Il y a vingt ans un sous-pr�fet �tait assassin� en Corse dans l�indiff�rence de l��tat
Le 13 septembre 83, � Miomo, sur la route qui m�ne � sa maison, Pierre-Jean Massimi, qui �tait depuis 16 mois le secr�taire g�n�ral du d�partement de la Haute-Corse, est abattu au volant de sa voiture. Il avait rang de sous-pr�fet et �tait un ami personnel de Fran�ois Giacobbi, � patron � du clan radical de gauche et violemment anti-nationalistes. C'�tait le premier haut fonctionnaire abattu dans l'�le et ce malgr� la � remise en ordre � effectu�e par le pr�fet Robert Broussard.
Les deux quotidiens titrent alors sur l'assassinat de cet �narque de 37 ans, qui avait �t� charg� de mettre en �uvre, avec Fran�ois Giacobbi, une d�centralisation voulue par le statut Defferre vot� l'ann�e pr�c�dente.
Bien que le commissaire Broussard affirmera ne rien savoir de cet acte, tout semble d�marrer au moins en apparence � partir la disparition du militant nationaliste Guy Orsoni en juin 1983.
Nous renvoyons � tous les articles que nous avons pu �crire sur le sujet. Apr�s une p�riode de flottement au cours de laquelle Alain Orsoni, dirigeant du FLNC, collaborera avec la police alors dirig�e par Ange Mancini, le FLNC prendra la d�cision d�incriminer un complot mener par l��tat et d�cid� au plus haut sommet. Seront d�sign�s le secr�taire d��tat � la s�curit�, Joseph Franceschi, le commissaire Charles Pellegrini, futur membre de la cellule �lys�enne aux c�t�s de Paul Barril et du commandant Prouteau.
Lorsque Pierre-Jean Massimi est tu�, la � vendetta � du FLNC bat son plein. Le beau-fr�re de Pellegrini, F�lix Rosso, voyou appartenant � la bande de Jean Alfonsi, vient d��tre abattu non loin de Porto-Vecchio. Pour la direction du Front il importe de d�montrer que son organisation est la victime d�un complot foment� par des � barbouzes �.
C�est que les temps sont difficiles pour l�organisation clandestine soumise � la r�pression mais aussi � la r�probation majoritaire des Corses.
En janvier 1983, lors d�une conf�rence de presse, le F.L.N.C a r�it�r� la n�cessit� de l�imp�t r�volutionnaire. Or tout le monde sait que des voyous travaillent pour le FLNC et s�en mettent de plus en plus dans les poches. Pierre Poggioli, le leader incontest� de l��poque, affirme que l�institutionnalisation de ce racket politique a �t� n�cessaire � cause des d�rives provoqu�es par l�autonomisation des diff�rents secteurs et la mont�e en force des mezzu mezzu, les moiti� voyous moiti� militants qui joueront un si grand r�le dans les pr�mices de la scission qui interviendra sept ans plus tard.
En f�vrier de la m�me ann�e, le gouvernement dissout le F.L.N.C. et le commissaire Broussard devient le tout premier pr�fet charg� de la s�curit� alors que la Corse est encore boulevers�e par l�assassinat du coiffeur Shock par un commando se r�clamant du FLNC. Le pr�fet Broussard en profite pour tenter de � criminaliser � le FLNC. De tels souvenirs d�montrent au passage que les belles histoires selon laquelle la clandestinit� �tait hier anim�e d�id�aux purs ne tiennent pas � l��tude de l�Histoire avec un grand H. Paul Giacobbi devrait s�en souvenir avant de magnifier ce FLNC qui annon�ait d�j� ce qu�il est aujourd�hui.
La rumeur selon laquelle le gouvernement a voulu l�assassinat de Guy Orsoni se r�pand en Corse comme une tra�n�e de poudre. Jean Colonna, maire de Pila Canale et juge de paix dans le monde des voyous propose au FLNC de le rencontrer afin d��viter une guerre.
Alain Orsoni h�site puis refuse. De nombreux voyous seront descendus. L�assassinat de Pierre-Jean Massimi est cens� d�montrer a posteriori l�implication de Franceschi dans cette disparition. C�est d�ailleurs une m�thode qu�utiliseront souvent le FLNC et Armata Corsa : r�pandre des rumeurs et des calomnies sur le compte d�une personne, l�abattre puis montrer le cadavre en pr�tendant que l�assassinat lui-m�me justifiait l�assassinat. Imparable comme raisonnement.
Le 21 septembre 1983, le F.L.N.C revendique l'assassinat de Masimi � en repr�sailles � la disparition de Guy Orsoni militant nationaliste ex�cut� par l��tat �.
