Lib�ration dat�e du samedi 26 avril 2003 �crit : " Existe-t-il un lien entre l'attentat qui a d�truit, dans la nuit de jeudi � vendredi � Ajaccio, le local qui servait de lieu de pri�re � l'association musulmane marocaine, et la mort d'une jeune femme, voici un an, � l'�le-Rousse ? ". Marc Pivois, le journaliste, n'h�site pas � r�pondre tout aussit�t : " Si l'attentat n'a pas �t� revendiqu�, difficile de ne pas faire le lien avec le tract distribu� dans la nuit du 19 mars � Calvi, Bastia, Corte, Ajaccio et d'autres localit�s de l'�le. "La Corse, notre pays, subit toujours davantage la pression de l'invasion arabo- musulmane." L'Organisation secr�te corse (OSC), qui signe cette diatribe et s'inqui�te de ce que la Corse devienne une "excroissance du Maghreb", affirme vouloir "s'organiser en r�sistance". "
Puis il continue toujours au conditionnel " L'Organisation secr�te corse pourrait �tre n�e en avril 2002 en Balagne, � l'�le-Rousse (Haute-Corse). Le 25 mars 2002, vers 23 heures, Maria-Stella Rocchi appelle au secours depuis son portable. Retrouv�e traumatis�e dans sa R5, en plein maquis, elle raconte qu'un homme "de type m�diterran�en" s'est introduit dans sa voiture, arm� d'un couteau, et l'a contrainte � sortir de la ville. L�, il lui aurait cogn� la t�te contre le pare-brise. La jeune femme, �g�e de 19 ans, d�pose plainte � la gendarmerie puis rentre chez elle avec un ami. C'est au cours de ce retour qu'elle va d�c�der, victime d'un malaise. L'autopsie, qui n'expliquera jamais pr�cis�ment les causes de la mort, r�v�lera cependant qu'elle n'a subi aucun s�vice sexuel et confirme un h�matome au front. Dans les jours qui suivent, une vive �motion traverse l'�le. Si le 3 avril, une manifestation silencieuse se d�roule sans incident, une semaine plus tard, quelques dizaines d'hommes lancent une chasse � l'homme dans la petite ville portuaire. Leurs cibles, ils les connaissent, car parmi les courageux justiciers se trouvent un chef d'entreprise employant des travailleurs au noir. Deux Alg�riens en situation irr�guli�re sont bless�s, l'un d'un coup de couteau dans le dos. "Cette fois, on ne vous ach�ve pas, mais qu'on ne vous revoit plus ici", leur dit-on en substance. Dans le m�me temps, un tract sign� "OSC", sans d�cliner le sens de ces initiales, appara�t, porteur d'une prose � peu pr�s identique � celle distribu�e le 19 mars dernier.
Pendant ce temps, Ridha Miroud et B., les deux Alg�riens bless�s, trouvent refuge � Bastia aupr�s de l'association Fratellanza qui les "met au vert" dans un couvent tenu par des religieuses polonaises. Mais Miroud veut r�cup�rer l'argent que lui doivent ses patrons. Certains, comme le marin p�cheur d'O., l'emploient au noir depuis des ann�es pendant la saison. Idem pour le "paysagiste" Lalande. Miroud affirmera s'�tre abstenu d'aller r�clamer chez certains patrons, car, amoureux de l'identit� corse, ils �taient de la ratonnade dont les deux hommes ont �t� victimes. Il se rend chez Lalande avec deux amis. Comme le patron refuse de le payer sauf, a expliqu� Miroud au juge d'instruction, "avec un kilo d'herbe que le paysagiste cultive", la conversation tourne au vinaigre. Lalande est frapp�, d�lest� de ses cartes de cr�dit et du liquide en sa possession. Il d�pose plainte. Miroud et l'un de ses compagnons sont arr�t�s.
