Corse : quand Jean-Pierre Chev�nement yoyotte
LUNDI, 16 juin 2003
L'ancien ministre de l'Int�rieur Jean-Pierre Chev�nement a consid�r� dimanche qu'en "faisant des s�paratistes les arbitres de la majorit� future" en Corse, le gouvernement "installe les ind�pendantistes au c�ur du pouvoir". On se demande bien d�o� l�ancien ministre de l�int�rieur a bien pu tirer une telle analyse. Il y a en effet toutes les chances que les �lus corses partent aux territoriales sur des listes d�inspiration nationale et que les votes se recomposent selon d�autres int�r�ts : r�gionaux, personnels et donc tr�s pragmatiques. Les nationalistes n�ont donc gu�re de chance de jouer le moindre r�le d�arbitre.

"Cette faiblesse aura un prix exorbitant : loin de sortir la Corse du cycle des violences, elle l'y enfoncera davantage. Il ne restera plus alors qu'� mettre la Corse en cong� de la R�publique pour pr�tendre avoir r�solu le probl�me", a poursuivi le pr�sident d'honneur du Mouvement R�publicain et Citoyen (MRC). Il est vrai que c�est durant sa p�riode minist�rielle que le pr�fet Erignac fut assassin�. Cet acte est le plus violent que la Corse ait jamais enregistr� contre l��tat fran�ais en plusieurs d�cennies ce qui transforme en effet Monsieur Chev�nement en un sp�cialiste du maintien de l�ordre en Corse. C�est encore durant son minist�re que la guerre des polices atteignit un niveau insupportable en Corse. Ah l�ordre, toujours l�ordre. Et qu�il n�aille pas se cacher derri�re des n�gociations avec les nationalistes. � l��poque Lionel Jospin n�y songeait m�me pas et ne jouait que la carte r�pressive. Alors c�est vrai Monsieur Chev�nement a �t� malade. Ce qui doit expliquer � la fois l��tat de la Corse et son propre �tat un rien radoteur.

"En faisant �lire la future Assembl�e unique � la proportionnelle, le gouvernement offre la Corse sur un plateau aux ind�pendantistes", assure-t-il. On fera charitablement remarquer � M. Chev�nement que l�assembl�e r�gionale a toujours �t� �lue de cette fa�on et que l�on pourrait � l�inverse reprocher � Nicolas Sarkozy ne pas avoir chang� grand-chose � la donne.

"Pourquoi avoir r�duit la prime majoritaire de 25 %, comme partout dans les r�gions continentales, � 10 % seulement en Corse, sinon pour garantir aux ind�pendantistes qu'ils seront demain la clef indispensable � toute majorit� ?", interroge M. Chev�nement au lendemain de la publication au Journal officiel du d�cret convoquant les �lecteurs de l'�le au r�f�rendum du 6 juillet.

Le grand probl�me est que justement en Corse la prime au gagnant n�a pas �t� r�duite mais au contraire augment�e : elle passe de 6 � 10 % d�montrant ainsi exactement le contraire de ce que l�ancien ministre de l�Int�rieur veut d�montrer.

Reste une question de fond : Monsieur Chev�nement est bien plac� pour savoir que la r�pression tous azimuts cr��e en Corse des synergies de solidarit� qui jouent en faveur des groupes clandestins. La seule campagne qui marche un petit peu dans l��le est celle en faveur des prisonniers. Ce n�est donc pas en cr�ant les conditions d�une mise � l��cart des nationalistes qu�on parviendra � combattre efficacement les raisons de la clandestinit�. Celle-ci ne dispara�tra qu�� deux conditions : la premi�re est une application sans concession de la loi et de la justice. La deuxi�me est l�implication des nationalistes dans un processus durant lequel ils seront responsables et auront des comptes d�mocratiques � rendre. Un tel raisonnement, inaccessible � M. Chev�nement, est celui qui pr�vaut actuellement en Irlande dans des conditions autrement plus difficile voire au Moyen-Orient. D�s le moment o� toutes les solutions r�pressives ont �chou� force est de constater que le probl�me r�siduel a d�autres causes que la simple aigreur de caract�re de quelques dizaines d�individus. Quand une famille de pens�e r�unit 25 % des suffrages exprim�s, il para�t sage de consid�rer que peut-�tre elle doit �tre prise en compte et surtout ne pas �tre exclue du champ d�mocratique.

�2003 L'investigateur - tous droits r�serv�s