Autour d'un double meurtre dans les environs d'Ajaccio
Mardi, 18 f�vrier 2003
Deux hommes circulant en voiture ont �t� tu�s par balles lundi 17 f�vier ers 10h40 dans les environs d'Ajaccio par deux individus casqu�s roulant � moto et deux complices � bord d'un v�hicule vol�. Les deux victimes, S�bastien Cuttoli, 25 ans, et Christian Battesti, 47 ans, �taient connues des services de police pour des braquages et des attentats. Christian Battesti avait milit� au FLNC dans les ann�es 1980 et avait �t� condamn� pour avoir particip� � la tentative d'extorsion de fonds puis au meurtre du coiffeur Schoch en 1983 (voir plus loin le t�moignage du commissaire Broussard). Les deux hommes sont tomb�s dans un guet-apens tendu par quatre individus, deux hommes casqu�s circulant � moto et deux autres dans un v�hicule vol� il y a quelques jours � EDF. Les deux victimes circulaient dans une voiture de location.

Les corps ont �t� cribl�s de balles, une soixantaine d'�tuis de diff�rents types de munitions ayant �t� retrouv�s sur place. La m�thode d'assassinat a �t� jug�e " tr�s professionnelle ". La voiture a �t� aveugl�e par un tir de chevrotine puis arros�e au fusil. Enfin les victimes ont �t� cribl�es de balles de pistolet et de revolver. S�bastien Cuttoli appartenait � cette nouvelle g�n�ration qui a fait ses premi�res armes il y a � peine quelques ann�es. Christian Battesti, appartenait de son c�t�, au milieu ajaccien. Dans les ann�es 1980 il avait �t� l'un des premiers voyous � servir la cause nationaliste f�t-ce par la bande. Pierre Poggioli alors dirigeant du FLNC nie avoir alors utilis� ces petits voyous afin d'ex�cuter les basses �uvres de son organisation clandestine (voir ce qu'il en �crit plus bas). Tous ses successeurs l'accusent n�anmoins d'avoir initi� cette pratique qui fit de nombreuses victimes si on en croit Fran�ois Santoni et Jean-Michel Rossi dans " Pour solde de tous comptes " (Ed. Deno�l)

" L'imp�t r�volutionnaire a �t� pratiqu� depuis le d�but de la lutte. [...] Le commer�ant Ch�ze, � Ajaccio, est abattu aux �les Sanguinaires pour avoir refus� de verser 50 000 francs. Le coiffeur Schoch est assassin� le 8 f�vrier 1983 � Ajaccio. Cette affaire fait grand bruit et contraint le Front � reconna�tre la pratique de l'imp�t r�volutionnaire. Ce qui n'emp�che pas Garguy, commer�ant rue Fesh et ami de Ch�ze, d'�tre assassin� � son tour. Dans la r�gion de Carg�se, c'est le fils Renouard, un jeune homme de dix-neuf ans, qui est tu� uniquement pour faire pression sur son p�re, propri�taire d'un h�tel. "


Christian Battesti avait �t� m�l� � de nombreux m�faits. Il appartenait au milieu marginal ajaccien que l'on retrouvait souvent avec d'autres individus au pass� nationaliste. Dans le chaptire tir� du livre du commissaire Broussard, ce dernier indiquait les personnes par des initiales. Nous ne les avons remplac�es que pour ce qui concerne Christian Battesti.

Commissaire Broussard M�moires 2, Plon

L'assassinat du coiffeur Schoch

Une chose perturbait par-dessus tout les leaders du FLNC : notre intention, clairement affich�e, de montrer les liens entre certains terroristes et les voyous. Si les " purs " de la lutte pour l'ind�pendance avaient bonne conscience, les autres redoutaient d'appara�tre sous leur vrai visage. De crainte d'�tre assimil�s � des truands, certains responsables nationalistes prirent les devants le 27 janvier, lors d'une conf�rence de presse dans le maquis." L'imp�t r�volutionnaire ne concerne pas les Corses. Il ne concerne que les Fran�ais profitant des bienfaits du colonialisme du fait de leurs activit�s �conomiques importantes. "
Ce rappel embarrass� avait un double objectif. D'abord, d�noncer d'authentiques malfrats qui, sous couvert du combat politique, se livraient au racket. Ensuite, se d�marquer d'actions peu glorieuses que le FLNC avait pourtant commandit�es et revendiqu�es. Autrement dit, le Front ne savait plus comment justifier tous ses actes de violence.
Il cherchait aussi � nous intimider, plus ou moins directement. C'est ainsi qu'aucun des contacts nou�s avec des propri�taires d'Ajaccio pour trouver un logement n'aboutissait. Par crainte du FLNC, personne ne voulait me loger. Nous occupions toujours, Mancini et moi, la " chambre du ministre"!
