statistique. Michel y tenait beaucoup car il devait participer � une �mission et il �tait hors de question qu'il se pr�sente avec de mauvais r�sultats. C'est cela la communication. Bon cette personne apr�s m'avoir �cout�e m'a foutu � la porte . C'�tait tout � fait normal. Simplement 6 semaines plus tard elle n'�tait plus l� . elle avait demand� sa mutation.

le site de Pierre Botton

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