Repr�sailles. Le soir m�me de son incarc�ration � Borgo, le 12 juillet dernier, sept hommes seraient entr�s dans sa cellule pour "r�gler les comptes". Main �cras�e, l'Alg�rien se retrouve � l'h�pital. � sa sortie, le directeur de la prison de Borgo le fait transf�rer � Ajaccio. Tout en niant la r�alit� de l'agression dans une lettre �crite � Jean Filippi, l'avocat de Miroud. Mais trois jours plus tard, affirme Ma�tre Filippi, Miroud est � nouveau victime de repr�sailles � Ajaccio. Il est aussit�t envoy� aux Baumettes � Marseille. "Cela prouve qu'une organisation raciste fonctionne � l'int�rieur des prisons corses, avec des connexions performantes entre les �tablissements et l'ext�rieur", proteste l'avocat Jean Filippi. Une organisation de plus, ou la casquette x�nophobe d'une organisation bien implant�e ? � ce jour, les responsables du lynchage n'ont pas �t� poursuivis. Ni les employeurs au noir. "
Cette th�se serait celle d'une partie des enqu�teurs. C'est au moins ce que pr�tend le quotidien Corse-Matin dat� du Samedi 26 Avril 2003.
" L'attentat de la mosqu�e " un acte raciste "
En relation avec " l'organisation secr�te " qui s'�tait manifest�e derni�rement en Corse " cette hypoth�se semble privil�gi�e. Le ministre de l'Int�rieur en recevant, hier � Ajaccio les repr�sentants de l'Union des Marocains a r�affirm� " qu'il n'accepterait aucune d�rive "
Emotion, c'est le sentiment qui se lisait sur le visage de Mouloud Mesgati, le pr�sident de l'Union des Marocains, hier un peu avant 13 heures, � la sortie de son entretien avec le ministre de l'Int�rieur, � la pr�fecture de r�gion � Ajaccio. Nicolas Sarkozy a pris le temps, au sein d'un emploi du temps particuli�rement charg� de s'entretenir avec une d�l�gation compos�e de cinq membres, apr�s l'attentat d�vastateur qui dans la nuit de mercredi � jeudi, � la sortie d'Ajaccio, a vis� la " mosqu�e " situ�e � Baleone, commune d'Afa (notre �dition d'hier).
Un entretien d'autant plus symbolique que le 3 mai prochain le ministre de l'Int�rieur installera au niveau national le Conseil fran�ais du culte musulman (CFCM) au sein duquel Mouloud Mesgati a �t� �lu.
" Nicolas Sarkozy nous a dit qu'il �tait � nos c�t�s. Il nous a demand� de ne pas nous inqui�ter ", a d�clar� sobrement � la sortie de l'entrevue le pr�sident de l'union des Marocains.
Nicolas Sarkozy qui a publiquement d�nonc� " un acte inqualifiable ", a affirm� clairement, hier, qu'en recevant les repr�sentants de la communaut� marocaine, il entendait t�moigner qu'il ne laisserait rien passer en la mati�re.
" Les membres de la d�l�gation m'ont fait part de leur profonde incompr�hension. Deux, parmi eux, sont en Corse depuis 35 ans. Ce sont des hommes parfaitement int�gr�s. Je leur ai garanti la s�curit� et je leur ai promis de ch�tier les coupables. C'est aussi le signe que nous n'accepterons aucune d�rive en Corse, pas plus qu'ailleurs, a confi� le ministre. Cela est contraire � l'identit� m�me des Corses qui sont avant tout terre d'accueil et de solidarit� ".
Un cadre exceptionnel
Mercredi soir, la 14� section antiterroriste du parquet de Paris a confirm� la saisine de la gendarmerie et de la section de recherches. Si aucune hypoth�se n'est ferm�e, les enqu�teurs privil�gient cependant un acte raciste. " Tous les indices relev�s sur place ont �t� envoy�s � Marseille afin d'aider � d�terminer la nature de l'explosif, a pr�cis� Pascal Bonnaud, commandant le groupement de gendarmerie de Corse-du-Sud.
Le fait que la section antiterroriste soit saisie n'est pas banal, car nous sommes dans un cas de figure o� l'attentat n'a pas �t� revendiqu�. Il s'agit donc d'un cadre exceptionnel qui souligne bien l'int�r�t marqu� au plus haut niveau par le gouvernement puisque la section de recherche a une vocation judiciaire ".