Les s�paratistes, sans doute irrit�s de nous voir si sereins, d�cid�rent d'accentuer la pression. Dans la nuit du 3 au 4 f�vrier, la pr�fecture fut frapp�e par une explosion. L'engin, plac� sur le rebord d'une fen�tre situ�e au rez-de-chauss�e (c�t� rue), pulv�risa les vitres de notre chambre. Le souffle renversa quelques meubles.
Peu apr�s, un appel anonyme parvenait au commissariat.
Un homme, affirmant s'exprimer au nom des Brigades r�volutionnaires corses (BRC), une branche dissidente du FLNC, exigeait ma pr�sence au t�l�phone dans les cinq minutes.
Je n'avais que la rue � traverser pour me rendre au commissariat. Nouvelle communication t�l�phonique.
- Broussard ?
- Lui-m�me.
- Ici les BRC.
- J'�coute.
- C'est un premier avertissement qui vous concerne personnellement. Votre code d'identification est 18-24. On vous rappelle.
Cette technique du code permettait d'authentifier les appels anonymes.
Deux heures plus tard, nouvel appel:
-18?
- 24.
- Monsieur Broussard, vous avez quarante-huit heures pour quitter l'�le. Dans le cas contraire, vous savez ce qui vous attends.
- Qu'est-ce qui m'attend?
- Vous verrez bien.
- Je resterai en Corse et je t'emmerde!
- Vous �tes venu seul en Corse et nous le savons.
- Et alors? O� voulez-vous en venir?
- Votre famille est rest�e � Paris. Nous le savons, nous sommes au courant de tout.
- Bande de l�ches, vous n'�tes pas dignes d'�tre Corses!
" L�ches ", sans doute, mais aussi bien inform�s, puisque ma femme et mes deux fils �taient effectivement rest�s dans la capitale. Par crainte d'une action contre eux, je demandai que 1 patrouilles soient renforc�es autour de mon domicile parisien.
Le surlendemain, l'attentat de la pr�fecture fut officiellement revendiqu� par les BRC.
En fait, nous �tions encore dans une p�riode d'observation. Pour conna�tre quelque peu la mentalit� corse, je savais que ces menaces avaient valeur de tests. Il ne fallait surtout pas craquer changer nos habitudes. Dans une �le o� tout se sait, nous voulions maintenir le cap de la s�r�nit�. D'autant que la population, sensible au moindre signe d'accalmie, commen�ait � reprendre confiance. Les restaurateurs h�sitaient de moins en moins � nous accueillir. Je me souviens ainsi d'un excellent d�jeuner dans une auberge des environs d'Ajaccio tenue par une famille corse. C'�tait un dimanche. Mancini et deux inspecteurs m'accompagnaient. Au milieu du repas, tandis que nous savourions des merles grill�s, la sonnerie du t�l�phone retentit. Le petit-fils, visiblement troubl� par cet appel, passa le combin� � sa grand-m�re. La vieille femme s'exprimait tant�t en fran�ais, tant�t en corse. Elle parlait si fort sur le ton de la col�re, que tous les clients firent silence.
" Je re�ois qui je veux !" criait-elle � son interlocuteur. Notre pr�sence dans cette auberge indisposait les nationalistes locaux D�s qu'elle eut finit de les enguirlander en les traitant de " jeunes cons ", la vieille dame se tourna vers nous: " Messieurs, vous �tes ici chez moi, vous reviendrez quand vous voudrez, vous serez toujours les bienvenus!"
Les autres clients, des Corses pour la plupart, nous adress�rent un regard approbateur. Au moment du dessert, on nous apporta une bouteille de champagne, offerte par l'un des groupes de convives. Nous n'avons jamais su de qui il s'agissait.
Le 9 f�vrier au matin, alors que se poursuivait le travail de relance de la machine polici�re, une nouvelle dramatique fit le tour de la ville: non loin d'Ajaccio, des chasseurs venaient de d�couvrir le corps d'un homme d'environ soixante-dix ans, la t�te fracass�e par un coup de feu tir� � bout portant, derri�re l'oreille droite. Sur sa veste, son - ou ses - agresseur (s), avai(en)t �pingl� une feuille de papier quadrill�. Sur cette feuille, le message suivant, en lettres b�tons trac�es � la r�gle: " AFFAIRE M. SCHOCH TERMIN�E. "
Andr� Schoch tenait un salon de coiffure sur le cours Napol�on, en plein centre-ville. Install� sur l'�le depuis quarante-huit ans, cet Alsacien passait pour un homme sympathique. Il menait une existence paisible, sans aucune activit� politique. Tout le monde savait n�anmoins qu'il �tait rackett� et qu'il avait toujours refus� de payer.
Chaque soir, � la fermeture, cet homme d'habitudes rejoignait � pied le parking, distant d'une centaine de m�tres. Il r�cup�rait sa voiture, repassait au salon afin de prendre la recette de la journ�e puis rentrait chez lui, dans la banlieue d'Ajaccio. Il proc�dait toujours de la sorte depuis qu'il avait �t� agress� sur le trajet du parking.