Le 31 d�cembre 1983, une fuite polici�re attribu�e plus tard � un militant d�extr�me-droite proche d�Alain Orsoni, fait savoir au FLNC que le � chimiste � Jean-Marc Leccia accus� par le FLNC d�avoir particip� � l�assassinat de Guy Orsoni a �t� arr�t� � Miami dans l�une des r�sidences des Zemmour. Le FLNC fait conna�tre la nouvelle et il se produit un �v�nement proprement incroyable qui met � mal la th�orie du FLNC : Jean-Marc Leccia est extrad� et transport� sans aucune pr�caution � la prison d�Ajaccio. Il y sera assassin� en compagnie de son complice Salvadore Contini le 7 juin 1985 par un commando du FLNC compos� de Pantal�on Alessandri, de Bernard Pantalacci et de Pierre Albertini.
L�enqu�te relative � Pierre-Jean Massimi est aussi �tonnante que le transfert de Leccia � Ajaccio. La police donne l�impression de ne pas suivre de piste. Pourtant des �l�ments sont l� et le premier d�entre eux est qu�un homme a donn� le top d�part pour que les tireurs se mettent en place.
D�s lors le FLNC va r�pandre deux sortes de rumeurs. La premi�re est celle de l�assassinat politique directement li� � l�affaire Orsoni. En juin 1983, le FLNC avait d�j� � vis� � Massimi en le traitant de � barbouzes � avec un sous-pr�fet de l��poque. L�organisation clandestine affirmatif que Joseph Franceschi, secr�taire d'�tat � la S�curit�, avait rencontr� Pierre Massimi le 18 juin, le lendemain de la disparition d'Orsoni et avait discut� de cette disparition. Il est vrai que Franceschi avait rencontr� Massimi mais dans le cadre de leurs activit�s professionnelles puisque le gouvernement pr�parait sa d�centralisation sous la houlette de Fran�ois Giacobbi. C�est d�ailleurs l� un des grands principes de la d�sinformation que de prendre des faits exacts et de les relier par des raisonnements sans fondement.
Or huit jours apr�s le meurtre, le FLNC revendique donc l'assassinat de Pierre-Jean Massimi en m�me temps que celui du restaurateur de Lecci, F�lix Rosso, beau-fr�re du commissaire Pellegrini. Le FLNC pr�cise qu'il a � condamn� � mort � Massimi parce que c'est lui qui aurait re�u 3 millions de francs des mains de Franceschi pour payer ceux qui ont fait dispara�tre Guy Orsoni dans le cadre de ce que le FLNC appelle le � plan de liquidation des nationalistes �.
Le ministre de l'Int�rieur de l'�poque, Gaston Defferre, qualifie cette th�orie de � fantaisiste � sans donner l�importance suffisante � l�assassinat d�un haut fonctionnaire. Cinq jours apr�s cette revendication explicite, la CCN (consulta di i cumitati naziunalisti) la vitrine l�gale du FLNC est dissoute par le conseil des ministres.
La seconde rumeur que r�pandront les nationalistes du FLNC Canal historique,une fois la scission consomm�e est plus vicieuse. Elle �manait de ceux qui voulaient salir Alain Orsoni quitte � briser le mythe de son fr�re � martyr de la cause �. Contre toute vraisemblance Guy sera trait� de � trafiquant de drogue �. Concernant Massimi, il s�agira de d�montrer les relations suppos�es d�Alain Orsoni et du LNC Canal habituel avec les voyous de la Brise de Mer.
Il se dira donc que Pierre-Jean Massimi avait beaucoup perdu au jeu dans des parties dirig�es par Francis Le Belge. � l��poque celui-ci tentait de prendre sa part du g�teau � Gaetano Zampa mis � terre par l�assassinat du juge Michel. Francis le Belge avait demand� aux futurs barons de la Brise de mer alors d�butants de le d�barrasser des alli�s de Zampa. Ainsi Hoareau dit le Libanais avait-il �t� abattu � �le-Rousse. Pierre Jean Massimi aurait promis en �change de sa dette d�acqu�rir les titres de propri�t� d�un terrain destin� � accueillir un laboratoire de drogue en Corse. Puis il aurait manqu� � sa parole. Un contrat aurait alors �t� lanc� contre lui, contrat � r�cup�r� � par le FLNC afin de parfaire sa th�orie du complot.