Hier, les enqu�teurs n'excluaient pas l'hypoth�se d'une relation avec l'organisation secr�te corse qui avait fait parler d'elle il y a un mois. L'affaire est en tout �tat de cause prise tr�s au s�rieux. "
Or Lib�ration semble viser le FLNC Union des Combattants � demi-mot. Nos correspondants de Balagne et de Bastia nous donnent une autre th�se �tay�e par des informations pr�cises. L'OSC serait n� � partir d'un petit groupe de militants d'extr�me-droite proches de Jeune R�volution, puis Unit� radicale aujourd'hui Jeunesse identitaristes, implant�s en Balagne et � Bastia. Ils ont profit� de la mort de la jeune fille pour agir. Mais ils n'avaient pas l'implantation n�cessaire pour faire distribuer des tracts dans toute l'�le. Le sigle lui-m�me rappelait celui de l'OAS, cette organisation secr�te mont�e par des militaires fran�ais et des pieds-noirs � la fin de la guerre d'Alg�rie. L'OSC, ou du moins, ceux qui se sont empar�s du sigle, serait des personnes proches du Front national qui ont d�cid� de surfer sur la vague raciste qui s�vit aujourd'hui en Corse. L'attentat aurait �t� essentiellement dirig� contre la venue de Nicolas Sarkozy, accus� par l'extr�me-droite d'avoir c�d� aux pressions islamistes en organisant des �lections parmi les musulmans de France. L'id�e serait alors que Nicolas Sarkozy a deux points faibles : le monde franco-musulman et la Corse. En associant les deux, il serait possible, selon les auteurs, de faire tr�bucher le ministre de l'Int�rieur. L'id�e serait �galement de faire endosser cet attentat � une tendance du nationalisme corse de mani�re � jeter le discr�dit sur lui. Des informations accr�ditant cette th�se transite fort curieusement par une partie de l'extr�me-gauche insulaire. Une r�union entre militants d'extr�me-droite de toute l'�le a eu lieu r�cemment � Bastia. Il y aurait �t� d�cid� une sorte de strat�gie de tension qui durera au moins jusqu'au r�f�rendum. D'autres attentats seraient pr�vus de mani�re � laisser planer l'id�e d'une complicit� entre Sarkozy et l'aile dure du nationalisme. Mais ces attentats ont aussi une fonction interne � l'extr�me-droite. Jeunesses identitaires, le fant�me d'Unit� radicale, penche plut�t pour une position proche des nationalistes corses. � plusieurs reprises d�j�, ils se sont r�jouis des attentats racistes. Mais les enqu�teurs ne leur accordent gu�re d'importance. � l'inverse il existe un noyau dur du Front national compos� autour de quelques anciens combattants, de rapatri�s d'Alg�rie et, plus f�cheux, poss�dant des complicit�s au sein m�me de la police en Corse. Or l'attitude du ministre de l'Int�rieur est sujette � des forts d�bats au sein m�me de la mouvance frontiste (celle du Front national de Jean-Marie Le Pen). Deux positions s'y affrontent : celle traditionnelle d'une France forte, centralis�e incarn�e en particulier par Roger Holeindre qui, malgr� un patronyme continental, est Corse de p�re et de m�re comme il se pla�t � le r�p�ter. Les Frontistes corses sont en grande partie sur ces positions d'autant que beaucoup sont des anciens rapatri�s d'Alg�rie. L'autre position est f�d�raliste et partisane de donner plus de pouvoirs aux r�gions. Elle est en passe de devenir majoritaire dans le Front national et seul la forte personnalit� de Jean-Marie Le Pen parvient � la bloquer. Le plasticage de la mosqu�e de Bal�one serait un avatar de cette s�rie de chocs ext�rieurs � la Corse. Enfin, Nicolas Sarkozy est ressenti comme un danger pour les Lepenistes. Un Chirac un rien corrompu est une cible facile pour l'extr�me-droite. Un Nicolas Sarkozy vindicatif et empi�tant parfois sur les terrains de chasses privil�gi�es des Frontistes est autrement plus dangereux. D'o� tout l'int�r�t de la strat�gie de tension qui est tent�e dans l'�le.
Quant aux agressions dont auraient �t� victimes les deux Alg�riens, elles n'auraient rien � voir du tout avec l'OSC et l'attentat de Baleone. Il est parfois dangereux de mettre bout � bout des faits qui n'ont � voir entre eux qu'une ambiance d�testable.
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