Le 9 f�vrier, jour de la d�couverte du corps, les inspecteurs constat�rent que son v�hicule �tait gar� sur le parking et que la recette n'avait pas quitt� la caisse du salon. Quant aux clefs de la voiture, elles se trouvaient dans sa main droite.
Qu'avait-il fait en sortant, vers 20 h 15? L'enqu�te de voisinage n'apporta aucun �l�ment d�cisif. Dans le quartier, personne n'avait rien vu, rien entendu. Deux cents personnes furent interrog�es. En vain. C'�tait � se demander si Andr� Schoch, personnage connu de tous, avait bien emprunt� son trajet habituel!
En accrochant une feuille sur sa veste, le - ou les - auteur(s) de l'agression avai(en)t n�anmoins donn� une orientation � l'enqu�te. " AFFAIRE M. SCHOCH TERMIN�E": ce message semblait se rapporter aux menaces dont le coiffeur faisait l'objet. Les racketteurs �taient-ils pass�s aux actes? Probablement. Mais pour comprendre cet aspect de l'affaire, il faut remonter un an plus t�t, � une �poque o� je n'�tais pas encore en poste.
Le 22 janvier 1982, une bombe explose devant le salon de coiffure. Ce n'est qu'une premi�re �tape, celle de la mise en condition. Suivent, en effet, � partir du mois de mars, des appels anonyme de jour comme de nuit. Andr� Schoch d�croche son combin� mais il n'entend rien, aucune voix, juste le souffle accentu� d'une respiration. Bient�t, les menaces se font plus pr�cises, par lettres et au t�l�phone. Au nom du FLNC, deux hommes et une femme exigent le paiement de " l'imp�t ". Leurs appels sont parfois espac�s de plusieurs semaines, de mani�re � redonner un peu d'espoir leur " proie ". Le coiffeur essaie de r�sister � ce harc�lement.
Il cherche � expliquer pourquoi il s'est install� ici, comment il a aim� l'�le. Un extrait de conversation:
- All�, monsieur Schoch?
- Oui?
- C'est pour ce soir.
- Ah, ce soir? Il m'est impossible... je suis dans l'impossibilit�... Je n'ai pas pu r�unir la somme...
- Monsieur Schoch, on ne plaisante pas.
- Moi non plus, je ne plaisante pas. Vous savez, je voulais justement vous dire: il y a quarante-huit ans que j'habite en Corse j'ai trois enfants qui sont n�s en Corse...
- �a ne nous int�resse pas...
- Alors je suis peut-�tre aussi corse que vous.
- Dites-nous si vous allez payer ou si vous n'allez pas payer.
- Je veux bien mais, cette somme-l�, ce n'est pas possible.
- Monsieur Schoch, il y a une contradiction dans ce que vous dites. Vous dites " je suis plus corse que vous ", donc j'ai le droit de ne pas payer, et en m�me temps, vous me dites "laissez-moi un d�lai pour que je puisse r�unir la somme ". Alors, il faudra savoir!
- Monsieur, je suis venu en Corse en 1934 et j'ai soixante-sept ans.
- Vous �tes sur la liste de nos objectifs et...
- Je tiens � vous signaler que...
- Vos explications ne nous int�ressent pas! Dites-nous comment si, oui ou non, vous allez collaborer avec nous. Est-ce que vous �tes d'accord � cinquante (mille francs).
- Combien?
- Cinquante.
- Cinquante?
- Oui, c'est notre dernier mot, Monsieur Schoch.
- Je comprends bien mais moi, je... �coutez, je vous propose trente.
- Non. �a ne marche pas. En aucune fa�on. Ou cinquante ou rien du tout. Et maintenant �a suffit parce que, pour des raisons de s�curit�, nous allons nous arr�ter. Oui ou non? Ce coup de t�l�phone sera le dernier si vous acceptez.
- � condition de ne plus vous revoir.
- �a, bien entendu. Vous serez ray� de la liste de nos objectifs. Alors, ce soir?
- Ah non, pas ce soir.
- Alors nous reprendrons contact avec vous. Cinquante!
M. Schoch est oblig� de payer s'il veut rester en vie. Le SRPJ d'Ajaccio cherche � arr�ter les racketeurs mais l'op�ration �choue, le 20 avril 1982, au moment o� le coiffeur doit leur verser "l'imp�t" dans le village d'Ucciani.