Le probl�me c�est que rien, strictement rien, ne vient prouver une telle th�se. Massimi �tait connu pour la l�g�ret� de sa cuisse et son amour du jeu. Point barre. Il �tait aussi un farouche opposant au FLN et c�est vraisemblablement pour cela qu�il a �t� tu� parce qu�il �tait la pi�ce id�ale d�un puzzle dont il fallait � tout prix d�montrer la r�alit�. L�enqu�te,plomb�e par la mauvaise r�putation du haut fonctionnaire, s�enlisera au point de ne rien donner. � Et puis on ne voulait pas savoir en haut lieu, nous dit l�un des acteurs policiers de l��poque. Le pouvoir �tait aux mains de la cellule �lys�enne et il n�est pas certain que certains de ses membres n�aient pas essay� de leur c�t� de briller aupr�s du pr�sident Mitterrand. Le FLNC a fait courir le bruit qu�il avait aussi tent� d�ex�cuter le commissaire Pellegrini. Il est possible qu�en haut lieu on n�ait eu peur d�une d�rive incontr�lable. En tous les cas cette enqu�te a �t� volontairement sabot�e. �
Corse-Matin a consacr� pour l�anniversaire des vingt ans un article dans lequel s�expriment les deux enfants de Pierre-Jean Massimi, Beno�t et Olivier. Ils se disent encore choqu�s, traumatis�s � par le silence de la proc�dure et la dispersion de l'enqu�te vers les autres pistes: l'immobilier, les femmes, le jeu.� La piste politique n'a jamais �t� privil�gi�e. Le dossier est devenu aussi �norme que vide. Les pouvoirs publics de l'�poque avaient, � l'�vidence, la volont� d'enliser l'enqu�te, de la faire volontairement d�raper� analyse aujourd'hui avec le recul Me Pierre-Louis Maurel, avocat de la famille Massimi �.
Selon cet avocat, � un policier avait m�me d�pos� un rapport donnant le nom des assassins qui �taient alors en d�tention � Paris mais on ne les a que trop tardivement interrog�s �.
Corse-Matin �crit encore : � Les deux enfants ont grandi dans la douteur de cette chape de silence. Beno�t, que nous avons joint au t�l�phone, le confirme: � Ce fut un long silence jusqu'� la mort tragique du pr�fet Erignac, comme si notre p�re n'avait jamais exist�. Oui,nous voulons savoir la v�rit� m�me s'il a �t� tu� en repr�sailles par le FLNC. La v�rit�, m�me si elle peut �tre p�nible � entendre, c'est mieux que le silence et toutes les salet�s qui ont �t� dites et �crites sur la vie priv�e de notre p�re. Mais la v�rit�, on ne l'a pas cherch�e, on l'a sciemment occult�e �.
Le quotidien pr�cise qu�une plaque comm�morait le souvenir de Pierre-Jean Massimi au conseil g�n�ral de la Haute Corse. Elle a �t� d�truite dans l'attentat qui a pulv�ris� l�h�tel du D�partement en 1991, attentat revendiqu� � l��poque par le FLNC Canal habituel dirig� par Alain Orsoni. La famille voudrait qu'une st�le f�t pos�e � l'endroit de sa mort car m�me ce minimum n�a pas �t� accompli par l��tat fran�ais. � Il n'y a pas la volont� de le faire � regrette Beno�t Massimi. Nicolas Sarkozy devrait revenir en Corse pour r�apposer la plaque comm�morative du pr�fet Erignac bris�e par des vandales.
Pourquoi donc deux poids deux mesures entre le traitement de l�affaire Erignac et celle de l�affaire Massimi. La raison d��tat tout simplement qui foule aux pieds la morale et la stricte logique.
Quand l�h�pital socialiste se fout de la charit� umpiste
Le premier secr�taire du parti socialiste Fran�ois Hollande a critiqu� dimanche l'absence de politique du gouvernement vis-�-vis de la Corse, y voyant la cause de la "situation explosive" sur l'�le.
On se dit parfois que les membres de l�opposition font de l�humour sans le savoir. On n�aurait pas cru Fran�ois Hollande capable de brocarder l�actuel gouvernment sur le probl�me de la Corse au vu de l��chec retentissant que les socialistes ont subi dans l��le. H� bien pas du tout. La politique est l�art de renvoyer les patates chaudes � l�adversaires surtout quand on vous les a balanc�s durant votre mandature.
La gauche avait r�prim� le nationalisme clandestin avant de pactiser avec lui. La droite l�accusati alors de tous les maux. Il s�est pass� le m�me sc�nario quand la droite est arriv�e au pouvoir et la gauche a alors accus� la droite d��tre les suppots du satan corse. Jospin a essay� la voie de la sagesse. Il s�est fait incendier par la droite. La droite a emprunt� le m�me chemin et avec l�intelligence de la poule de Pavlov la gauche l�attaque comme avant. Et vive l�imagination.
"On voit bien le cycle qui est en train de se produire en Corse, c'est-�-dire provocation, r�pression", a dit M. Hollande interrog� sur les incidents de Luri, en Haute-Corse, qui ont oppos� gendarmes et manifestants nationalistes. Il y a "� partir de l� une situation explosive � tous les sens du terme", a-t-il ajout�.
� ce compte-l� chaque citoyen se sent capable d��tre premier secr�taire du PS.
"Ce qui manque aujourd'hui ce n'est pas les forces de l'ordre, elles font ce qu'elles peuvent (...), c'est que le pr�sident de la R�publique (Jacques Chirac) et le Premier ministre (Jean-Pierre Raffarin) d�finissent un cap, une politique et s'y tiennent", a affirm� le dirigeant de l'opposition. Mais, il faut aussi que le peuple corse "finisse par comprendre qu'il faut trouver une issue qui n'est que dans la d�mocratie".
Bravo. Il a tout compris.
|
|