Le 23 avril, puis le 20 juillet, deux nouvelles explosions provoquent d'importants d�g�ts au salon. �trangement, ces attentats ne figureront pas sur la liste des revendications transmise � la presse locale par le FLNC. Les racketteurs appartiennent-ils vraiment au Front ou � une branche dissidente? L'organisation s�paratiste adresse au coiffeur un message troublant: " Les attentats dont vous avez �t� l'objet ne sont pas de notre fait bien que cela vous ait �t� pr�sent� ainsi. Nous avons connaissance de votre int�gration dans notre pays. " Le FLNC ne serait donc pas concern� et tient � le faire savoir! Mais la pagaille est telle, au sein du mouvement, qu'il devient difficile de dire qui fait quoi. D'autant que le coiffeur continue de recevoir des appels t�l�phoniques! Il s'agit toujours des m�mes personnes, deux hommes et une femme, dont il enregistre les voix: "En ce moment m�me, votre maison est surveill�e, votre magasin est surveill�, ce ne seront pas vos biens mais votre famille qui sera atteinte (...) D�s maintenant, je donne l'ordre de vous faire ex�cuter. " Ces menaces ne seront pas suivies d'effets. Du moins, pas en 1982...
Les semaines passent et le coiffeur ne sait toujours pas s'il s'agit vraiment du FLNC. Comble de la confusion, il re�oit une lettre sign�e du Front r�clamant cette fois une " contribution � la lutte du peuple corse"! Un num�ro de code lui est m�me attribu�, le " 656 ". " Nous vous contacterons" pr�cise ce document. Quelques mois plus tard, le 9 f�vrier 1983, son corps sera d�couvert pr�s du village d'Alata...

Andr� Schoch venait donc de mourir pour avoir refus� le chantage. Les seuls indices en notre possession �taient ces fameux enregistrements. Trois voix sans visages, des personnes sans doute �g�es de vingt � trente ans. Selon des policiers locaux, la voix f�minine laissait percer une l�g�re intonation ajaccienne.
Un mois � peine apr�s notre installation, cette enqu�te avait �galement valeur de test. Nous �tions condamn�s � r�ussir. La ville �tait traumatis�e et les journalistes, qui avaient plus ou moins d�sert� l'�le apr�s l'agitation du d�but de l'ann�e, revenaient soudain en nombre.
Ange Mancini demanda au juge d'instruction Hubert Breton l'autorisation de diffuser les enregistrements sur les ondes nationales afin de solliciter les t�moignages; l'objectif �tant non seulement d'arr�ter des personnes suspect�es d'avoir commis un assassinat mais aussi de les emp�cher de r�cidiver. Sans h�siter, le juge d�livra une commission rogatoire � cet effet. Tout au long de l'affaire, il accordera au SRPJ une confiance totale. Un moment d'entente justice-police.
La diffusion des enregistrements �tait une d�marche assez rare. La presse �crite s'en fit largement l'�cho. En revanche, les m�dias directement concern�s, en l'occurrence Radio-Corse, Radio-Corse internationale et FR3 r�gionale, refus�rent de nous aider. Au nom de la "d�ontologie ", les trois r�dactions se prononc�rent contre un tel proc�d�, jug� " scandaleux ". Assurant qu'ils n'avaient pas � participer � ce qu'ils qualifiaient " d'appel � la d�lation", les nationalistes mena�aient de faire gr�ve. Jean-Louis Eyssartel, directeur de Radio-Corse, d�clara: " Notre position est claire. Le journaliste n'a pas � confondre son r�le avec celui du policier. D�s r�ception de 1 ordre de r�quisition des policiers, j'ai donc aussit�t d�fendu ce point de vue d�ontologique aupr�s de mon pr�sident-directeur-g�n�ral, qui a d�cid� d'en appeler � la Haute Autorit�."
La controverse �tait lanc�e. �tait-ce contraire � la d�ontologie journalistique que de diffuser sur les ondes du service public voix de personnes suspect�es d'assassinat et capables de r�cidiver tout moment? D'autres pays d�mocratiques tels que la Suisse �tats-Unis, la Grande-Bretagne, l'Allemagne estimaient ce proc�d� normal. En France aussi, il y avait des pr�c�dents, � Lyon Grenoble...
L'attitude des m�dias audiovisuels me r�voltait. Ces journalistes �taient tout de m�me mal plac�s pour invoquer la d�ontologie! �taient-ils en paix avec leur conscience lorsqu'ils assistaient � des conf�rences de presse " clandestines " du FLNC? Avaient-ils des scrupules quand ils se faisaient les relais d'hommes arm�s, appelant � la guerre contre la R�publique fran�aise? S'entouraient-ils de pr�cautions morales pour reprendre les messages de revendication du FLNC? Nous ne comprenions pas quelle �tait la diff�rence entre la diffusion d'un portrait-robot (pratique courante dans la presse) et celle d'une voix. L'enjeu �tait pourtant d�terminant; c �tait m�me une question de vie ou de mort puisque d'autres personnes �taient sans doute en danger. Nous n'avions pas d'autres moyens pour les mettre en garde et les inciter � se faire conna�tre.
D�s mon arriv�e en Corse, plusieurs de mes interlocuteurs, policiers, �lus ou " simples " citoyens, m'avaient alert� sur le probl�me de certains m�dias insulaires. Avec cette pol�mique, j'avais la confirmation de leurs critiques: la d�ontologie avait bon dos et une partie des journalistes, pr�tendument " neutres ", ne cachaient pas leur sympathie pour la cause nationaliste. C'�tait leur droit, j'en conviens volontiers. Mais cela devait-il les emp�cher de faire leur travail objectivement?
Bien des hommes politiques, de droite comme de gauche, s'�tonnaient de la place accord�e par FR3 aux nationalistes. Il fallut attendre un rapport parlementaire, le 13 juin 1984, pour que tout cela soit port� � la connaissance du S�nat. Que lisait-on dans ce rapport? Un constat �difiant: les journalistes de FR3 Corse et de Radio-Corse �taient d�crits comme " peu rigoureux sur l'�thique lorsqu'il s'agissait de diffuser des informations �manant de s�paratistes ". Et les s�nateurs de s'indigner: " FR3 Corse et Radio-Corse sont devenus les porte-parole des mouvements s�paratistes et, de fa�on plus g�n�rale, de la cause autonomiste. " Preuves � l'appui, les parlementaires ajoutaient: " Il ressort clairement que les mouvements dissous sont surrepr�sent�s sur les antennes du service public r�gional. M�me en ne retenant que les chiffres avanc�s par les soci�t�s, on rel�ve que des individus qui, lors d'�lections, arrivent p�niblement � rallier 2 % des suffrages, se trouvent � occuper, selon les p�riodes, un temps d'antenne de cinq � dix fois sup�rieur ". Autre remarque des s�nateurs: " Est-il normal qu'une radio du service public diffuse sur ses antennes des chants (...) o� l'on exalte la " lib�ration de l'oppression coloniale"
et o� l'on va m�me jusqu'� en appeler au meurtre? "On les �gorgera!" dit une chanson. "
La question des m�dias et du nationalisme �tait complexe. Qu'on le veuille ou non, les s�paratistes et leurs " fr�res " autonomistes repr�sentaient un courant d'opinion. A ce titre, ils avaient droit � la parole; sauf; �videmment, quand ils se revendiquaient du FLNC, organisation dissoute. Ce droit � la libre expression prenait toutefois des proportions stup�fiantes sur FR3. Une vraie propagande aux frais des contribuables! Les temps d'antenne, le choix des reportages, et parfois le comportement des pr�sentateurs... tout paraissait " orient� " politiquement! Ces quelques journalistes, minoritaires mais influents, avaient le devoir de relater les actes de violence mais devaient-ils pour autant servir de courroies de transmission aux extr�mistes? Heureusement, tous leurs confr�res n'avaient pas la m�me conception de ce m�tier. Lorsque la pol�mique sur les enregistrements prit mauvaise tournure, plusieurs d'entre eux me firent savoir qu'ils d�sapprouvaient la r�action de FR3 et des radios.
Devant la gravit� de la situation, je demandai � �tre entendu par la Haute Autorit�. J'expliquai mon point de vue, insistant sur le fait que l'on diffusait sans probl�me des portraits-robots et surtout que d'autres personnes �taient en danger. Rien n'y fit: m�me s'ils me parurent g�n�s par cette affaire, les "sages " confirm�rent leur position initiale. On ne pouvait organiser un " appel � la d�lation"! Je crois aussi qu'on ne pouvait se permettre de provoquer un conflit avec les puissants syndicats du service public... Et puis, disons-le clairement, c'est une attitude tr�s parisienne que de craindre la Corse. Pour �tre certains d'y retourner en vacances en toute s�curit�, on �vite de contrarier les poseurs de bombes! Les exemples ne manquent pas: combien d'administrations centrales, combien de f�d�rations sportives (le football notamment), combien d'organes de presse, n'ont pas agi comme ils devaient le faire, par crainte de repr�sailles?
Il restait � trouver un autre moyen d'exploiter les bandes audio. En d�finitive, il fut d�cid� de brancher, au commissariat d'Ajaccio, un r�pondeur t�l�phonique diffusant quelques extraits des conversations entre le coiffeur et ses racketteurs. Un r�pondeur que le public pourrait interroger librement. La presse accepta de publier le num�ro de cette ligne sp�ciale, le 21-06-18. R�sultat: quatre � cinq mille appels par jour! Les premiers � nous contacter furent d'autres victimes du racket, des commer�ants pour la plupart. Jusque-l�, ils n'avaient jamais os� se manifester. Chacun y allait de son t�moignage, de ses accusations, assurant avoir reconnu les voix. Bien s�r, il fallait effectuer un tri dans ce flot de renseignements plus ou moins cr�dibles, mais le r�sultat d�passait nos esp�rances. Nous avions la preuve que la population �tait pr�te � aider la police et la justice, � condition d'y mettre les formes.
Deux appels retinrent notre attention. Le premier fut re�u par le g�n�ral de la division militaire d'Ajaccio. Un correspondant anonyme affirma avoir identifi� l'homme qui disait " je donne l'ordre de vous ex�cuter " comme �tant un certain Christian B., originaire d'Arro, en Corse-du-Sud. Un second correspondant pr�f�ra s'adresser au commissariat. Il ne livra aucun nom mais fournit le signalement d'un homme (mince, petite taille, moustache noire), le num�ro d'immatriculation de sa voiture et l'adresse de son bar attitr� � Ajaccio. Tout correspondait au m�me Christian Battesti., vingt-sept ans, sans profession, d�j� connu des services de police. Si son appartenance au FLNC n'�tait pas clairement �tablie, ses liens avec le milieu du banditisme ne faisaient gu�re de doute. Quelques semaines plus t�t, il avait d'ailleurs �t� soup�onn� d'avoir particip� � des vols � main arm�e, sans que sa culpabilit� puisse �tre �tablie avec certitude.
Ces renseignements ne suffisaient pas � faire de lui un v�ritable suspect. Il fallait enqu�ter � son sujet, identifier ses amis, proc�der � des v�rifications.
D'autres informations nous parvinrent bient�t, � l'appui de nos soup�ons. Le 14 mars, fut en effet arr�t� � Paris un homme de trente ans, employ� � la SNCF, recherch� par la PJ ajaccienne et les polices urbaines dans le cadre d'enqu�tes sur des cambriolages et des attentats. Transf�r� en Corse, G�rard G. reconnut plusieurs vols par effraction, des agressions � main arm�e, ainsi que des attentats officiellement revendiqu�s par le FLNC. Le nomm� G. n'avait pourtant rien d'un "politique ". Il n'avait rien � voir non plus avec l'assassinat du coiffeur mais il admit avoir confectionn� des engins explosifs, remis � un " ami ", coauteur de plusieurs attentats. Or l'enqu�te nous apprit que l'ami en question n'�tait autre que Christian Battesti, notre premier suspect! Les �l�ments r�unis contre lui �taient d�sormais assez solides pour l'interroger.
Appr�hend� le 15 mars, Battesti reconnut sa participation � des braquages (un supermarch�, une agence bancaire...), ainsi qu'� des attentats revendiqu�s par le FLNC. Au moment de son arrestation, il avait sur lui le num�ro de code attribu� � un commer�ant ajaccien victime d'une tentative d'extorsion de fonds. Et l'affaire d'assassinat dans tout cela? Battesti admit que l'une des voix enregistr�es �tait la sienne. Il raconta qu'� l'occasion d'une r�union du FLNC dans le maquis, il s'�tait vu confier la mission de faire payer " l'imp�t " au coiffeur. On lui avait aussit�t donn� le code d'identification de M. Schoch et ses divers num�ros de t�l�phone. S'il revendiquait le r�le principal dans le racket, il refusait obstin�ment de d�noncer ses deux complices. Quant � la fameuse phrase " je donne l'ordre de vous ex�cuter ", il indiqua l'avoir prononc�e sous l'emprise de la col�re. � l'entendre, il n'�tait pas responsable de la fin tragique du coiffeur. Mieux, il d�sapprouvait cette ex�cution!
Dans les jours suivants, les arrestations se succ�d�rent. Il y eut d'abord celle de Marie-Lucie N., le 17 mars. Cette femme de trente ans, m�re de trois enfants, apparaissait tant�t comme l'�g�rie tant�t comme la victime de cette �quipe. Bien que fort peu loquace, elle reconnut sa voix. C'est par amiti�, � la demande d'une personne proche du FLNC, qu'elle avait particip� � la tentative d'extorsion de fonds.
La troisi�me voix �tait celle d'un instituteur ajaccien de trente-trois ans, Jean-Yves A. Connu des services de renseignements pour avoir assist� � des conf�rences de presse du Front, il n'�tait jamais apparu dans des affaires de droit commun. De tous les membres de la bande, c'�tait sans doute le plus sinc�re, celui qui agissait pour la " cause " et non pour l'argent.
En fait, l'assassin n'�tait pas l'une de ces trois personnes mais Ren� T., vingt-huit ans, arr�t� le 17 mars. Cet homme athl�tique aux cheveux bruns et boucl�s �tait �lectricien de formation. Les inspecteurs d�couvrirent chez lui une dizaine de carabines de chasse, 300 grammes de dynamite et deux revolvers. Il admit sa responsabilit� dans plusieurs attentats revendiqu�s par le FLNC et afficha fi�rement son appartenance � ce mouvement. Il avait d'ailleurs pris part � la nuit bleue du 20 ao�t 1982, organis�e par le s�paratistes. Dans la soir�e, � l'issue d'un long interrogatoire, avoua �tre l'unique responsable de l'assassinat du coiffeur. Sans jamais montrer le moindre signe de remords, il d�clara avoir " braqu� " Andr� Schoch au moment o� celui-ci s'appr�tait � monte: dans sa voiture. Sous la menace de son arme, il l'avait emmen� sur la route d'Alata, o� il l'avait abattu d'une d�charge de chevrotine tir�e � bout portant. Il avait ensuite �pingl� sur sa veste le message " AFFAIRE M. SCHOCH TERMIN�E ", r�dig� � l'avance. L'�pingle, d'un mod�le peu courant, provenait de la trousse � couture de sa m�re.
Ren� T. reprochait non seulement au coiffeur son refus de payer l' " imp�t " mais il l'accusait aussi d'avoir tendu un pi�ge aux hommes du FLNC, un an auparavant, lors de la remise de fonds manqu�e, dans le village d'Ucciani. Un point tr�s important, dans cet interrogatoire, nous laissait sceptiques: il affirmait avoir agi seul, de son propre chef, sans en avoir re�u l'ordre du Front...
Tous les membres de la bande, les trois hommes et la femme, se r�clamaient pourtant du FLNC. A les entendre, ils �taient des " politiques ", pr�ts � d�fendre leurs id�es. La preuve: ils avaient particip� � des actions revendiqu�es par l'organisation! Mais ce militantisme, r�el pour l'instituteur, semblait moins �vident pour ses complices, anim�s, � notre avis, par d'autres motivations. Faute de meilleurs arguments, c'est n�anmoins la th�se qu'ils d�fendront quelques mois plus tard, devant le tribunal correctionnel de Bastia
Appartenaient-ils, oui ou non, au Front? Il faut le croire, si l'on en juge par l'embarras du mouvement au moment de ce coup de filet. En arr�tant les racketteurs et l'assassin du coiffeur, nous venions de r�v�ler, pour la premi�re fois, la collusion inextricable du politique et du crapuleux au sein de la mouvance ind�pendantiste. De simples truands, li�s � des nationalistes plus ou moins convaincus, avaient agi au nom du s�paratisme, de la " corsitude ". L'id�al d'ind�pendance constituait un parapluie bien pratique pour les besogneux du banditisme. Ils trouvaient ainsi une l�gitimit� � leurs exactions et une explication de poids, au moment du proc�s.
Ce cas me semblait r�v�lateur de l'�volution du FLNC: entre ceux qui prenaient pr�texte de la " cause " et les " politiques " dispos�s � d�tourner � leur profit les sommes r�colt�es au nom du Front, il restait peu de place pour les " purs ". Il y en avait. Mais de moins en moins...
Apr�s les plasticages d'appartements de fonctionnaires, apr�s les tentatives d'assassinat du docteur Lafay et l'�motion suscit�e par la mort d'Andr� Schoch, l'image du FLNC venait en tout cas de subir un nouveau revers. La direction du mouvement, soucieuse de n'endosser que des actions "nobles ", eut beau tenter de se justifier, r�diger des communiqu�s alambiqu�s, fournir des informations contradictoires, et m�me accuser la police d'avoir "manipul�" certains truands, rien n'y fit: la cr�dibilit� du Front �tait entam�e. Elle l'�tait d'autant plus que plusieurs op�rations men�es en leur temps par B. et T., avaient bel et bien �t� revendiqu�es par le FLNC comme autant de " succ�s" contre "l'Etat colonial"!
Pressentant les dangers de ce dossier, la direction politicomilitaire du Front diffusa, le 26 mars 1983, un communiqu� sur la " d�rive" mafieuse de certains compagnons de route: "Durant la tr�ve, des militants sinc�res au d�part se sont laiss� entra�ner sur une pente dangereuse et inacceptable pour notre organisation... Ils ont ainsi permis � des amiti�s douteuses d'esp�rer s'abriter sous le parapluie politique pour exercer des activit�s � des fins personnelles. Depuis avril 1982, une enqu�te au sein du mouvement a permis progressivement de les d�masquer. C'est ainsi que peu � peu et jusqu'� fin octobre 1982, ils ont �t� les uns et les autres exclus de l'organisation. "
Cette affaire eut un retentissement consid�rable aupr�s de la population et des �lus locaux. Ajout�e aux bons r�sultats obtenus depuis notre arriv�e (95 personnes mises � la disposition de la justice en janvier et f�vrier 1983), elle allait dans le sens voulu d�s le mois de janvier. J'avais d�clar� qu'en s'attaquant aux auteurs de crimes et d�lits sans chercher � conna�tre � l'avance leurs motivations, nous serions amen�s � p�n�trer la mouvance s�paratiste. Alors, nous pourrions mettre en �vidence la collusion des politiques et des truands. En appliquant la Loi, rien que la Loi, sans a priori.
La r�ussite du SRPJ constituait un formidable encouragement. Policiers et gendarmes avaient le sentiment qu'avec le soutien d'une population enfin pr�te � rompre le silence, ils pourraient exercer leur m�tier dans des conditions normales. Cette satisfaction, renforc�e par une large couverture m�diatique, me paraissait cependant excessive. Nous n'�tions sur l'�le que depuis quelques semaines et ce s�jour corse nous r�servait d'autres �preuves...
En d�fintive, T., Battesti. et G. furent condamn�s � sept ans d'emprisonnement pour leur participation � divers attentats. Dans l'affaire Schoch, B. et A. (l'instituteur) furent condamn�s � cinq ans d'emprisonnement pour la tentative d'extorsion de fonds avec menace. Marie-Lucie N., la femme de la bande, �copa de la m�me peine, assortie de deux ans et demi avec sursis. Enfin, pour l'assassinat, Ren� T. fut condamn� � vingt ans, de r�clusion criminelle par la cour d'assises de Paris.

La m�me affaire d�crite par le responsable du FLNC d'alors Pierre Poggioli dans " Journal de bord d'un nationaliste corse " (Ed. de l'aube)

Les op�rations de " financement " du FLNC, c'est-�-dire de pr�l�vement de l'imp�t r�volutionnaire, avaient �t� officiellement mises en place en 1983, pour contrecarrer une infiltration par le milieu sur Ajaccio lors de l'arriv�e du pr�fet de police Robert Broussard. Elles avaient entra�n� l'assassinat du coiffeur Schock par un groupe de personnes qui n'avaient pas ob�i aux injonctions de la coordination r�gionale d'Ajaccio du FLNC. Ces personnes, dont certaines �taient sinc�res, avaient �t� manipul�es par leurs amis et utilisaient le sigle FLNC pour justifier des actes de droit commun. L'�quipe, qui s'�tait renforc�e apr�s la nuit de rupture de la tr�ve en f�vrier 1982, s'�tait lanc�e dans des op�rations de racket sans en r�f�rer � la coordination r�gionale d'Ajaccio. C'�tait pour les isoler que le " canal habituel " avait alors condamn� les attentats contre le coiffeur Schock et pris la d�cision, en direction nationale du FLNC, d'officialiser la lev�e de l'imp�t r�volutionnaire. Il annon�a que toutes les op�rations seraient dor�navant authentifi�es par un communiqu� officiel et que toutes celles qui n'�taient pas d�cid�es et organis�es par le Front � des seules fins politiques seraient syst�matiquement et nominativement d�menties. Malheureusement, peu apr�s, le coiffeur Schock �tait assassin�. Le proc�s fera n�anmoins ressortir la sinc�rit� de l'accus� principal du meurtre et sa manipulation par ses propres amis.

D�s sa cr�ation, le FLNC a abord� le probl�me du financement de l'organisation, mais les sommes r�cup�r�es les premi�res ann�es �taient d�risoires, quelques centaines de milliers de francs anciens. En 1982, nous avions r�ussi � obtenir un soutien financier r�gulier d'un montant initial de 35 000 francs tous les deux mois. Cet argent, venant d'une soci�t� du secteur du tourisme, devint officiellement un fonds de roulement dont nous disposons en permanence. La somme augmenta chaque ann�e pour atteindre 65 000 francs en 1988. Tous les deux mois, un militant de la r�gion d'Ajaccio se rendait � Paris pour r�cup�rer l'argent et nous le distribuions en parts �gales entre les r�gions apr�s avoir pr�lev� 5 000 francs par permanent, chaque r�gion entretenant un permanent. Le reste �tait distribu� dans les " r�gions du Front " ou gard� � disposition en cas de d�penses ponctuelles. Peu d'argent montait en direction nationale (alors appel�e Ghjunta; plus tard devenue u Cunsigliu). Seule � ma connaissance, la somme de 100 000 francs nous �tait parvenue en 1984 via un entrepreneur, pour pr�parer l'�vasion des prisonniers de Lyon en h�licopt�re. Les pr�paratifs bien avanc�s furent arr�t�s quelques jours avant le proc�s, � la demande de certains des prisonniers concern�s.

Peu � peu, l'id�e d'int�resser les r�gions � la recherche de moyens financiers pour l'organisation se fit jour. Le d�bat interne tourna autour du pourcentage (25 � 50 � laisser aux " r�gions du Front " qui menaient l'op�ration. Je n'�tais gu�re enthousiaste. C'�tait l'amorce de d�rives qui allaient se produire immanquablement car la direction politique n'avait, � partir de ce moment, plus les moyens de contr�ler la totalit� et le montant v�ritable des sommes per�ues. Ce syst�me allait se pervertir en devenant la r�gle � tous les niveaux de l'organisation : les secteurs tenaient bient�t le m�me langage aux directions r�gionales, puis les groupes militaires par rapport aux secteurs. Avec l'arr�t de la r�pression, les d�rives du syst�me prirent une ampleur catastrophique d'autant que le FLNC ne d�mentait plus syst�matiquement les attentats qu'il ne coordonnait pas, que bient�t les authentifications lors d'op�rations de financement prirent de multiples aspects dont le " visage d�couvert
A terme, la priorit� allait devenir " plus d'argent pour plus de moyens, pour plus d'hommes, pour plus de poids au sein du groupe, du secteur, de la r�gion, de la direction.

�2003 L'investigateur - tous droits r�serv�s